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« Mutilations dentaires » : le dentiste marseillais fixé sur son sort ce jeudi

« Mutilations dentaires » : le dentiste marseillais fixé sur son sort ce jeudi

Le nombre a de quoi faire frémir. Selon la procureure Marion Chabot, le dentiste Lionel Guedj aurait dévitalisé pas moins de 3 900 dents sur 327 patients pour y poser de larges bridges, alors que beaucoup de ces dents étaient saines.

On n’a jamais vu ça ! » , s’était emportée la magistrate lors de l’audience, à Marseille, qui s’était déroulée du 28 février au début du mois d’avril. Plus d’une centaine de plaignants étaient alors venus à la barre raconter le calvaire qu’ils avaient vécu durant des années : des abcès, des infections, des maux de tête… Une femme qui s’était présentée au cabinet du dentiste en toute confiance – le praticien étant une connaissance de son mari – pour une simple couronne, s’était laissé convaincre pour que Lionel Guedj lui refasse un sourire de rêve. Il m’avait dit que tout allait se déchausserqu’il fallait tout remettre à niveau » . Mais après que le dentiste avait dévitalisé toutes ses dents, au cours d’une vingtaine de séances, les souffrances de la patiente étaient devenues insupportables et handicapantes : Je ne pouvais même plus mastiquer. J’ai dû me nourrir de liquide et de semi-liquide durant des années » , a-t-elle témoigné dans Le Parisien.

« 41 heures par jour »

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De 2006 à 2012, le dentiste qui avait ouvert son cabinet dans les quartiers nord de Marseille en 2005, a ainsi multiplié les interventions. Et commis des mutilations sur plus de 350 patients… à un rythme soutenu. Lors de l’audience, la médecin-conseil de la CPAM des Bouches-du-Rhône avait ainsi indiqué qu’en 2009, le nombre d’actes facturés représentait quarante et une heures par jour et même l’équivalent de cinquante-deux heures par jour, durant les premiers mois de 2010. Le fils était aidé en cela par son père, lui aussi dentiste, qui effectuait deux vacations hebdomadaires au cabinet de son fils.

Mais même avec cette aide et même avec un rythme de travail intensif, c’était irréaliste […] La fraude à grande échelle provenait non pas de l’absence de réalisations d’actes non facturés, mais de l’absence de leur justification médicale » , avaient, par ailleurs, noté les inspecteurs, en 2011. L’ancienne assistante du dentiste a ainsi confirmé que des radios falsifiées étaient régulièrement envoyées au service du contrôle médical et que les clichés pris avant travaux, étaient rapidement détruits.

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Résultat : Lionel Guedj fut, en 2010, le dentiste le mieux payé de France avec 2,9 millions d’euros d’honoraires, là où la moyenne départementale était de 180 000 €. Selon les enquêteurs, en quelques années, le patrimoine du fils et du père aurait ainsi atteint 13 millions d’euros : voitures de luxe, œuvres d’art et une douzaine d’appartements.

Un préjudice conséquent

Parallèlement, la CPAM des Bouches-du-Rhône a, elle, estimé son préjudice (pour avoir remboursé des actes qui n’étaient pas justifiés médicalement), à près de 1,5 million d’euros. Lors de l’audience, l’avocat de la caisse primaire, Me Gilles Martha, a déposé une réclamation afin que celle-ci soit indemnisée. Mais il ne s’agit que d’un montant provisoire. Il faudra ensuite chiffrer les travaux dentaires de reprise qu’ont également dû effectuer les victimes. Au final, le préjudice global pour la CPAM devrait être beaucoup plus élevé » , note Me Marthe.

Au procès, la procureure avait requis dix ans de prison et 375 000 € d’amende à l’encontre de Lionel Guedj (radié en 2016) et cinq ans de prison (dont un an avec sursis probatoire) et une amende de 150 000 € contre son père, Jean-Claude Guedj. Et contre ces deux prévenus, qui ont comparu libres à l’audience, elle a demandé que le tribunal prononce un mandat de dépôt au moment de sa décision qui doit intervenir ce jeudi.

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Lors de l’audience, Lionel Guedj avait fini par lâcher : Je suis mort de honte, je suis profondément touché par les souffrances morales et physiques que j’ai pu imposer à mes patients. Ses avocats, Me Monneret et Santana-Marc, avaient eux plaidé pour des erreurs involontaires, davantage que volontaires. Quant aux documents falsifiés, il concerne dix-sept radios sur 32 000 clichés réalisés…

Décision du tribunal ce jeudi.

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