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Trois joyaux mathématiques de Joseph Bertrand | Café et théorèmes | Science

Trois joyaux mathématiques de Joseph Bertrand |  Café et théorèmes |  Science

Joseph Louis François Bertrand (1822-1900), longtemps membre et secrétaire de la prestigieuse Académie des sciences de Paris, ne fait pas partie de ces mathématiciens que l’on immortalise en grand format pour orner les murs des facultés et des départements et il est rare que ses collègues mathématiciens actuels nous font part de ses bribes Biographie. Cependant, son nom est lié à certaines déclarations bien connues de professionnels, dont l’une même par un large public. C’est lui Postulat de Bertrand qui stipule qu’entre un nombre et son double il y a toujours au moins un nombre premier. Par exemple, entre 2023 et 4046 il y a 2027 et bien d’autres.

Bertrand a énoncé sa conjecture en 1845 dans un article sur les symétries de fonctions, au sein de ce que nous appellerions aujourd’hui la théorie des groupes. Pafnuty Chebyshev Il l’a prouvé sept ans plus tard et, de plus, il a prouvé que le nombre de nombres premiers entre un nombre arbitrairement grand et son double augmente sans limite. Par exemple, entre 100 et 200 il n’y a que 21 nombres premiers et entre 1000 et 2000 il y en a déjà 135. La preuve de Chebyshev, un peu compliquée, a été magistralement simplifiée en 1932 par le singulier mathématique Paul Erdős. Un point fondamental de sa démonstration est le fait que le produit des n premiers nombres divise toujours le n suivant. Par exemple, 1·2·3·4=24 divise 5·6·7·8=1680. Par conséquent, les nombres premiers entre n et 2n apparaîtront toujours comme facteurs dans le quotient. Aussi Srinivasa Ramanujan a donné une preuve du postulat de Bertrand, bien qu’il soit moins élémentaire et élégant que celui d’Erdős.

Notre compréhension actuelle de la distribution des nombres premiers nous permet d’aller beaucoup plus loin. Si l’on considère un nombre réel α supérieur à 1 et inférieur à deux, à partir d’un certain nombre n on sait qu’entre n et αn il y aura toujours un nombre premier. Par exemple, pour α = 1,00025 il n’y a pas de nombres premiers entre 80000 et 80020 = 80000α, mais on peut assurer qu’il y aura entre n et αn pour n supérieur à 400000. D’autre part, les avancées récentes dues à James Maynard, qui lui ont valu la médaille Fields de 2022, impliquent qu’il est possible de trouver sporadiquement de nombreux nombres premiers cumulatifs en réalité petits intervalles.

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Une autre curieuse contribution de Bertrand est celle dite Le paradoxe de Bertrand, un paradoxe probabiliste simple et magnifique qui semble défier le pouvoir des mathématiques de fournir des solutions sans ambiguïté. On considère un triangle équilatéral, pointant vers le haut, et son cercle circonscrit (celui qui passe par ses trois sommets). Le problème est de trouver la probabilité qu’une corde (un segment qui joint deux points du cercle) choisie au hasard soit plus longue que le côté du triangle.

Une solution consiste à raisonner en disant que la corde pourrait toujours être tournée de manière à ce qu’elle parte du sommet supérieur. Le triangle divise la circonférence en trois arcs similaires de 120° et que la corde soit plus grande que le côté équivaut à se terminer dans l’arc sous la base, donc, la probabilité recherchée est ⅓. Une autre solution est obtenue si nous faisons tourner la corde jusqu’à ce qu’elle soit en dessous du centre et parallèle à la base. Il sera plus long que la base, tout comme vous coupez la moitié supérieure du rayon perpendiculairement à celui-ci, ce qui donne le résultat ½.

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Bertrand a obtenu une troisième solution dans son travail, et il y en a d’autres. Sortir de ce paradoxe, c’est comprendre qu’il est nécessaire de préciser mathématiquement ce que signifie “aléatoire” lors de la formulation du problème, car il existe une infinité de façons de le faire. En 1933, Andreï Kolmogorov a jeté les bases de la théorie moderne des probabilités en établissant quelques axiomes, exigences minimales, qui doivent être satisfaites par tous les modèles probabilistes quelle que soit la situation dans laquelle ils sont appliqués. Les différentes solutions du paradoxe correspondent à chaque modèle.

Enfin, Bertrand a aussi un théorème avec son nom. Nous savons tous que la force de gravité est attractive et inversement proportionnelle au carré de la distance. Par une magie mathématique complexe, cela implique qu’une planète tourne toujours autour d’un soleil massif sur une orbite elliptique (c’est la première loi de Kepler). L’ellipse est parcourue de manière non uniforme, la planète avance d’autant plus vite qu’elle se rapproche de son soleil situé dans l’un des foyers ; cependant, le mouvement est périodique : à temps constant, une année dans le cas de la Terre, il revient au point de départ et répète le mouvement, ce qui favorise la précision d’un horloger dans l’étude du Système Solaire, notamment en incorporant les corrections dues aux perturbations mutuelles.

Supposons que dans un univers hypothétique les soleils attirent les planètes avec une force de gravité différente de la normale, est-il encore possible que toutes les orbites planétaires soient périodiques ? Le théorème de Bertrand donne une réponse complète : ce sont des ellipses quand ce sont des ellipses et cela ne se produit que lorsque la force gravitationnelle est normale ou proportionnelle à la distance, le type de force qui apparaît lors de l’étirement d’un ressort (loi de Hooke). Avec curiosité, Isaac Newton déjà considéré dans son Principaux cette deuxième possibilité. Il a montré ce qui correspond au soleil étant au centre de l’ellipse, plutôt qu’à un foyer.

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Si l’on rêve d’un autre type de force gravitationnelle attractive qui ne dépende que de la distance, par exemple inversement proportionnelle à celle-ci, le théorème de Bertrand assure que les orbites ne vont généralement pas être périodiques. En réalité, la relativité générale apporte une modification effective de la gravitation originelle qui contribue à la précession du périhélie de Mercure.

Servez ces trois belles déclarations associées à Bertrand pour rappeler, avec un an de retard, le bicentenaire de la naissance, le 11 mars, d’un mathématicien pas si connu, mais qui a le singulier honneur d’associer son nom à un postulat, un paradoxe et un théorème.

Fernando Chamizo Il est professeur à l’Université autonome de Madrid et membre de l’Institut des sciences mathématiques

Café et théorèmes est une section dédiée aux mathématiques et à l’environnement dans lequel elle est créée, coordonnée par l’Institut des sciences mathématiques (ICMAT), dans laquelle chercheurs et membres du centre décrivent les dernières avancées de cette discipline, partagent des points de rencontre entre les mathématiques et d’autres expressions sociales et culturelles et se souvenir de ceux qui ont marqué leur développement et ont su transformer le café en théorèmes. Le nom évoque la définition du mathématicien hongrois Alfred Rényi : « Un mathématicien est une machine qui transforme le café en théorèmes ».

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