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Le souvenir le plus émouvant du SIDA : “Beaucoup de médecins disaient : je ne travaille pas pour des pédés et des drogués.”

Le souvenir le plus émouvant du SIDA : “Beaucoup de médecins disaient : je ne travaille pas pour des pédés et des drogués.”

2023-12-14 23:38:19

Mis à jour

Anthony Passeron raconte dans l’émouvant “Les Fils Perdus” l’histoire des premiers malades de l’épidémie à travers la mémoire de son oncle

Daniel Meyers, malade du SIDA, aidé par sa mère à Seattle, en 1993.Bromberger AspirateurGetty

Traduit en quinze langues, multi-primé et en passe d’être adapté dans l’incontournable série pour plateformes, Les enfants endormispremier roman de Anthony Passeron (Niza, 1983), qui publie Libros del Asteroide en Espagne, est un phénomène éditorial. La clé du succès réside dans la combinaison synthétique, par chapitres alternés, de souvenirs familiaux chargés d’émotion (ils pleurent) avec la chronique du combat des chercheurs contre la maladie, qui se lit comme un livre au rythme effréné. thriller scientifique

La partie familiale commence lorsque Dsir, l’oncle de l’écrivain, contracte le VIH (Virus de l’Immunodéficience Humaine). à cause de sa dépendance à l’héroïne au début des années 80, alors que l’on ne savait encore rien de la maladie. En parallèle, nous avons découvert, étape par étape, qui étaient les scientifiques qui luttaient contre le Sida, face aux préjugés de l’époque, où la peste était minimisée en ciblant soi-disant uniquement les héroïnomanes et les homosexuels. “Beaucoup de médecins disaient : ‘Je ne travaille pas pour des pédés et des drogués’, en contradiction flagrante avec le serment d’Hippocrate. Et puis il y avait des positions dans ce sens de la part de politiciens comme Jean-Marie Le Pen ou Pape Jean-Paul IIqui n’approuvait pas l’utilisation du préservatif…”, se souvient Passeron lors d’une conversation avec ce journal.

Même si l’origine de l’épidémie, qui a déjà fait 40 millions de morts dans le monde, se situe en Afrique subsaharienne, dans les années 1920, les premiers signaux d’alarme retentissent le 5 juin 1981, lorsque Willy Rozenbaum, directeur de l’unité des maladies infectieuses de l’hôpital Claude-Bernard à Paris, droit dans un bulletin américain sur une pneumopathie rare détectée chez cinq hommes et je l’ai comparé à un cas que je connaissais. Il est intéressant de noter que les six hommes étaient homosexuels.

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Au début, le syndrome semblait si spécifique que ses premières victimes potentielles, gays et toxicomanes, étaient dédaigneuses de la nouvelle : « Un ami de mon oncle qui prenait de la drogue avec lui m’a dit qu’ils croyaient qu’il s’agissait d’une légende urbaine répandue pour qu’ils Arrêtez de vous piquer. Et pareil avec les homosexuels : “C’est pour que nous puissions retourner au placard”, se disaient-ils. “C’était une époque où ils commençaient enfin à vivre sans avoir à se cacher et cela a ralenti leur prise de conscience de l’ampleur du VIH.”

Le déni sous toutes ses formes est l’un des nombreux thèmes qui ressortent de cette lecture passionnante : il n’y a pas que le “Le châtiment de Dieu” destiné à une tranche supposée marginale de la population, un stéréotype qui perdure malgré les preuves scientifiques : “Aujourd’hui, la majorité des infections surviennent chez les femmes hétérosexuelles entre 40 et 60 ans”. Les familles des victimes ont également nié la réalité, car elles ne voulaient pas accepter le diagnostic, à la fois en raison de son caractère mortel et de la stigmatisation sociale.

Dans le cas des Passerons, dans une petite ville, la peur du discours des gens était un fardeau. L’écrivain a donc dû injecter un peu de fiction dans son hybride de thriller essai et chronique familiale : « Ce n’est que parce que ma famille ne voulait pas parler du sujet que j’ai reconstitué l’histoire de Dsir utiliser d’autres témoignages dans des situations très similaires“.

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La concision de ces un peu plus de 200 pages racontées avec une clarté accablante (même pour ceux qui ont échoué en science) qui rappelle les fictions autobiographiques d’Annie Ernauxune influence avouée : « Au-delà de la précision, parce que, dans chaque roman, elle se concentrait sur un sujet particulier, comme l’avortement ou la violence domestique, elle m’a influencé parce qu’elle était une écrivaine capable de convaincre le lecteur qu’il avait aussi une histoire à raconter. dire”.

Dans le cas d Les enfants endormis que Passeron a éveillé pour nous tous, ce témoignage est rigoureusement réel : toutes les familles ont des secrets, histoires réduites au silence, des proches qui ne savent pas très bien de quoi ils sont morts car on ne pouvait pas le dire. Grâce à ce roman passionnant, tout s’arrange.

En son temps, la composante émotionnelle touchait aussi les scientifiques qui menaient la recherche envers et contre tout, même en se battant entre eux, car ils ne s’étaient jamais sentis aussi proches de leurs patients, qu’ils utilisaient comme cobayes dans des expériences successives qui se soldaient par la mort. des échecs frustrants. dans cette thriller scientifique, il y a de tout : des combats d’ego et des sous-intrigues économiques et politiques.

Les gouvernements américain et français ont lancé la campagne alors qu’ils n’avaient pas encore trouvé de remède : “Pour les gouvernements, la priorité était de démontrer qui était le plus fort, la question médicale passait au second plan. C’était presque une plaisanterie.” En France, un médicament qui n’était en test que depuis deux semaines était annoncé comme une panacée… Et c’est quelque chose qu’ils voulaient oublier. Les médecins, américains et français, qui se vantaient d’avoir trouvé le remède avant l’heure, ont gardé leur prestige intact.“.

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La guerre froide a été clairement déterminante : « Même si ce sont les médecins français qui ont découvert le virus, puisqu’ils ont eu l’idée de le rechercher dans les ganglions lymphatiques pendant que les Américains continuaient à chercher dans le sang, il y a eu un accord entre Reagan et Chirac pour dire qu’il s’agissait d’une découverte commune. C’est pour cela que des tests de détection de maladies comme l’ELISA ont été brevetés de sorte que les bénéfices étaient de 50% pour leurs laboratoires respectifs. L’économie a également touché les patients car en France, la sécurité sociale a pris en charge les traitements tandis que aux Etats-Unis, ils étaient beaucoup moins protégés en ce sens… De nos jours, En Afrique, les gens continuent de mourir parce qu’il n’y a pas assez de moyens pour payer les traitements. “La médecine et l’économie n’ont jamais fait bon ménage.”

“Au moins, les travaux se poursuivent pour améliorer les traitements”, conclut Passeron : “Même si le vaccin reste une chimèreparce que c’est un virus extrêmement complexe, en 25 ans on est passé de 30 comprimés par jour à un ou plusieurs une injection tous les deux mois. D’un traitement qui, à l’époque, était presque insoutenable, surtout pour les personnes déjà très détériorées, à quelque chose de beaucoup plus supportable. C’est la dimension scientifique qui a permis à mon roman familial de ne pas être si triste. C’était une façon de lui donner une fin heureuse. À partir de janvier 1996, après avoir atteint le pic de la peste [5.000 muertos en Espaa slo en 1995]”Et en seulement trois mois, les médecins sont passés du traitement palliatif à la guérison d’une maladie chronique.”



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