Gabriel Nadeau-Dubois n’est pas parfait, mais la sortie de Catherine Dorion dans son livre ne remet pas en doute son leadership, assurent les trois candidates au poste de co-porte-parole de Québec solidaire (QS).
Invitées par Le Devoir à débattre dans le cadre de la course à la cochefferie, Ruba Ghazal, Christine Labrie et Émilise Lessard-Therrien ont tour à tour tenu, mardi, à apporter leur soutien à celui qu’elles aspirent à côtoyer à la tête du parti. Dans son plus récent livre, l’ancienne députée de Taschereau Catherine Dorion remet fortement en doute les manières de faire de l’ex-leader étudiant comme chef parlementaire de QS.
“Gabriel n’est pas parfait. Son style de leadership n’est pas parfait. Moi, quand je vais devenir porte-parole, vous me direz que je ne suis pas parfaite. C’est impossible”, a convenu la députée de Mercier, Ruba Ghazal, mardi, avant de rappeler que “GND” fait face à beaucoup de “pression” depuis son entrée en poste comme chef parlementaire à l’âge de 31 ans.
“Il fait un cheminement, et c’est tout à fait normal”, a dit l’élue solidaire.
Interrogée elle aussi à ce sujet, la députée de Sherbrooke, Christine Labrie, qui travaillait étroitement avec M. Nadeau-Dubois à titre de leader parlementaire lors du dernier mandat, a répété que son collègue n’avait jamais été “parfait”. “On fait tous notre gros possible. On a tous le souci constant de décevoir le moins de gens possible, d’être à la hauteur de la confiance que les gens portent en nous, a-t-elle dit. On commet tous des maladresses là-dedans, puis des erreurs.”
Qu’à cela ne tienne, Gabriel Nadeau-Dubois est “assurément” la bonne personne pour le poste. “Comme vous voyez, ça se rue pour travailler avec lui ! ” a lancé Mmoi Labrie.
Un “avertissement”
GND a beau avoir “le courage de l’action”, il se doit d’écouter l’”avertissement” lancé par Mmoi Dorion dans son livre, Les têtes brûlées. Carnets d’espoir punkselon la troisième candidate dans la course au co-porte-parolat de QS, Émilise Lessard-Therrien.
L’ancienne députée de Rouyn-Noranda–Témiscamingue l’invite à porter attention aux dangers de l’institution qu’est l’Assemblée nationale. “Catherine nous met en garde contre un risque potentiel : celui d’emprunter aux pratiques et à la culture de cette institution-là, dans laquelle on est enfermés et qui est très toxique, par moments”, a-t-elle affirmé.
Christine Labrie souhaite d’ailleurs que la sortie de l’artiste devenue députée amène QS “à [se] poser des questions sur comment faire grandir la gauche au Québec”. Elle se dit surprise par “l’ampleur de la détresse” ressentie dans le dernier mandat par Mmoi Dorion. “J’ai quand même un grand sentiment de tristesse, a-t-elle dit, mardi. Parce que c’est une collègue que j’appréciais, puis que j’apprécie encore énormément. J’aurais voulu être davantage là pour elle que je l’ai été.”
Le récit que Catherine Dorion a tiré de son mandat de quatre ans de députée de Taschereau “fait partie probablement de sa thérapie”, indique Ruba Ghazal. L’élue montréalaise dit partager la même affection pour Gabriel Nadeau-Dubois et Catherine Dorion. “Moi, je l’adore Catherine, je l’aime, puis j’adore Gabriel, puis je l’aime. Ah, ça se peut qu’on aime […] deux personnes qui, peut-être, ne s’entendent pas bien. Puis, c’est des choses qui arrivent”, a-t-elle souligné.
Mmoi Ghazal soutient ne “pas [avoir] du tout vécu la même expérience” que Catherine Dorion. “Mais pas du tout.”
“Tractations de pouvoir”
L’ex-députée de Taschereau a fait paraître cette semaine un ouvrage de près de 400 pages, dans lequel elle pose plusieurs questions sur le style de leadership des co-porte-parole de Québec solidaire. En premier lieu, celui de Gabriel Nadeau-Dubois.
Dans un passage du livre, par exemple, Mmoi Dorion laisse entendre que l’élu, devenu chef parlementaire du parti en 2021, avait tendance à se livrer à des “pressions émotives et [à des] tractations de pouvoir”. Sur plusieurs paragraphes, elle s’interroge sur ses manières de faire à la tête du parti et raconte avoir causé du dérangement en raison de la place qu’elle avait tendance à occuper dans les médias. “Comme on dit au théâtre : j’en coulisses. Ça ne se fait pas”, écrit-elle à un moment.
Après s’être refusé à faire un quelconque commentaire en cours de journée lundi, Gabriel Nadeau-Dubois a finalement pris la parole en soirée, dans un long message diffusé sur ses réseaux sociaux. “Catherine et moi n’avons pas eu la relation la plus facile. Ça ne surprendra personne”, a-t-il reconnu. Dans son texte, l’actuel co-porte-parole masculin de QS se désole de ne pas avoir pu trouver “une voie de passage” entre la vision politique de Mmoi Dorion et la sienne, malgré quatre ans passés ensemble au Parlement.
“Pour Catherine, le système actuel condamne le politicien à jouer un rôle de “tribun zombie, effacé, scripté, impropre à faire l’histoire”. Je ne reconnais pas mes collègues dans cette description-là”, a ajouté le co-porte-parole solidaire. “Catherine avait une perspective différente et nos désaccords n’ont jamais été résolus. C’est un défi que rencontrent bien des partis qui veulent en finir avec le statu quo.”
Dans un contexte de plafonnement dans les sondages, M. Nadeau-Dubois doit se soumettre dans deux semaines à un vote des membres pour demeurer co-porte-parole masculin de la formation. Comme il est le seul à se présenter à ce poste, le suffrage aura tout d’un vote de confiance.
Mmes Ghazal, Labrie et Lessard-Therrien sont les premières élues ou ex-élues de la formation de gauche à commenter de vive voix la saga impliquant M. Nadeau-Dubois et Mmoi Dorion.
