“La gestion mentale, une clé de la carrière de Remco Evenepoel”.

Avait-il déjà le vélo derrière la tête quand il avait 15 ans ?

” Je me suis justement très vite bien entendu avec Remco parce que nous étions tous les deux fans de cyclisme ! Le lundi, on discutait des courses du week-end. Et déjà à l’époque, je me souviens lui avoir dit qu’avec ses qualités il devrait faire du duathlon ou du triathlon, même sans savoir comment il nageait. Mais dans sa tête, il n’y avait pas de place au doute, c’était le football, un point c’est tout ! Je sais qu’il roulait un peu les dimanches, les lendemains de matchs, avec son papa, pour décrasser… ce qu’on lui déconseillait car, comme il avait de toute façon déjà une endurance exceptionnelle, ce n’était pas cette qualité-là qu’il devait travailler en priorité pour progresser au foot. “

Tous ses faits et gestes sont interprétés, positivement ou négativement. Le plus délicat, c’est évidemment la gestion des commentaires négatifs qu’il a tout intérêt… à ne pas lire ! Il est une personnalité publique. Et gérer tout ça sera une des clés de sa carrière.

Vous l’avez donc bien connu adolescent. Désormais, c’est un adulte, qui s’est d’ailleurs récemment marié et qui est devenu champion du monde dans sa discipline. Il a grandi. Avez-vous senti cette évolution ?

” Oui oui ! J’ai surtout perçu cette évolution depuis le début de sa carrière de coureur. À Neerpede, on a côtoyé le ‘Remco guerrier’. Moi, ce qui m’a vraiment frappé depuis une bonne année, c’est son côté désormais calme et posé, bien différent de sa période football et de ses premières saisons dans le vélo. En 2022, que ce soit sur Liège-Bastogne-Liègesur la Vuelta ou aux Championnats du monde, qu’est-ce qu’il était tranquille ! Et j’ai eu la même sensation lors de la fête organisée sur la Grand-Place de Bruxelles. Lorsque le bourgmestre Philippe Close lui a tendu le micro, j’avais des craintes vu le monde, la pression, etc. Mais il a répondu très calmement en prenant le temps de la réflexion. C’est un changement assez marquant dans son chef. Même si son caractère de guerrier revient parfois, avec ses bons et ses mauvais côtés, son attitude a également évolué en course. “

On sait qu’Evenepoel a récemment lu des bouquins sur la préparation mentale, ce qu’il ne faisait pas quand il était encore un jeune footballeur adolescent. Il a sans doute appris dans ces livres comment gérer certaines situations.

” C’est certain, oui. Il a vraiment accompli un gros travail dans ce domaine. Je sais, par exemple, qu’il s’interdit d’aller sur les réseaux sociaux lors des repas pour manger en pleine conscience. C’est un ensemble de petites choses qui l’aident dans sa vie d’aujourd’hui. Quand il jouait au foot à 15-16 ans, il ne devait pas gérer tout ce qui gravite désormais autour de lui comme les médias, les supporters, les réseaux sociaux, etc. Il n’était à l’époque qu’un jeune talent parmi d’autres. Maintenant, c’est différent. Il maîtrise la course et les entraînements. En revanche, il doit se concentrer sur tout ce qu’il y a autour, sur cette fameuse gestion émotionnelle qui fait partie des paramètres de la performance et qui influence la carrière et la vie personnelle d’un sportif de haut niveau. Avec ses derniers résultats, cet entraînement invisible fait donc de plus en plus partie de son quotidien. C’est une vraie démarche positive qu’il a entamée. Je ne dirais pas qu’on a devant nous un ‘nouveau Remco’ mais il a en tout cas passé un cap. Tous ses faits et gestes sont interprétés, positivement ou négativement. Le plus délicat, c’est évidemment la gestion des commentaires négatifs qu’il a tout intérêt… à ne pas lire ! D’ailleurs, preuve que ça le touche, dans certaines célébrations de victoires, il a placé l’index sur la bouche pour adresser un “chut” à ses détracteurs. Durant sa carrière, il connaîtra forcément des hauts et des bas. Et il devra apprendre à passer outre les moments de bas, que ce soit en public ou dans son for intérieur. Il est une personnalité publique. Et gérer tout ça sera une des clés de sa carrière. “