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Preuves scientifiques et systèmes de santé

Preuves scientifiques et systèmes de santé

2023-12-10 15:48:57

Benedetto Saraceno

L’Organisation Mondiale de la Santé doit faire face à deux questions fondamentales : d’une part, le soin rigoureux et méticuleux de la fiabilité des instruments réglementaires qu’elle propose et, d’autre part, l’engagement dans leur mise en œuvre au niveau mondial. Ce devoir de leadership est réalisé au moyen de lignes directrices fondées non seulement sur des preuves mais également sur des préoccupations éthiques.

L’autorité de réglementation représente certainement l’une des principales fonctions de l’Organisation mondiale de la santé, sinon la plus importante.. Ce devoir de leadership est réalisé au moyen de lignes directrices fondées non seulement sur des preuves mais également sur des préoccupations éthiques. Les produits « réglementaires » générés par l’OMS sont différents et diversifiés : lignes directrices, normes, classifications, recommandations politiques, procédures d’évaluation, stratégies globales sur des sujets précis ou, encore, recommandations qui engagent moralement les États membres (moralement contraignant) et même, bien que rarement, des dispositions pouvant être juridiquement contraignantes (juridiquement contraignant). Dans le passé, l’OMS a été critiquée pour sa production exagérée de normes et de standards qui ne sont pas toujours rigoureusement fondés sur des preuves. Autrement dit, surtout dans le passé, chaque domaine de l’organisation produisait ses propres instruments de régulation et régnait ainsi une certaine hétérogénéité des méthodes, des plus rigoureuses aux autres moins fiables.

Depuis 2007, l’OMS dispose d’un seul comité centralisé d’examen des lignes directrices fonctionnant selon des critères rigoureux d’évaluation des preuves. Cette décision a réduit la surproduction d’instruments de régulation, dont certains, comme on l’a dit, peu fiables, et n’a autorisé la diffusion mondiale que d’instruments véritablement efficaces. base de preuves. En outre, trop souvent, l’OMS n’a pas pris la peine de documenter et d’évaluer le degré de mise en œuvre des outils réglementaires mis à la disposition de la communauté mondiale de la santé publique. Il suffit de dire que malgré les mises à jour périodiques de l’International Classification des maladies, qui en est désormais à sa onzième version (ICD 11), de nombreux pays utilisent des versions antérieures pour leurs statistiques sanitaires. Dans le cas du chapitre de la CIM consacré à la classification des troubles mentaux et du comportement, de nombreux pays continuent d’utiliser non pas la version antérieure à la CIM 11 mais même la CIM 9. Ou encore, dans de nombreux pays, la communauté scientifique ignore la classification proposée par l’OMS et utilise ses propres outils de classification et de diagnostic (comme c’est le cas du DSM IV, le manuel de diagnostic des troubles mentaux créé et adopté aux États-Unis).

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L’OMS doit donc faire face à deux questions fondamentales : d’une part, le soin rigoureux et méticuleux de la fiabilité des instruments réglementaires qu’elle propose et, d’autre part, l’engagement en faveur de leur mise en œuvre au niveau mondial.

En effet, améliorer la production de preuves a non seulement un impact sur le monde scientifique mais a évidemment aussi un impact potentiel sur les systèmes de santé.. Comme l’ont montré Woods et ses collègues, il est possible de mesurer et de quantifier le bénéfice en termes de santé de la population générale obtenu en produisant des preuves plus nombreuses et de meilleure qualité (1). Ainsi, également pour améliorer la production d’outils réglementaires, l’OMS a créé en 2017 un Division des sciences qui comprend les départements de Assurance qualité – Normes et standardsDe Innovation en santé numérique e di Recherche pour la santé (2). Dans le numéro d’octobre 2023 de Bulletin de l’Organisation Mondiale de la Santél’organe scientifique officiel de l’organisation, a été publié demande de papiers initiative mondiale qui invite les chercheurs, les experts en santé publique, les épidémiologistes et les décideurs politiques à contribuer à la réponse à sept questions (3).

Ce sont des questions courageuses et il faut rendre hommage à l’OMS qui, pour une fois, au lieu de s’appuyer sur sa bureaucratie souvent craintive, formule des questions fondamentales et utiles pour un débat transparent et démocratique.

