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Voyager autrement : les bonnes pratiques écologiques et sociales

Voyager autrement : les bonnes pratiques écologiques et sociales

La nouvelle année est propice aux bonnes résolutions – qui tiennent rarement sur la durée. Il est souvent question de changer d’habitudes de vie (arrêter de fumer, moins boire, diminuer la viande, reprendre le sport) ou de façon de consommer, peut-être vers plus de sobriété, un mot résolument à la mode. Alors pourquoi ne pas se promettre de voyager autrement, en (bonne) conscience écologique et sociale ? La question n’a rien de saugrenue, notamment pour les globe-trotters invétérés – ou ceux qui se sont lancés dans un tour du monde à vélo ou à pied. Le voyage, moteur de l’économie mondiale drainé par le tourisme de masse, est responsable de 8 % du total des émissions de gaz à effet de serre, comme le rappelle l’Agence de la transition écologique (Ademe), en particulier du fait des déplacements en avion.

A cela, s’ajoutent diverses pollutions (déchets plastiques, de l’eau, des sols, etc) – jusqu’au sommet de l’Everest – et, entre autres, une hausse du prix de l’immobilier dans les zones touristiques entraînant «un déséquilibre du marché locatif» néfaste aux locaux. Ce qui pousse depuis cinq ans environ les autorités des destinations les plus fréquentées ou menacées – des Pays-Bas à la Thaïlande, de Venise à Bali – à prendre des mesures plus ou moins timides (taxes diverses, quotas, réservation obligatoire, interdictions d’accès temporaires) pour réguler ou limiter les flux. Voici donc quelques pistes du choix d’une destination à la consommation sur place pour tenter de réduire l’empreinte environnementale d’un voyage et en faire bénéficier l’économie et les populations locales.

Des destinations plus proches ou des voyages plus longs

Où partir en vacances ou en voyage l’année prochaine ? Celles et ceux qui ont la bougeotte chevillée au corps sont à coup sûr dans les starting-blocks pour contenter leurs désirs d’évasion. Or le choix d’une destination est déterminant si l’on envisage de limiter son empreinte carbone. Autrement dit : moins l’on va loin de chez soi, moins l’on contribuera à la dette carbone globale. Rien d’étonnant donc à ce que de plus en plus d’acteurs du tourisme (offices du tourisme départementaux, médias spécialisés ou voyagistes), et en particulier depuis la pandémie, mettent en avant la «microaventure», soit le fait de partir à la découverte de façon originale des charmes d’une région à moins de 200 kilomètres du domicile. Depuis deux ans, l’agence de voyages Chemins propose par exemple différents types de séjours «immersifs», de la Provence au Vercors, en vélo, méhari électrique ou en canoë, selon les principes du tourisme lent (tourisme lent, en français) ou voyage lent (voyage lent) et pour quelques centaines d’euros par personne.

De leurs côtés, les éditeurs de guide (le Routard, Planète seuleMichelinetc) rivalisent d’idées pour aiguiller vers des destinations de proximité, éthiques, bas carbone ou durables. Et ce d’autant qu’une écrasante majorité de Français, selon les statistiques officielles, ne voyagent pas ou occasionnellement hors des frontières hexagonales. Et si l’on a quand même des envies d’étranger, comment se décider ? «Ça dépend beaucoup de la durée du voyage que l’on souhaite faire, résume Julien Buot, directeur de l’association et du label Agir pour un tourisme responsable. Il faut inviter le voyageur à faire le ratio entre la durée d’un séjour et la distance. Aller au Pérou une semaine n’a pas vraiment de sens alors qu’on peut faire un très beau voyage en France. Et si l’on part loin, il faut peut-être voyager plus longtemps, un mois, deux mois, etc. Mais pas tous les ans. Ce qui est à rebours de la pratique des grands voyageurs aujourd’hui.» L’on peut aussi se fixer comme règle minimale d’éviter à la haute saison les destinations minées par le «surtourisme» en privilégiant à la place des pays, régions ou villes moins visités.

