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Présidentielle au Sénégal : Entre continuité et changement

Présidentielle au Sénégal : Entre continuité et changement

Ils devront choisir entre continuité et changement. Sept millions de Sénégalais seront appelés, dimanche 24 mars 2024, à élire un nouveau président pour succéder à Macky Sall. Ils devront trancher entre le candidat du pouvoir et 17 autres concurrents. Prêts à devenir le cinquième président du Sénégal, les candidats, qui écument le pays jusqu’à vendredi dans des cortèges colorés, offrent une alternative.

Un contexte politique tendu

Le Sénégal demeure l’un des rares pays du continent à n’avoir connu aucun coup d’État depuis son indépendance, le 4 avril 1960. Il a élu ses quatre présidents depuis 1963 au suffrage universel et pratiqué l’alternance politique en 2000 et 2012. Le pays a néanmoins déjà connu, depuis 1960, plusieurs épisodes de violence politique souvent meurtrière.

Depuis 2021, le bras de fer entre l’opposant Ousmane Sonko et le pouvoir, conjugué au flou maintenu par le président sur un troisième mandat et aux tensions sociales, a conduit à des troubles. Cela a donné lieu à des dizaines de personnes tuées et des centaines arrêtées. Et l’image du Sénégal a souffert.

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Au pouvoir depuis 2012, le président Macky Sall, qui s’était attiré les louanges en renonçant en 2023 à briguer un troisième mandat, a causé un choc en décrétant le 3 février, à la dernière minute, un report de la présidentielle prévue trois semaines plus tard. L’annonce a suscité une nouvelle agitation et des manifestations qui ont fait quatre morts. Le Conseil constitutionnel a finalement forcé l’exécutif à organiser l’élection, fixée au 24 mars. Contraint, le gouvernement a fait voter une amnistie et libérer des centaines de personnes, dont Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye, détenus pendant des mois.

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Plusieurs enjeux nationaux

Le Sénégal est un pays jeune puisque la moitié des 18 millions d’habitants ont moins de 18 ans, selon des statistiques officielles citées par l’AFP. À l’international, Dakar maintient des relations fortes avec l’Occident tandis que la Russie renforce ses positions alentour. À l’intérieur de ses frontières, le Sénégal a plusieurs défis à relever. Il fait face à une pauvreté persistante et à un chômage chiffré officiellement à 20%.

Gaz et pétrole

L’État ouest-africain doit rejoindre en 2024 le cercle des producteurs de gaz et de pétrole. De vastes gisements ont été découverts dans l’Atlantique au large du pays depuis 2014. Plusieurs fois reportée, la mise en exploitation des réserves par plus de 2 000 m de fond est annoncée cette année. La production sera destinée à l’exportation et à la consommation domestique. Si elle sera loin d’atteindre les niveaux des géants mondiaux et africains, des revenus en milliards de dollars en sont attendus, ainsi qu’une transformation accélérée de l’économie. Mais cet espoir va de pair avec la peur que cette ressource ne déséquilibre l’économie du pays et amène finalement plus de pauvreté. La répartition de ces revenus est un thème de la campagne présidentielle.

Tourisme

Au Sénégal, le tourisme représentait près de 7% du PIB et environ 8% des emplois en 2022, selon le Conseil mondial du voyage et du tourisme. Parmi les attraits du pays, ses 700 km de côte, le musée des Civilisations noires ouvert à Dakar en 2018 ou le patrimoine de Saint-Louis au nord. Et l’île de Gorée, symbole de la traite négrière, d’où sont partis pendant plusieurs siècles des esclaves africains vers les Amériques, et lieu de mémoire inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco comme “symbole de l’exploitation humaine”. Cette île est aussi un remarquable site sur l’Atlantique, non loin de la capitale de ce pays d’une grande richesse culturelle.

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Émigration

Le pays est aussi confronté aussi à une forte émigration. Des milliers de Sénégalais chaque année, des jeunes surtout, au total des dizaines de milliers depuis des années, se sont embarqués sur des pirogues pour tenter de gagner l’Europe par l’Atlantique, en quête d’une vie meilleure. D’après des ONG espagnoles et l’agence européenne Frontex, les Sénégalais sont dans les plus représentés parmi les migrants arrivés en nombre record en 2023 dans l’archipel espagnol des Canaries, porte d’entrée de l’Europe. Un nombre inconnu mais élevé de leurs compatriotes ont péri en mer. Une autre route migratoire est en plein essor : des Sénégalais prennent l’avion pour le Nicaragua, puis remontent l’Amérique centrale par voie terrestre pour tenter de rejoindre les États-Unis.

Quatre candidats principaux

Dix-sept hommes et une femme seront en lice ce dimanche. C’est la première fois que le président sortant ne se représente pas à l’élection. Quelques-uns des prétendants sortent du lot.

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Amadou Ba

Dauphin de l’actuel président qui l’a adoubé pour porter les couleurs de la coalition gouvernementale, Amadou Ba se présente comme un “serviteur de l’État”. Âgé de 62 ans, cet ancien inspecteur des impôts met en avant son image d’homme pondéré qui maîtrise ses dossiers. Ministre de l’Économie et des Finances de 2013 à 2019, il joue les premiers rôles dans la mise en œuvre du Plan Sénégal Émergent, vaste programme pluriannuel de développement. Après un passage aux Affaires étrangères, il est nommé en 2022 Premier ministre où il reste jusqu’à début mars. Son expérience et son langage inspirent la confiance des partenaires étrangers. Revendiquant le bilan de Macky Sall, Amadou Ba est aussi crédité d’un réseau très dense, y compris chez les chefs religieux, très influents.

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Amadou Ba fait face à trois candidatures dissidentes au sein de la majorité sortante et dit vouloir “partager la prospérité” engendrée par un plan de développement du président Sall. Prônant “l’unité”, “la paix” et “l’espoir”il promet s’il est élu de “créer 1 million d’emplois sur 5 ans” en investissant dans l’agriculture, l’industrie, les infrastructures et les énergies renouvelables. Les Sénégalais doivent voter “pour l’expérience et la compétence. Au lieu de confier les rênes du pays à des aventuriers”estime Amadou Ba, selon des propos rapportés par l’AFP. Il critique en particulier la proposition de Faye et Sonko d’émettre une monnaie sénégalaise à la place du franc CFA.

Une partisane du candidat Amadou Ba tient une affiche lors de son rassemblement de campagne à Guediawaye, dans la banlieue de Dakar, au Sénégal, le 10 mars 2024. | ZOHRA BENSEMRA / REUTERS

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