De gigantesques parkings de voitures importées, que certains qualifieront rapidement de cimetières automobile, se forment dans les grands ports européens. Quelle est la raison de ce désordre ?
Ca coince dans certaines zones portuaires ! Les cargos rouliers arrivent de plus en plus nombreux en Europe avec des milliers de voitures neuves à bord. Celles-ci sont déchargées sur ce qui ressemble à d’immenses parkings. Cependant, alors que ces véhicules devraient rapidement quitter la zone pour poursuivre leur voyage, beaucoup restent en attente. Ce qui crée un joyeux désordre logistique pour les responsables des zones portuaires. Les voitures chinoises sont particulièrement pointées du doigt dans cette situation, comme le souligne un article du Financial Times du 9 avril 2024.
Les comptes n’étaient de toute façon pas bons. Les chiffres relatifs au nombre de voitures exportées depuis la Chine et aux volumes d’immatriculations en Europe ne correspondent pas. Les ventes sont bien inférieures aux attentes des marques chinoises. Cela signifie forcément que des stocks existent en Europe. Cependant, les ports ne sont pas censés jouer ce rôle.
Des problèmes logistiques, notamment de camions
Depuis la pandémie, toute l’industrie automobile européenne est confrontée à une pénurie de chauffeurs routiers et de camions pour transporter les voitures d’un point A à un point B. Le problème touche également les constructeurs européens, qui se retrouvent face à un goulot d’étranglement entre ce qui est produit en usine et ce qui peut être livré aux clients.
Les constructeurs chinois sont d’autant plus concernés par ce problème qu’ils n’ont pas le même pouvoir de négociation en Europe que les grands groupes historiques. Ces derniers passent donc avant eux pour obtenir des créneaux disponibles auprès des transporteurs. Même Tesla représente un concurrent de taille sur cette question. La stratégie du constructeur américain implique une prise en charge de nombreux camions de transport pour se débarrasser au plus vite des véhicules, qu’ils proviennent de l’usine de Berlin ou qu’ils arrivent par cargos de Chine (pour la Model 3) ou des États-Unis (pour les Model S et X).
Un problème survient lorsque les parkings sont pleins. Les cargos ne peuvent plus décharger leur précieuse cargaison. Ils doivent attendre que la zone se libère et prennent du retard. Cela pourrait rapidement aboutir à une situation explosive. Certains ports exigeraient désormais des preuves que la suite de l’acheminement des véhicules est prévue avant d’autoriser une livraison dans leur port.
Mauvaise organisation ou choix délibéré ?
Pour certains de ces constructeurs chinois, il y a simplement un manque d’anticipation. Ils organisent parfaitement toute la logistique pour exporter les voitures depuis la Chine, la partie la plus simple pour eux. Cependant, ils sous-estiment ce qui se passe une fois les véhicules débarqués sur le port. Ceux qui n’ont pas d’équipes en Europe pour gérer directement ces défis logistiques sont particulièrement concernés.
Un autre phénomène se produit : certains constructeurs le font délibérément. C’est ce qu’un responsable du port d’Anvers-Bruges a pu observer auprès du Financial Times : “Les distributeurs de voitures utilisent de plus en plus les parkings du port comme entrepôt. Au lieu de stocker les voitures chez les concessionnaires, ils les récupèrent au terminal automobile.“
Cette utilisation détournée des ports comme lieu de stockage temporaire ne pose peut-être pas de problèmes particuliers. Cependant, le “temporaire” ne l’est pas. La société BLG Logistics, qui gère l’un de ces terminaux de manutention automobile dans le port de Bremerhaven, a déclaré au Financial Times que les temps d’attente se sont allongés ces derniers mois. Un autre expert, resté anonyme, a indiqué que certaines voitures chinoises sont restées dans les ports pendant 18 mois.