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Privilégier les transports bas carbone

C’est le nouveau mal de l’époque à l’heure de l’urgence climatique, le «flygskam», soit la culpabilité de prendre l’avion pour se déplacer, corollaire de l’écoanxiété. Et pour cause : l’avion est de loin le mode de transport le plus émissif en matière de gaz à effet de serre. Selon l’Ademe, un vol aller-retour Paris-New York équivaut en moyenne à l’objectif d’empreinte carbone d’un Français pour 2050 et un Paris-Bangkok au tiers des émissions annuelles actuelles d’un Français. Sachant que les trois quarts des rejets liés au tourisme en France sont le seul fait des transports. Pour les voyages inférieurs à 1 000 kilomètres de distance, qui ne demandent pas de passer par la case aéroport, il est donc recommandé quand c’est possible de privilégier ou de combiner des transports moins énergivores. Le train évidemment, malgré des tarifs paradoxalement moins avantageux que l’avion ; mais aussi le vélo, dont l’engouement pour voyager en itinérance est encouragé par le développement d’infrastructures adaptées. En revanche, les croisières, très polluantes et symboles du tourisme de masse standardisé, sont, elles, à éviter.

Là encore, pléthores de guides touristiques se sont mis à la page du «voyage bas carbone» en proposant des destinations en train en Europe ou des «itinéraires à vélo» à travers le monde. Dernier recours, quand un long courrier est indispensable pour se déplacer et soulager sa conscience : la controversée compensation carbone, proposée par les compagnies aériennes. Soit le fait de payer un surcoût pour financer un projet de réduction ou de séquestration du CO2. «On essaye de favoriser d’autres moyens de transport que l’avion au départ de la France pour nos offres en Croatie ou en Italie, plaide le PDG du tour-opérateur Terres d’aventures, Lionel Habasque, spécialisé dans l’itinérance pédestre. Mais, pour réduire l’empreinte carbone des voyages vers l’Amérique latine, on développe aussi nos propres initiatives de reforestation dans certains pays, notamment de replantation de mangrove au Sénégal ou en Indonésie. On doit être à 20 000 hectares désormais.» Le bus ou le covoiturage sont également à envisager pour éviter de prendre la voiture sur un trajet motorisé.

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Dormir chez l’habitant ou dans un hôtel labellisé

Les billets (de train donc) en poche, on a pris la fâcheuse habitude de foncer sur Airbnb pour réserver un hébergement plus ou moins luxueux, plus ou moins insolite, bref, à notre goût. Ce n’est pas forcément la plus vertueuse des idées tant la plateforme a favorisé l’essor des locations meublées touristiques dans des villes, de Barcelone à Buenos Aires, où le parc locatif et le marché immobilier étaient déjà en tension aggravant la crise du logement. Le choix de l’hébergement n’est d’ailleurs pas anodin pour l’environnement. Après le transport, c’est en effet en France l’hébergement qui génère le plus d’émissions de gaz à effet de serre (7 % du secteur du tourisme hexagonal), notamment quand il est marchand. Il est néanmoins possible d’aligner ses valeurs avec la quête d’un logement de vacances original, fun, atypique ou confortable. Alternatives intéressantes : l’échange de maisons entre particuliers, dont la plateforme HomeExchange est leader en France, qui favorise le partage – mais encore faut-il y être prêt – ou les séjours à la ferme, qu’il faille ou non participer aux tâches selon les principes du woofing, pour soutenir le monde paysan. Ajoutons également les hôtels, gîtes, maisons d’hôtes, campings, engagés dans une démarche d’écotourisme ou certifiés par un label environnemental français (Clef verte, écogîte, les gîtes panda) ou international (l’écolabel européen, Green Globe, etc). Pour obtenir la certification européenne, «les hébergeurs prennent des mesures écologiques strictes et quantifiées», indique l’Ademe.

