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Un ministre oblige les municipalités à conclure de nouveaux contrats gaziers coûteux, l’argent va à la Russie

Un ministre oblige les municipalités à conclure de nouveaux contrats gaziers coûteux, l’argent va à la Russie

PNA

Environ 120 communes recherchent un nouveau fournisseur de gaz pour réchauffer la mairie, les piscines et les salles de sport l’hiver prochain. En avril, le ministère de l’Économie et du Climat leur a ordonné de résilier le contrat en cours avec Gazprom Energy, la filiale néerlandaise de la compagnie gazière d’État russe, dans un délai de six mois.

Le ministre du climat et de l’énergie Rob Jetten (D66) veut empêcher que les paiements néerlandais pour le gaz n’alimentent la machine de guerre russe. Mais la commande risque d’avoir l’effet inverse : Gazprom Energy achète du gaz sur le marché gazier européen, tout comme Eneco et Greenchoice. Sur ce marché spot encore en partie approvisionné par la Russie, le gaz russe se mélange au gaz norvégien, américain ou algérien. Les communes achètent ce mix gaz.

Si une municipalité résilie un contrat dans lequel un prix bas avait été convenu il y a des années, elle doit désormais acheter du gaz sur le marché européen pour un multiple du prix. Puis la caisse enregistreuse sonne chez les fournisseurs, y compris en Russie.

Des dizaines de millions

Gazprom Energy est la filiale à 100% de la société mère de Moscou et est donc soumise à la loi sur les sanctions, selon le ministère. Cela met les autorités locales dans une impasse. L’approvisionnement en gaz est rare. La municipalité de La Haye a lancé un appel d’offres au printemps et l’a laissé courir jusqu’à fin juillet, mais n’a reçu aucune réponse. La Haye a maintenant demandé un report au gouvernement.

Si les municipalités trouvent un nouveau fournisseur, elles paient des prix exorbitants. Les municipalités d’Arnhem et de Nimègue, qui soumissionnent également pour un certain nombre de petites municipalités, estiment les surcoûts pour les seuls octobre, novembre et décembre à 1,7 million d’euros.

Les organismes qui aident les municipalités à acheter l’heure des nouvelles sachez que la tâche du gouvernement coûtera au total aux municipalités “des dizaines de millions”. Certaines municipalités ont demandé une indemnisation au ministère, mais n’ont reçu aucune réponse.

Tous les revenus vers l’Allemagne

Et plus important encore : tous les revenus des contrats – y compris ceux des Pays-Bas – se sont depuis envolés vers le Trésor allemand. L’ancienne maison mère Gazprom en est toujours l’unique actionnaire, mais n’en tire plus ni contrôle ni revenus. Cela rend la branche européenne allemande dans la pratique, selon le gouvernement allemand. Les anciennes filles de Gazprom vont encore plus loin sous un nouveau nom : SEFE (Securing Energy for Europe.)

L’Allemagne a désormais investi plus de 10 milliards d’euros pour maintenir à flot les entreprises importantes pour la sécurité énergétique. C’est pourquoi l’Allemagne demande aux clients néerlandais de conserver leurs contrats existants.

Mais le ministre Jetten considère qu’il n’est pas suffisamment prouvé que SEFE n’est plus russe. Assez remarquablement, les Pays-Bas sont seuls dans cette lecture. Outre l’Allemagne, l’Italie, la France, la Suisse, la République tchèque, le Royaume-Uni et les États-Unis participent également au SEFE. Aucun de ces pays n’a sanctionné l’entreprise.

La Commission européenne a annoncé que Bruxelles n’obligeait pas les Pays-Bas à faire quoi que ce soit : il appartient aux États membres eux-mêmes d’interpréter la législation sur les sanctions.

“Les Pays-Bas pourraient eux-mêmes violer les sanctions”

L’avocat et expert en sanctions Viktor Winkler va encore plus loin. La législation européenne sur les sanctions stipule également que les gouvernements ne peuvent pas accorder aux entités russes sanctionnées un avantage économique indu. “Si les gouvernements locaux néerlandais doivent annuler leurs contrats bon marché et acheter du gaz extrêmement cher qui est presque certainement en partie russe en remplacement, les Pays-Bas courent un grand risque de violer eux-mêmes les sanctions”, dit-il.

Sur demande, le ministère des Affaires économiques et du Climat maintiendra sa position antérieure. Les pourparlers avec l’Allemagne et SEFE n’ont pas convaincu le ministère et conclut donc que, malgré les mesures allemandes, SEFE “est toujours sous contrôle russe. Au final, les revenus profitent toujours à l’État russe. La position d’EZK reste donc inchangée”.

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