L’histoire jusqu’ici
1998
L’accord du Vendredi Saint met fin à 30 ans de guerre civile en Irlande du Nord.
1999
Création de la nouvelle assemblée nord-irlandaise avec rapatriement de certains pouvoirs
2000
Première suspension de l’assemblée nord-irlandaise. D’autres suivront : entre 2002 et 2007, entre 2017 et 2020, et depuis 2022.
2022
Le Sinn Féin remporte les élections « provinciales », ce qui est une première pour un parti nationaliste depuis la création de l’Irlande du Nord en 1921.
2023
Le Sinn Féin remporte les élections locales nord-irlandaise.
Le 18 mai dernier, votre parti, le Sinn Féin (nationaliste, républicain, pour un rattachement à la république irlandaise) a remporté les élections locales en Irlande du Nord avec 144 sièges sur 465, soit 7 % de plus que la dernière fois. Que nous disent ces résultats ?
Ces résultats indiquent que les gens en ont assez de l’absence de gouvernement en Irlande du Nord. Il y a un an, notre parti a remporté les élections parlementaires, mais nous n’avons pas encore été en mesure de siéger en raison du blocage du Democratic Unionist Party (DUP, loyaliste, pro-Royaume-Uni) concernant la formation d’un exécutif. Les services publics sont en train de s’effondrer, notre bilan de santé est le pire du Royaume-Uni, et nous sommes à la merci des coupes budgétaires du gouvernement conservateur de Londres dans les secteurs de l’éducation et de la communauté. Les gens sont en colère et ils l’ont fait savoir.
Selon l’accord du Vendredi saint, signé en 1998, le gouvernement nord-irlandais doit être dirigé conjointement par un parti loyaliste et un parti nationaliste. Si l’un des deux partis quitte la table, l’assemblée ne peut plus fonctionner. Pourquoi le DUP bloque-t-il le gouvernement ?
Le blocage est dû au Brexit. Le DUP affirme que le protocole nord-irlandais sape la position de l’Irlande du Nord au sein du Royaume-Uni. Cependant, leurs arguments ont été rejetés par la cours d’appel de Belfast et la Cour suprême de Londres.
Il y a eu des ajustements apportés au protocole, ce qu’on appelle désormais le “cadre de Windsor”. N’est-ce pas suffisant pour le convaincre ?
Le cadre de Windsor fait de nous une position économique unique, enviée même par les Écossais. Nous avons accès au marché interne britannique et au marché de l’Union européenne, qui représente 450 millions de personnes. Malgré cela, nous sommes dans une impasse.
Quels scénarios sont envisageables si cette situation perdure ?
Londres n’a pas de plan pour ramener le DUP au Parlement. Si le DUP décidait de boycotter l’assemblée de façon permanente, le gouvernement irlandais de Dublin et le gouvernement britannique pourraient être amenés à exercer une autorité commune sur l’Irlande du Nord en tant que cohéritiers de l’accord du Vendredi saint. Ce n’est pas une solution fantaisiste – elle est explicitement prévue par l’accord.
Le système de partage du pouvoir imposé à l’assemblée nord-irlandaise montre régulièrement ses limites. Quand ce n’est pas le DUP qui boude, c’est le Sinn Féin. Or, ce système est au cœur de l’accord du Vendredi saint, qui a mis fin à 30 ans de guerre civile dans votre province. Vingt-cinq ans plus tard, peut-on parler d’un échec ?
Absolument pas. Mon père est mort à cause de ce conflit. Des amis sont morts à cause de ce conflit. J’ai grandi dans un environnement lourdement armé. Mais tout cela a changé. Belfast est une ville complètement différente. Le sectarisme n’a pas complètement disparu, mais les événements sont beaucoup plus rares. L’accord a sauvé des vies. De nouvelles génér