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Plus de 1 000 enfants placés en Charente : l’inquiétante explosion

Plus de 1 000 enfants placés en Charente : l’inquiétante explosion

P.réoccupant. Les mineurs placés par l’ASE, l’aide sociale à l’enfance, n’ont jamais été si nombreux en Charente. « Ils sont 950 auxquels il convient d’ajouter 100 à 120 mineurs isolés »souligne Maryline Vinet, chargée de l’enfance et des familles au Conseil départemental. Lors de sa dernière session, le Département avait confirmé les inquiétudes : « La protection de l’enfance connaît aujourd’hui plusieurs évolutions et difficultés. Le Département constate ainsi une activité en forte augmentation pour les mesures éducatives à domicile comme pour les placements, mettant en grande tension l’offre d’accueil existante. »

Ce secteur souffre. Partout en France. Il…

P.réoccupant. Les mineurs placés par l’ASE, l’aide sociale à l’enfance, n’ont jamais été si nombreux en Charente. « Ils sont 950 auxquels il convient d’ajouter 100 à 120 mineurs isolés »souligne Maryline Vinet, chargée de l’enfance et des familles au Conseil départemental. Lors de sa dernière session, le Département avait confirmé les inquiétudes : « La protection de l’enfance connaît aujourd’hui plusieurs évolutions et difficultés. Le Département constate ainsi une activité en forte augmentation pour les mesures éducatives à domicile comme pour les placements, mettant en grande tension l’offre d’accueil existante. »

Ce secteur souffre. Partout en France. Il n’y a pas un département qui n’est pas touché.

« C’est une problématique nationale, pas seulement en Charente »nuance Maryline Vinet. « Quand je rencontre les homologues d’autres départements, je relativise. » Mais le département est passé de 872 mineurs placés en 2016 à 1 118 en 2022 et de 535 actions éducatives en milieu ouvert (AEMO) en 2016 à 807 en 2022. Le Département fait également face à une complexification des situations des enfants et jeunes accompagnés. Les conséquences sur la protection de l’enfance et la multiplication des problématiques structurelles relevant du secteur sanitaire (handicap, pédopsychiatrie) s’accentuent, dit le rapport. S’y ajoute la difficulté de recrutement de personnel. Le secteur est particulièrement sensible (lire ci-dessous).

Une situation née du Covid

Jean-Marc Thomas, représentant CFDT du personnel au Département, confirme : « Ce secteur souffre. Partout en France. Il n’y a pas un département qui n’est pas touché. Nationalement, on estime à 30 % le nombre d’enfants sous la responsabilité de l’ASE qui ont un besoin en pédopsychiatrie. Or, en France, la psychiatrie est elle-même en très très grande difficulté. Ça ne fait qu’accentuer les problèmes. »

« C’est une situation qui est née du covid, explique Maryline Vinet. On a vu poindre un nombre d’enfants qui allaient mal, de familles qui allaient de plus en plus mal. Les confinements ont soit créé des violences soit révélé des situations. »

Et trois ans après, les difficultés persistent. « On a assisté à une précarisation, une paupérisation des familles »relève l’élue.

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Comme un puits sans fond. En 2022, la Département a créé 53 places d’accueil, 66 en 2023, à domicile, en milieu ouvert, en lieux de vie, d’autres pour les mineurs non accompagnés, pour un engagement financier de 2,5 millions d’euros. En 2024, 62 places devraient encore être créées, en urgence, en unité de vie, en milieu ouvert « renforcé ». Estimation : 2,6 millions d’euros. Aujourd’hui, « toutes les ordonnances de placement provisoires »celles qui relèvent du juge, sont exécutées. Pour le reste, « on a des placements en attente ».

Un relais d’aide à la parentalité

Comment faire face ? « Nous avons un rôle à jouer sur la prévention », répond Maryline Vinet, en brandissant le nouveau schéma départemental de prévention et de protection de l’enfance né de la consultation de professionnels de la petite enfance et même de 78 enfants qui ont livré leur vision de la chose… Au-delà de la revalorisation des métiers de la petite enfance, de la création de places, « on est beaucoup sur la prévention sur l’accompagnement. C’est ce qui sauvera des familles ». L’élue évoque notamment la création d’un relais « d’aide à la parentalité », qui offrira la possibilité à des parents confrontés à des difficultés de confier leur enfant pour deux ou trois semaines. « À cause d’une maladie. Pour une maman solo qui pète les plombs. »

Un appel à projet a été lancé par le Département. Il devra se concrétiser sur l’agglomération d’Angoulême, mais le relais sera destiné à prendre en charge les ados de tout le département. Pour permettre aux familles de souffler. Et accompagner les enfants et les jeunes vers l’autonomie. C’est l’objectif N° 5 du schéma.

