C’est avec la gorge serrée que la sergente Julie Grimard, responsable du poste de police de Louiseville, a relaté les événements du 27 mars 2023, jour où sa collègue Maureen Breau a perdu la vie. Elle a témoigné aux côtés de quatre autres policiers lors de l’enquête publique du coroner sur ce décès, mardi.
Mme Grimard était chez elle lorsque ses collègues l’ont informée que deux d’entre eux avaient été blessés lors d’une intervention. «J’ai eu un frisson jusqu’au bout des orteils. C’était inconcevable», a-t-elle confié avec émotion, évoquant le moment où elle a appris que l’état de Maureen était critique. «Maureen était une excellente superviseure, une mère de famille sur le point de partir en congé différé avec sa famille. Je ne pouvais pas imaginer qu’un individu avait décidé que cela ne se passerait pas comme prévu ce soir-là.»
La sergente Grimard a témoigné pendant plus de deux heures pour répondre aux questions du coroner et des avocats sur le fonctionnement du poste de police de Louiseville et sur son travail. Pour illustrer que la publication de la circulaire concernant Isaac Brouillard-Lessard était courante, elle a déclaré : «Je pourrais vous recouvrir un mur de personnes violentes présentant des troubles de santé mentale à Louiseville.» Elle a remarqué une augmentation du nombre de dossiers qu’elle a rédigés concernant des cas de troubles mentaux : 180 en 2023, contre 158 en 2022 et 131 en 2021.
Difficultés dans les échanges d’informations
La matinée a été marquée par le récit de deux policiers concernant l’intervention dans l’appartement d’Isaac Brouillard-Lessard trois jours avant le drame. En entendant que la policière de la Sûreté du Québec Sabrina Fortin admettait ne pas avoir toutes les informations sur l’homme à ce moment-là, la coroner Géhane Kamel a déclaré : «Même si on a manqué quelque chose, je préfère l’entendre. Au final, nous faisons cela pour Maureen, pour vous et vos collègues de travail», la remerciant pour sa transparence.
La policière Fortin n’avait pas mentionné dans son rapport qu’elle et ses collègues avaient vu des armes blanches, dont un sabre, dans l’appartement, car selon elle, «c’est quelque chose de courant» pour les patrouilleurs. «Je comprends, mais c’est choquant», a répliqué Mme Kamel. Cette dernière s’est dite déconcertée par le partage incomplet d’informations sur le potentiel dangerosité de Brouillard-Lessard lors de l’intervention du 24 mars. «Ce soir-là, l’un de vous aurait pu être Maureen, car la communication n’était pas là.»
Le ton était tout autre lors du témoignage de l’agent Dave Paquin, policier de Victoriaville qui a recueilli le témoignage de l’oncle d’Isaac Brouillard-Lessard menant à son arrestation le 27 mars. La coroner l’a félicité pour avoir réalisé de nombreuses vérifications avant de transmettre la demande d’assistance à l’équipe de Louiseville. «J’ai l’impression que si j’étais une famille dans le besoin, mon appel serait entendu par vous. Et pour cela, je vous remercie.»
La CETM?
«Connaissez-vous la Commission d’examen des troubles mentaux ?», a été la question posée à tous les policiers interrogés lors des audiences. Sur 8 agents entendus depuis lundi, seulement un connaissait la CETM et les pouvoirs de police en cas de non-respect de ses ordonnances. Isaac Brouillard-Lessard avait notamment pour condition de ne pas troubler la paix. Sachant qu’il avait envoyé plus de 400 textos haineux à sa mère 72 heures avant le drame, Géhane Kamel a souligné le problème de la méconnaissance des policiers concernant la CETM. Elle a promis qu’une de ses recommandations serait une formation sur la CETM pour les agents de la Sûreté du Québec.
Mercredi sera l’occasion d’explorer les événements fatidiques de plus près : ce sont les trois policiers présents lors de l’intervention avec Maureen Breau qui témoigneront.
