Nouvelles Du Monde

Pourquoi c’est important. La police judiciaire ne veut pas de la réforme Darmanin

Pourquoi c’est important. La police judiciaire ne veut pas de la réforme Darmanin

La colère, qui monte depuis plus d’un mois, va se montrer ce lundi au grand jour. Plus d’une trentaine de rassemblements de soutien à la police judiciaire sont annoncés, entre 12 h et 14 h, devant les hôtels de police et tribunaux judiciaires de toute la France. De Bastia à Nancy, de Dijon à Toulouse, les enquêteurs de la PJ veulent montrer leur ferme opposition au projet de restructuration qui leur est imposé par le ministre de l’Intérieur.

Estimant que « notre police est depuis longtemps mal organisée », Gérald Darmanin a décidé d’unifier, au niveau départemental, le commandement des services de police (renseignement, sécurité publique, police aux frontières et donc police judiciaire), à l’image de l’organisation de la gendarmerie. « Il faut arrêter de travailler en silo », résume le ministre, qui veut placer tous ces agents sous la même autorité : celle d’un directeur départemental de la police nationale (DDPN) répondant lui-même au préfet, représentant local de l’État, pour mettre en place une stratégie globale.

Vers une perte d’indépendance pour la PJ ?

« Un territoire, un chef », martèle Gérald Darmanin, qui veut mettre fin à une « perte d’efficacité », citant le chiffre d’un taux d’élucidation pour la PJ passé « de 58 % à 53 % ». « La criminalité évolue, fait-il valoir. Nous avons besoin de terrain sur les points de deal qui ne sont pas de la petite délinquance quand ils sont liés à un dealer qui peut se trouver à Dubaï. »

Lire aussi  La police recherche un suspect dans le vol d'une entreprise dans l'ouest de la vallée de Las Vegas

Dans les rangs de la PJ, les enquêteurs redoutent de perdre leur spécialisation mais aussi l’indépendance dont ils bénéficient vis-à-vis des élus locaux, notamment sur les affaires politico-financières. La grogne est telle qu’une association, l’ANPJ (Association nationale de la police judiciaire), a vu le jour au cœur de l’été. Début octobre, elle a exprimé « son indignation et sa consternation » après l’éviction d’Eric Arella, patron de la PJ de Marseille où le directeur national de la police, Frédéric Veaux, venait d’être accueilli par une « haie de déshonneur ».

Soutien des magistrats et procureurs

« La PJ et la sécurité publique sont deux polices complémentaires. On ne peut pas en sacrifier une au profit de l’autre, estime la porte-parole de l’ANPJ, Stéphanie Duchâtel, qui revendique un taux d’élucidation de 90 % pour la PJ. La grande criminalité que l’on traite n’est pas visible pour le citoyen, mais elle ruisselle négativement sur la société. »

La PJ a reçu le soutien, de poids, de tout ce que les magistrats comptent d’institutions représentatives. L’association des magistrats instructeurs a signé un communiqué avec les syndicats généralistes de la corporation (Union syndicale des magistrats et Syndicat de la magistrature) pour dénoncer un projet « de nature à porter gravement atteinte à l’efficacité des enquêtes ». Ceux des Jirs (Juridictions interrégionales spécialisées, qui jugent notamment les importants réseaux de criminalité organisée) ont fait part de leur « vive inquiétude » et la Conférence des procureurs de sa « plus grande préoccupation ».

Lire aussi  La Californie met fin à son contrat avec Walgreens concernant sa décision sur la pilule abortive

Même la cheffe du parquet de Paris, Laure Beccuau, y est allée de son communiqué soulignant le rôle de la police judiciaire dans « la lutte contre la grande criminalité organisée ».

« À quoi bon réformer si rien ne change ? »

« J’entends les demandes d’explication mais on fera cette réforme », affirmait Gérald Darmanin début septembre. Depuis, le ministre de l’Intérieur tente de calmer le jeu. Initialement annoncée pour le 1er janvier, la finalisation de la réforme est maintenant prévue « au deuxième semestre 2023, pas avant », a-t-il écrit dans un courrier adressé le 9 octobre à tous les personnels de la Direction centrale de la PJ (DCPJ). « Nous discuterons avec vos organisations syndicales pour amender », fait également valoir le ministre, alors qu’une « mission d’audit » est actuellement en cours. Mais le retrait pur et simple du texte n’est pas à l’ordre du jour.

Gérald Darmanin rappelle que cette réforme est évoquée depuis « plus de 30  ans » par ses prédécesseurs et qu’elle figure en toutes lettres dans le Livre blanc de la sécurité intérieure, qui date de novembre 2020. « Quant aux moyens dédiés au traitement de la grande criminalité, ils seront augmentés », promet le ministre en avançant le chiffre de « 23 000 personnels » à venir dans la filière PJ, là où ils sont actuellement 5 600 au sein de la DCPJ.

Lire aussi  Obtenir les vaccins du régime obligatoire est un pèlerinage pour les familles - El Sol de Tijuana

« Aucun policier de PJ ne fera autre chose que ce qu’il fait aujourd’hui », assure-t-il encore « Mais alors, à quoi bon réformer si rien ne change ? », a répliqué l’ANPJ, qui reconnaît que le débat est aussi symbolique : « La disparition de la PJ serait un symbole très mal vécu par notre institution et, bien au-delà, par tous nos concitoyens qui y sont très attachés », pense-t-elle. Le bras de fer est lancé.

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

Leave a Comment

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

ADVERTISEMENT