Le site voyager-autrement, spécialisé dans le tourisme durable, invite également les voyageurs à utiliser «de façon responsable» un site de réservation comme Booking, en réservant directement auprès du propriétaire le logement trouvé, histoire d’éviter des frais de commission. Lancée en 2021, la plateforme française GreenGo se présente, elle, comme une «alternative responsable à Booking et Airbnb», en proposant 8 000 hébergements écoresponsables à travers l’Hexagone – et bientôt dans le reste de l’Europe. «Nous ne sommes pas ouverts à tout le monde. On sélectionne les hébergements sur des critères écologiques comme la gestion de l’eau et de l’énergie, la proximité d’une gare, l’alimentation proposée, et la qualité du service, précise Mathieu Ravard, son fondateur. La différence avec Airbnb c’est qu’on échange avec les hébergeurs, on vérifie qu’ils ne participent pas à la spéculation locative.» En juin, à l’instar de l’Ademela start-up a également lancé un comparateur de transports pour évaluer les émissions individuelles en fonction du mode de déplacement vers un lieu de séjour. Et enregistre 30 000 nuitées depuis sa création.

Des activités neutres ou «hors des sentiers battus»

Il y a ceux qui, pour leurs vacances, ne ménagent pas leur paresse en bronzant au bout du monde sous un cocotier et d’autres qui considèrent qu’un voyage c’est cocher toutes les cases des trucs à voir et à faire, notamment les sites touristiques surfréquentés. Mais il y a sûrement un juste équilibre à trouver en matière d’activités pour s’évader, s’amuser ou tout simplement découvrir les atouts d’une région. Les guides touristiques sont là encore une mine d’information et proposent de plus en plus de «pas de côté», soit la visite de sites, monuments, ou aires ou curiosités naturelles, comme les grottes, délaissés par les touristes, «hors des sentiers battus».

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Ce que proposent d’ailleurs de plus en plus d’agences de voyages, estampillées durables, solidaires, équitables ou responsables avec plus ou moins de véracité marketing. «On peut faire moins et mieux. Que ce soit en Normandie ou au Laos, on n’est pas obligé de faire les incontournablesinsiste Julien Buot, qui attribue la certification Agir pour un tourisme responsable aux voyagistes. Le tourisme de découverte industrielle se développe beaucoup. C’est par exemple visiter une usine ou un artisan, ce qui permet de visiter des destinations à l’aune de leur patrimoine économique et pas seulement culturel ou naturel.» A privilégier, les loisirs plus neutres en matière environnementale comme la randonnée, le vélo, la voile, la plongée plutôt qu’un tour motorisé en quad, en jet-ski ou en ULM. Exit également, par respect pour les non-humains, les promenades à dos d’éléphant ou toute excursion impliquant des animaux sauvages, parfois présentées à tort comme des «sanctuaires».

Consommer local et responsable

Voyager, c’est aussi voir, écouter, toucher, et surtout goûter ce qu’on n’a pas chez soi. Et pour cela rien de tel que la bouffe. Alors oui, une fois en Argentine, on a le droit de se faire plaisir avec une côte de bœuf – même si la gastronomie rioplatense ne se limite pas à la viande –, mais il est aussi possible et envisageable de se tourner vers les tables engagées dans une démarche écoresponsable. C’est par exemple privilégier les adresses qui se revendiquent du mouvement mondial Nourriture lente (nourriture lente, en français), les restaurants végétariens, véganes ou qui font la part belle aux produits locaux, biologiques et de saison plutôt que les chaînes de fast-food mondialisées. Une ligne de conduite que l’on peut également suivre dans les marchés – qui peuvent être des attrape-touristes ! – et supermarchés. Et il en va des souvenirs : autant ramener de façon raisonnée des produits locaux, issus d’une fabrication vraiment artisanale reconnue, plutôt qu’un des goodies (casquettes, boules à neige, magnets) made in China interchangeables. Et pourquoi pas un bel objet de seconde main.

Cet article est tiré du Libé des solutionsen kiosque du 30 décembre au 1er janvier 2024. Retrouvez tous les articles de ce numéro spécial ici.
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