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Le Dry January: boire moins pour des bienfaits temporaires

Le Dry January: boire moins pour des bienfaits temporaires
Muhammad Aqib / Getty Images
« Faire une pause pendant un mois si possible, ça a des bénéfices immédiats pour la santé qui n’existent pas si on continue à boire, même à une dose inférieure » explique le Dr Basset

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« Faire une pause pendant un mois si possible, ça a des bénéfices immédiats pour la santé qui n’existent pas si on continue à boire, même à une dose inférieure » explique le Dr Basset

ALCOOL – C’est doucement en train de devenir un rituel. Depuis 2018 en France, le mois de janvier est celui du Dry January, ou « défi de janvier : un mois sans alcool, avec pour objectif d’encourager à faire une pause et reprendre le contrôle de sa consommation. Une opération qui rencontre un public un peu plus large chaque année. En 2023, un tiers des Français envisageait de participer au Dry January dont 50 % des 18-35 ans, selon l’IFOP.

Cette popularité grandissante s’accompagne de variantes : Veganuary, qui encourage à passer un mois sans manger de produits issus des animaux par exemple, ou encore « Janvier humide ». Ce « janvier humide » est proposé comme une alternative à la sobriété complète : il consiste à boire de l’alcool moins souvent, ou en moins grande quantité pendant 31 jours.

Une recommandation qui aurait plus d’utilité pour les producteurs d’alcool que pour la santé des usagers selon Bernard Basset et Amine Benyamina, médecins et addictologues interrogés par Le HuffPost.

« Damp January est soutenu par le lobby de l’alcool »

En France, où les boissons alcoolisées font partie intégrante de la vie sociale (22 % de la population déclare d’ailleurs boire trop souvent pour sa santé), le défi de janvier peut soulever quelques résistances. Les campagnes pour le mois sans alcool ne sont d’ailleurs jamais portées par des institutions gouvernementales, malgré les demandes de soutien des associations et des professionnels de santé. Comme le révélait une enquête de Ouest-France début 2023, certaines campagnes institutionnelles auraient même été annulées sous l’impulsion de la filière viticole française.

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Alors, pour les producteurs de spiritueux, le « Damp January » sonne comme une aubaine. « Ce n’est pas pour rien que “Damp January” est soutenu par des producteurs d’alcool, soutient Bernard Basset, médecin et président de l’association Addictions France, investie dans les campagnes pour le dry January. Le discours, c’est “buvez moins en janvier”. Mais boire moins, dans un pays où on boit beaucoup, ça devrait être un objectif permanent, pas un mois dans l’année ».

Même son de cloche pour le professeur Amine Benyamina, président de la fédération française d’addictologie, qui abonde : « Le “Damp January”, c’est le cheval de Troie de l’industrie de l’alcool. En tout cas, on y retrouve ses éléments de langage : conseiller la consommation modérée plutôt que l’arrêt, la mise en avant de la responsabilité individuelle plutôt que collective. »

Pour les deux experts, c’est un contrefeu au Dry January, et plus largement au mouvement qui invite à ne plus banaliser la consommation d’alcool. Car si, pour les producteurs, l’impact d’un mois de sobriété sur le plan économique n’est pas nécessairement considérable, le défi de janvier a aussi pour but de rappeler que « l’alcool n’est pas automatique en toute occasion chaleureuse, qu’elle soit amicale, festive ou amoureuse », rappelle le Dr Basset.

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Il est secondé par le Pr Benyamina, qui précise : « Le défi de janvier sert à rappeler que c’est utile de reprendre sa liberté vis-à-vis d’une consommation souvent irréfléchie. On veut encourager la prise de conscience sur le fait que l’alcool n’est pas un produit banal. Cela nécessite d’encourager à faire une pause. »

Des bénéfices moindres pour la santé

Quant aux bénéfices pour la santé du « Damp January », les addictologues rappellent qu’ils sont bien moindres que ceux du Dry January. « Faire une pause pendant un mois si possible, ça a des bénéfices immédiats pour la santé et le rapport à sa consommation d’alcool qui n’existent pas si on continue à boire, même à une dose inférieure » explique le Dr Basset.

Pire, inviter à consommer avec modération pendant le mois de janvier seulement pourrait être contre-productif. « Évidemment moins on consomme, moins on a de risques, souligne Amine Benyamina. Mais si, comme pendant le “Damp January”, on vous invite seulement à respecter les repères de consommation de l’Inserm (pas plus de 10 verres d’alcool par semaine, pas plus de 2 verres par jour, et ne pas boire d’alcool au moins deux jours par semaine, ndlr), ça sous-entend que le reste de l’année, vous êtes – ou pouvez être – un consommateur excessif. »

Une manière de faire qui ne va pas dans le sens du défi de janvier, selon le président de la fédération française d’addictologie, qui ajoute : « Les associations investies dans la campagne du dry January encouragent à faire l’inverse : on encourage à rester dans les repères de l’Inserm toute l’année, et au mois de janvier, à faire un effort collectif. »

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