U2
Île – Universel
Osciller
★★★
U2, le groupe qui porte dans son ADN la construction d’hymnes postpunk cathédrale à faire trembler les stades, en version ‘unplugged’ ? Les géants, pensant petit ? Les conquérants, se mettant humbles ? ‘Chants de reddition’ Cela peut bien représenter un amendement auto-infligé à l’ensemble, ou une trahison, ou un divertissement pour messieurs ennuyeux. Il y a une autre façon de le voir, de le comprendre comme un moyen de montrer que ses chansons aux aspirations “plus grandes que nature” bouger en les transformant en leur négatif et sans trop hausser le ton.
Ici, Adam Clayton (basse) et Larry Mullen Jr (batterie) sont presque en vacances, car l’image est dominée par un réseau délicat de guitares acoustiques et de pianos. Réduction au plus petit dénominateur commun et un regard vers le passé qui vient donner une continuité au ‘modus operandi’ moderne du quatuor, qui s’est longtemps mélancolique et s’est léché la gueule de sa vulnérabilité : les albums consacrés à l’innocence (2014) et à l’expérience (2017), le ‘revival ‘tours of ‘The Joshua Tree’ (2017-19) et le volume de mémoires de Bono, intitulé justement ‘Surrender’, précédent direct de ce quadruple album.
Chanter dans ton oreille (ou presque)
Chacun des disques est attribué à un membre du groupe, et il y a autant de chansons, 40 au total, qu’il y a de chapitres dans le livre (bien que 11 ne soient pas les mêmes). Pour Le bordqui signe la production, est, dit-il, d’environ recréez les chansons “comme si Bono les chantait à votre oreille”, et de le faire avec peu d’hypothèques, donnant naissance à de nouveaux arrangements et dynamiques. Les habitués vous assistent Brian Eno et Daniel Lanoisainsi que le savant Bob Ezrin (curriculum avec Lou Reed, Alice Cooper, etc.), et le résultat montre une étonnante richesse de nuances, passant de l’ambiance gospel subtile de ‘One’, abaissant la clé juste au moment où le ‘crescendo’ devrait arriver, à une ‘Red hill mining town’ aux airs de cuivres et de mars populaires, où le groupe ne peut s’empêcher de donner libre cours à son grand instinct. Comme dans ‘Pride (au nom de l’amour)’.
Les chansons à l’origine plus basées sur l’énergie et la puissance de l’électricité que sur la mélodie souffrent le plus, bien que ‘Vertigo’ sorte avec une poignante touche de violoncelle du membre de 2Cellos Stjepan Hauser. « La mouche » conserve une partie de sa nature perverse avec ce « groove » avec le folk tordu, et l’album glisse une seconde chance pour des chansons appréciables, mais enterrées sous les ‘hits’, comme ‘Walk on’, renommé en soutien à l’Ukraine. Bono s’avère être un gagnant de cette pièce, qui lui permet d’aller jusqu’au murmure et au pincement vocal exprimant la maturité.
Son interprétation met le lasso à un exercice résolu avec style et inventivité modéréebien que nous sachions tous que lors de la prochaine tournée, le monde priera pour que U2 récupère les versions originales.