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Woippy. Travail d’intérêt général : que vaut la peine ?

Woippy. Travail d’intérêt général : que vaut la peine ?

Le travail d’intérêt général existe depuis 1983. Cette peine, peu prononcée, permet pourtant d’éviter la prison et mise sur l’insertion. Certes son application nécessite un cadre et de l’investissement humain. Mais le retour peut s’avérer efficace, voire riche d’enseignements.

Frédérique THISSE

Aujourd’hui à 05:00

Les deux adolescentes assurent l’accueil des clients, passent derrière la caisse, font un brin de ménage. Elles trient les vêtements, les mettent en rayon. Elles travaillent dans une boutique solidaire ouverte à Woippy, avenue de Thionville, par l’association Action vers l’espoir. Elles sont sur le point de finir.

Jenna* y a bossé 35 heures. Shaineze* est restée 105 heures. La justice a fixé ces horaires. Les amies d’enfance n’ont pas été payées. Elles ont accompli la peine prononcée à leur égard l’an dernier. Le tribunal pour enfants de Metz les a condamnées à un travail d’intérêt général , accompagné de mesures éducatives.

Jenna, 18 ans, et Shaineze, 17 ans, ont été reconnues coupables d’extorsion et de violences avec arme en bande organisée. Mains serrées, sourires intimidés, cheveux relevés, les filles ne s’attardent pas sur les faits. Rien ne les oblige à en parler. Mais la condamnation les a marquées. « Le juge nous a donné le choix entre une peine deux mois de prison et le travail d’intérêt général, c’était vite vu », souffle Jenna.

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Le travail dans le magasin les a confrontées à une autre réalité. « Ici, on voit beaucoup de personnes dans le besoin », poursuit Jenna. « Elles n’ont pas toutes les mêmes origines, les mêmes croyances mais cela ne les empêche pas de s’entraider. » Shaineze acquiesce. « Les gens ne sont pas tous mauvais. Si tu les respectes, ils te respectent. »

« Valoriser, responsabiliser »

L’expérience vécue dans la boutique solidaire les a fait évoluer. La confiance de leur tuteur, président de l’association, les a portées. Jared Zola aime l’échange, la discussion. D’autant plus qu’il a les mots. « L’objectif premier de cet accueil, c’est de les valoriser, de les responsabiliser », souligne-t-il.

La posture, le ton, l’approche sociale, tout compte, tout se travaille. « J’étais moi-même enfant de quartier. J’ai vu des copains prendre des peines, être incarcérés. » Jared, éducateur de métier, croit au pouvoir de cette deuxième chance qu’il est aujourd’hui en mesure de donner. « Il faut être dans la pédagogie pas toujours dans le répressif. La jeunesse, c’est l’avenir », sourit-il.

Il est habilité par le ministère de la Justice à recevoir des Tigistes majeurs et mineurs, au sein de son association depuis 2020. « Il faut jouer sur leurs compétences », explique-t-il. « Si la personne ne veut pas être dans la boutique, elle peut s’occuper de l’entretien des extérieurs », illustre-t-il.

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L’association de Jared a été créée en 2017 à Metz nord, en soutien au camp de Bliiida à l’époque, et pour aider un ami qui œuvre auprès des enfants à Madagascar. La collecte de dons a prospéré. Action vers l’espoir occupe désormais un local à Woippy, tout est vendu un euro dans la boutique et d’autres services complètent la démarche solidaire. Jenna et Shaineze ont été touchées par ce qu’elles y ont trouvé.

Les deux ados déscolarisées veulent rebondir, s’inscrire en agence d’intérim avant d’entamer des formations à la rentrée. Jenna se projette dans une école d’aide-soignante. Shaineze vise la petite enfance. À 18 ans, elle n’en est pas à sa première condamnation par le tribunal pour enfants. « Je ne recommencerai jamais », avance-t-elle, la mine déterminée.

*Les prénoms ont été modifiés.

En chiffres

400

Le travail d’intérêt général non rémunéré doit s’inscrire dans une durée qui oscille entre 20 et 400 heures, comme le rappelle l’article 131-8 du code pénal.

324

En 2022, en Moselle, la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) a suivi 40 peines de TIG prononcées contre des mineurs. Les Services d’insertion et de probation (SPIP) ont accompagné 284 TIG prononcés contre des majeurs (ce qui représente une moyenne de 600 heures de travail réalisées par mois).

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26

Une écrasante majorité d’hommes sont condamnés à un travail d’intérêt général : 92 % selon les statistiques nationales du ministère de la Justice. La moyenne d’âge est de 26 ans environ.

85

Selon le ministère de la Justice, le taux de réussite du TIG est de 85 %. Il arrive en effet que l’expérience ne fonctionne pas.

40 ans et deux événements

Deux événements réservés aux partenaires sont organisés pour les 40 ans du TIG à Metz. Jeudi 15 juin, des vidéos croisant le regard des acteurs du TIG seront diffusées à la fac de droit. Le restaurant pédagogique de la Protection judiciaire de la jeunesse à Verdun assure la restauration en fin de journée. Jeudi 22 juin, les tuteurs de TIG seront mis à l’honneur, à l’ASPTT. Un point sur la Moselle sera donné. Une activité réunira tuteurs et professionnels des services judiciaires.

2023-06-06 06:00:00
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