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Le déclin d’une cuisine communautaire emblématique de Parc-Extension

Le déclin d’une cuisine communautaire emblématique de Parc-Extension

À Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.

Une cuisine communautaire de Parc-Extension, qui servait aussi à domicile des repas chauds à des aînés du quartier pour seulement 3 $, doit cesser ses activités dès jeudi. Le Centre de services scolaire de Montréal reprend ses locaux à des fins de rénovation. J’ai partagé un repas avec des artisans et des dîneurs déjà endeuillés de cette institution qui existe depuis plus de 20 ans.

Il n’y a pas que les particuliers qui sont susceptibles de se faire « rénovincer » comme locataires. Ça arrive aussi à des organismes caritatifs qui, privés de locaux abordables, doivent souvent se saborder ou s’amputer de certains services.

C’est le cas de l’Organisation des jeunes de Parc-Extension, alias PEYO, qui ferme sa cuisine après 22 ans d’opération.

« Déménager des bureaux administratifs, c’est une chose. Mais relocaliser toute une cuisine professionnelle, on n’a tout bonnement pas les moyens… surtout que la Ville ne nous aide pas ! » déplore Sandra Mbemba qui supervise la popote depuis 17 ans.

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Finis, donc, la centaine de repas complets à 6 $ pour les adultes et à 3 $ pour les enfants servis chaque jour pour les gens dans le besoin… Et on sait, dans le contexte actuel, beaucoup trop de gens ont cruellement besoin de tels services alimentaires.

Fini aussi la popote roulante qui allait porter les repas chauds à ceux qui ne pouvaient pas se déplacer…. un nombre de gens croissant avec le vieillissement de la population.

Le livreur du PEYO représentait parfois la seule visite quotidienne pour cette clientèle vulnérable et isolée. Ce lien sera rompu.

« Notre livreur les connaît et, si quelqu’un ne répond pas à la porte, on avise les services sociaux. Des fois, c’est comme ça que l’on se rend compte que certains bénéficiaires sont décédés », raconte Mme Mbemba qui par habitude continue de parler de sa cafétéria au présent…

« On espère pouvoir rouvrir notre cuisine un jour quelque part dans le quartier ou ici après les rénovations », ajoute-t-elle, mais je ne sens pas beaucoup d’espoir dans sa voix.

Un deuil

Quand j’arrive à la cafétéria de la rue Saint-Roch, tout près du parc Jarry, ça grouille de vie : un mélange d’étudiants, de professeurs d’une école adjacente, d’adultes en francisation et de gens du quartier.

Une odeur de sauce tomate embaume la salle à manger en demi-sous-sol.

Une résidente du quartier de 46 ans, Claude Bélanger pleure en mangeant son pastitsio (une sorte de lasagne grecque). Elle ne sait pas encore ce qu’elle fera à la fermeture de la cuisine dont le personnel est devenu, me dit-elle, comme une famille pour elle.

« Quand j’ai commencé le bénévolat il y a huit ans, c’était pour ne plus demeurer toute seule chez moi toute la journée à ne rien faire… et là, je ne sais pas ce que je ferai la semaine prochaine », confie Mme Bélanger qui s’occupe de nettoyer les tables et de vider les poubelles à la fin de chaque période de repas.

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« Je ne veux pas rester encabanée chez moi… mais je ne sais pas ce que je vais faire. » Ça crève le coeur.



chef francois

Désemparée par la disparition de la cafétéria qui a été comme sa famille, la bénévole Claude Bélanger avait du mal à me parler sans verser des larmes.

Louis-Philippe Messier

Pour l’avant-dernier et le dernier repas de la cuisine, son chef depuis 18 ans va préparer ses deux mets fétiches les plus appréciés.

« C’est malheureux ce qui nous arrive, mais il faut terminer ça en beauté… et ça veut dire poulet frit à la coréenne mercredi et griot (porc frit haïtien) jeudi ! » me dit le chef cuisinier François Brière, justement, en train de retourner les morceaux enfarinés dans l’huile brûlante.

Jeudi
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