À quelques jours des élections fédérales, Andreas Glarner, candidat UDC, a suscité de vives réactions en créant une vidéo truquée où l’on voit l’une de ses adversaires appeler à voter pour lui. L’Argovien a été contraint de retirer ce “deepfake” de X suite à une action en justice intentée par la victime.
L’utilisation de l’intelligence artificielle dans les campagnes politiques a franchi un nouveau cap cette semaine. Andreas Glarner, conseiller national UDC du canton d’Argovie, connu pour ses provocations, a publié sur X une vidéo de quinze secondes dans laquelle on croit voir en gros plan le visage de Sibel Arslan, conseillère nationale verte de Bâle-Ville et double ressortissante turco-suisse.
Dans cette vidéo, Sibel Arslan déclare faussement: “Je m’appelle Sibel Arslan des Verts et je veux que tous les criminels turcs soient expulsés. S’il vous plaît, votez pour l’UDC aux élections fédérales et mettez deux fois le nom d’Andreas Glarner sur votre liste.”
En réalité, Sibel Arslan n’a jamais tenu ces propos. La vidéo a été fabriquée par une intelligence artificielle, mais la voix et les mouvements des lèvres sont suffisamment réalistes pour sembler vrais.
Andreas Glarner, qui se représente aux élections fédérales, a finalement été contraint de retirer la vidéo suite à une action en justice de Sibel Arslan. Le Tribunal civil de Bâle-Ville a ordonné des mesures contre ces images, obligeant le conseiller national à supprimer sa publication sur X.
Préalablement contactée par Forum, Sibel Arslan s’était dite scandalisée par cette vidéo. Il est important de noter qu’Andreas Glarner et Sibel Arslan ont un long contentieux entre eux. En 2020, l’élu UDC l’avait publiquement insultée en écorchant son nom. Aujourd’hui, Sibel Arslan laisse entendre que nous entrons dans une toute nouvelle dimension.
Interrogé par Forum avant le retrait de la vidéo, Andreas Glarner ne cachait pas qu’il avait utilisé l’intelligence artificielle. La vidéo portait le titre “Si Sibel Arslan était honnête” et mentionnait en bas à gauche “créé avec l’intelligence artificielle”. Le candidat UDC du canton d’Argovie, qui avait été malheureux dans sa candidature à la présidence du parti en 2020, défendait également sa vidéo comme une manière de mettre “un point final joyeux à la campagne électorale”. Selon lui, elle est peut-être problématique, mais certainement pas malhonnête ou illégale. Il concluait ainsi dans sa réponse écrite: “Ce petit film est clairement identifié comme étant artificiel. Même l’électeur le plus naïf sait que Madame Arslan ne dirait jamais cela de cette manière.”
Dans le contexte actuel, distinguer le vrai du faux est un véritable enjeu et cela devient plus difficile avec l’intelligence artificielle. Les montages photo ne sont pas nouveaux, mais l’IA change la donne. Cet été, la fausse photo du PLR montrant une ambulance bloquée par des militants écologistes avait déjà fait parler d’elle.
Aujourd’hui, plusieurs pas supplémentaires ont été franchis. Il ne s’agit plus seulement d’une image, mais d’une vidéo, et il ne s’agit plus d’un groupe générique, mais d’une personne précise mise en scène.
Cela a amené le président du Centre, Gerhard Pfister, à déclarer qu’Andreas Glarner s’avançait “sur un terrain glissant d’un point de vue politique et juridique”. Les principaux partis ont d’ailleurs réagi en condamnant ces vidéos.
