2024-05-24 21:00:07
Worsqu’on passe des journées entières à aller et venir entre le tapis rouge, les boutiques de luxe, les pavillons de plage et les cinémas en robes de bal et en talons hauts, on peut perdre de vue qu’il existe une réalité en dehors du glamour cannois. Une situation qui n’est pas réjouissante même pour certains candidats à la Palme d’Or. Pour le rappeler, vendredi après-midi, dernier jour officiel du concours, alors que la plupart des festivaliers sont partis depuis longtemps, le drame familial « La Graine de la Figue Sacrée » fait l’effet d’une bombe. C’est une autre chose qui distingue Cannes de la Berlinale : tout n’est pas jeté dès le départ. Cela vaut la peine de rester jusqu’à la fin.
Cependant, le voyage du réalisateur iranien Mohammad Rasoulof n’a pas été de tout repos : il a dû quitter son pays en secret à pied, à travers les montagnes, car il a récemment été condamné à huit ans de prison et de torture par la République islamique d’Iran. Ses biens ont été confisqués et son passeport confisqué. « J’ai dû choisir entre la prison et quitter l’Iran. « C’est le cœur lourd que j’ai choisi l’exil », a-t-il annoncé. Certains acteurs de son film ont pu faire de même, d’autres sont toujours dans le pays, où ils sont soumis à des pressions et à des menaces.
Première sur le tapis rouge à Cannes
Quelle : Getty Images/Victor Boyko
Rasoulof, qui ne se distingue aujourd’hui des autres costumes sur le tapis rouge que par son look sérieux, tient les photos des acteurs Missagh Zareh et Soheila Golestani devant l’appareil photo. Tous deux sont détenus en Iran. Parmi les nombreuses lettres ouvertes qui circulent actuellement, il y en a une qui appelle à mettre fin aux condamnations injustifiées qui font taire les voix critiques et persécutent violemment toute opposition politique. Des stars comme Sandra Hülser l’ont signé.
L’année dernière, Rasoulof n’a pas pu remplir son rôle de membre du jury cannois de la section « Un Certain Regard », où plusieurs de ses propres films ont déjà été projetés. De 2022 à 2023, il a passé des mois en prison et n’a été libéré que prématurément en raison de manifestations et pour des raisons de santé.
Des rumeurs ont couru ces derniers jours quant à savoir si l’évasion de Rasoulof pourrait réduire ses chances de palme. Le jury préférerait-il récompenser un détenu torturé plutôt qu’un évadé réussi ? Mais le caractère absurde de telles considérations apparaît clairement quand on se souvient que même la Berlinale de cette année, connue pour prendre bien plus en compte les préoccupations politiques que le Festival de Cannes, plus esthétique, n’a pas inclus le film romantique « Un petit morceau de l’histoire ». Gâteau »avec un prix. Même s’il s’agissait de l’un des meilleurs films de la compétition, les réalisateurs Maryam Moqadam et Behtash Sanaeeha n’ont pas été autorisés à quitter l’Iran. Mais c’est Rasoulof lui-même qui a remporté l’Ours d’or en 2020 avec son film « Il n’y a pas de mal » sur la peine de mort en Iran.
![Trois contre le père et le mari ?](https://i0.wp.com/img.welt.de/img/kultur/mobile251640644/8372501027-ci102l-w1024/THE-SEED-OF-THE-SACRED-FIG-Directed-by-4.jpg?w=1170&ssl=1)
Nous trois contre le père et l’État ?
Quelle: PHOTOS DE LA PISTE
Les limites nécessaires qu’exige toujours le tournage secret en Iran semblent également bonnes pour « La graine de la figue sacrée », qui se présente d’abord comme une pièce de chambre domestique et finit par se transformer en une course-poursuite sauvage. Rasoulof transfère les conditions répressives en Iran, où l’État réprime violemment les manifestations, dans la vie privée d’une famille conservatrice. Les filles Rezvan (Setareh Maleki) et Sana (Mahsa Rostami) se rebellent à table contre leur père Iman (Missagh Zare), promu juge révolutionnaire à Téhéran et qui signe chaque jour plusieurs centaines d’arrêts d’exécution. La relation des filles avec leur mère Najmeh souffre également de plus en plus car, comme Iman, elle est une croyante stricte et conseille à ses enfants de rester à l’écart des amis révolutionnaires qui, selon elle, veulent juste courir nus dans la rue et se rebeller contre Dieu. .
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Lorsqu’une des bonnes amies de Rezvan reçoit une balle dans le visage dans la rue et qu’elle est ensuite arrêtée, la famille, qui semble en fait plutôt harmonieuse, est confrontée à son premier point de rupture. Cependant, la disparition du pistolet d’Iman peu de temps après provoque un plus grand chaos. Quelqu’un de son appartement a dû les cacher. Était-ce une de ses filles ? Même sa femme ? Ou bien Iman lui-même a-t-il perdu la tête au milieu des manifestations qui l’ont rendu méfiant et paranoïaque ?
Iman justifie ses méthodes pour découvrir la vérité en disant qu’il ne se sent plus en sécurité chez lui car il ne peut plus faire confiance à sa famille. Ce qu’il fait, il le fait pour se protéger, pour protéger sa famille et pour protéger son pays. La pièce de chambre précisément orchestrée, conçue comme une folle recherche de la vérité, n’est pas sans rappeler le drame scolaire d’İlker Çatak « La chambre du professeur », lauréat allemand de l’Oscar de cette année.
Peu après la première cannoise du film d’action romantique “L’Amour Ouf” de Gilles Lellouche, dans lequel plus de coups de feu mortels sont tirés qu’on ne voudrait en voir, Rasoulof adopte heureusement un ton plus détendu et non violent. Malgré son sérieux politique, « La graine du figuier sacré » parvient à transmettre un message de résistance et de soulèvement aussi humoristique qu’espérant.
A la fin, une standing ovation d’une minute et les larmes coulent également dans la Grande Théâtre Lumière. Quelle belle fin de festival qui nous présente une autre digne candidate à la Palme d’Or aux côtés de “Emilia Perez”, “The Substance”, “Anora” et “The Apprentice”. Le film ne se termine pas par de tendres scènes de famille dans l’abri de l’appartement, mais par des images de téléphones portables des manifestations sanglantes et bruyantes dans les rues de Téhéran.
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