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Marthon : des ados dénoncent leurs conditions de vie au foyer du Grand-Breuilh

« Au début, ça se passait bien. » C’était en décembre 2020, quand Cotton a quitté le foyer de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) Leclerc-Chauvin, à Angoulême pour entrer au Grand-Breuilh, à Marthon. Un « lieu de vie et d’accueil », pour des gamins placés par le juge des enfants, suivis par la PJJ, protection judiciaire de la jeunesse. Cotton avait eu des problèmes de comportement, la justice a été saisie.
« Le 13 septembre dernier, la juge des enfants a ordonné qu’il soit changé de lieu de vie, a renouvelé son placement jusqu’au 2 juillet 2025, le jour de sa majorité. Le 27 octobre, Cotton, aujourd’hui âgé de 16 ans et demi, a fugué. Depuis, il est chez moi à Châteauneuf, tout le monde est au courant. Personne ne fait rien. Et je m’attends à ce qu’on vienne me l’enlever à tout moment », s’emporte Sonia Garcia, la maman de l’adolescent.
Cotton a prévenu. « Je ne reviendrai pas ici. » À cause « de tout ce qui s’est passé ». Du « harcèlement » que dénonce sa maman, des menaces que l’ado rapporte, de la pression psychologique qu’exerceraient le directeur et certains éducateurs. Et puis il y a eu ce jour où l’ado raconte qu’un éducateur l’a sévèrement balancé à travers une pièce. Une plainte de sa mère, contre l’établissement, a été classée sans suite. Un autre, contre l’éducateur en question, fait l’objet d’une enquête.
« Maltraitance », dit la maman, qui est en conflit avec l’institution. « Elle n’a pas accepté le placement de son enfant », traduit Maryline Vinet, l’élue chargée de la question au Département, qui dit ne pas avoir eu connaissance d’autres témoignages. « Mais je ne suis pas informée des cas particuliers. »
D’autres ados confirment pourtant les conditions de vie « un peu brutales », comme le dit aussi une ancienne salariée du Grand-Breuilh. Marie-Hélène Teixeira, de Gond-Pontouvre, ira aujourd’hui au commissariat d’Angoulême confirmer la plainte qu’elle a déposée en ligne. « Pour maltraitance. Mon fil Matthew en a été victime en février. » Elle avait saisi elle-même l’ASE parce qu’elle ne gérait plus la situation. « J’ai mis le pied dans la machine. Mon fils me racontait le foyer, qu’il avait été étranglé parce qu’il avait été insolent. On me disait qu’il extrapolait. Je faisais confiance aux référents. Aujourd’hui, le regrette ne pas l’avoir cru. Je m’en veux de ne pas l’avoir protégé. »
Matthew a quitté le foyer. Comme Bryan, placé à l’âge de trois ans au Foyer de l’enfance, au Grand-Breuilh depuis quatre ans. « J’en ai eu marre. J’ai fugué. » Il se moque des conséquences. Il aura « 18 ans dans deux mois » et le vit comme une libération. Parce qu’il a dit à un éducateur qu’il aimerait bien « travailler comme lui pour faire la sieste, il a vidé mon studio, m’a plaqué contre le mur. Il a fallu que je le pousse pour me dégager. J’ai tout cassé ». Aujourd’hui chez sa grand-mère, il poursuit ses cours à l’ITEP de Tous-Vents à Angoulême, comme Cotton.
Les ados parlent aussi des mômes qui se prennent des claques sans raison, au réfectoire, et qui n’osent rien dire, « des affaires qui ont été cassées ». Il en a laissé sur place. Cotton, lui, se souvient d’avoir pleuré trois jours à cause d’un tympan perforé, d’un genou sur l’oreille. « Ils nous ont dit que c’était la piscine », s’emporte sa mère.
Au Département, la situation de Cotton est suivie, « mais les plaintes ne sont pas remontées jusqu’à nous », indique Maryline Vinet. Une ancienne salariée parle, elle, davantage de « maltraitance psychologique, de pressions », dans ce « lieu de vie » qui accueille une dizaine d’ados.
Au Grand-Breuilh, un « permanent du lieu de vie”, qui ne souhaite pas être cité, s’insurge et affirme qu’aucun gamin n’aurait à se plaindre de son accueil. Christian Sauts, que les ados appellent « le chef », président de l’association qui gère le lieu et serait très affecté par les plaintes des familles, n’a pas donné suite à notre demande d’entretien.

2023-11-16 21:54:19
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