  • Dans quels pays le leadership de l’OMS en matière de réglementation a-t-il été couronné de succès ?
  • Dans quels domaines disciplinaires le leadership de l’OMS en matière de réglementation a-t-il eu un impact sur la santé mondiale ?
  • Pourquoi le leadership de l’OMS en matière de réglementation a-t-il réussi, alors qu’il a réellement réussi ?
  • Là où le leadership réglementaire de l’OMS a eu peu d’impact
  • Quelles leçons tirer de ces échecs
  • Quel sera l’avenir du leadership réglementaire de l’OMS en matière de nouvelles technologies numériques et d’intelligence artificielle
  • Quels aspects structurels et organisationnels de l’OMS devraient être modifiés ou renforcés
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Cette invitation à la communauté internationale n’est certainement pas rituelle mais cela reflète une volonté réelle de l’OMS de renforcer sa capacité de régulation tant en termes de formulation que de mise en œuvre. L’OMS mérite donc certainement des éloges pour cette initiative. Cependant, des problèmes restent ouverts et méritent d’être interrogés davantage par la communauté de la santé mondiale, car ils sont fondamentaux pour générer de l’innovation dans le domaine de la production et de l’application des données probantes.

Il existe en effet trois questions d’ordre technique, éthique et politique qui méritent un large débat international.

  • Quelles innovations méthodologiques sont nécessaires pour générer des preuves relatives aux interventions et stratégies caractérisées par une forte composante sociale et une plus petite composante biomédicale? En d’autres termes, dans la mesure où les soins de santé se développent au-delà du modèle biomédical traditionnel et introduisent des stratégies et des interventions « douces », qui nécessitent des évaluations qualitatives, souvent sur une longue période, les outils traditionnels utilisés pour générer des données probantes (par ex. Essais cliniques randomisés et méta-analyses connexes) peuvent être inadéquates. En outre, selon Valente (4), il y aurait trop de cas dans lesquels même les pratiques acquises et acceptées ne sont pas étayées par des preuves solides et l’obtention de telles preuves pourrait être éthiquement discutable et excessivement coûteuse. Enfin, la médecine familiale documente parfois des cas d’améliorations significatives de la santé des patients grâce à des interventions qui ne sont pas nécessairement fondées sur des données probantes (4).
  • Quelles méthodes et méthodes sont nécessaires pour introduire le point de vue des personnes ayant vécu la maladie de manière significative et radicale? En d’autres termes, il ne s’agit pas seulement d’augmenter la présence des points de vue des gens (vue du patient) mais surtout de revisiter les méthodologies utilisées pour construire les protocoles et formuler questions de recherche, identifier les indicateurs de résultats. Un domaine vaste et encore trop inexploré. La médecine factuelle est restée trop silencieuse sur le défi consistant à intégrer les préférences et les valeurs exprimées par les patients dans une méthodologie de génération de preuves. Selon Upshur et Tracy (5), une sorte de contraste dangereux a été créé entre la médecine centrée sur la personne et la médecine fondée sur les preuves.
  • Enfin, quelles mesures correctives peuvent être prises pour éviter qu’une « sélection politique » des preuves ne se produise? En d’autres termes, étant donné que la mise en œuvre des données probantes est souvent, sinon toujours, mise en œuvre par les autorités sanitaires et les décideurs politiques, il existe un risque constant et fréquent d’intervention politique qui sélectionne les preuves bienvenues et fait taire les preuves les moins bienvenues ou les plus indésirables.
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Benedetto Saraceno, Institut de Lisbonne pour la santé mentale mondiale

BIBLIOGRAPHIE

  1. Woods B, Rothery C, Anderson SJ et coll. Évaluation de la valeur des activités de génération de preuves : une étude de modélisation du VIH. (2018). BMJ Global Santé. 3 : e000488. est ce que je:10.1136/bmjgh-2017-000488
  2. Division des sciences. (2023). Exploiter le pouvoir de la science pour parvenir à la santé pour tous. Genève. Organisation Mondiale de la Santé. https://www.who.int/our-work/science-division
  3. Askie LM, Thomas R.AL, Kim RH, Sheikh M, Farrar J. (2023). Établir l’impact des fonctions normatives et normatives de l’OMS : un appel à communications . Organe mondial de la santé Bull. 1er octobre ; 101(10) : 618-618A. Publié en ligne le 1er octobre 2023. doi : 10.2471/BLT.23.29082.
  4. Upshur RE. (2006). Le complexe, l’épuisement et le personnel : réflexions sur les relations entre médecine factuelle et casuistique. J Eval Clin Pratique. 12(3):281-8.
  5. Valente D. (2022). Lettre à l’éditeur. L’illusion d’une médecine fondée sur des preuves.BMJ. 376 : 0702.
  6. Upshur RE, Tracy CS. La médecine factuelle est-elle surfaite en médecine familiale ? Oui. (2013). Can Famille Médecin. Novembre ;59(11):1160-1. PMID : 24235185; PMCID : PMC3828088.



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