2024-04-18 02:01:38
Les pénuries de médicaments sont une « nouvelle normalité » au Royaume-Uni et sont exacerbées par le Brexit, prévient un rapport du groupe de réflexion sur la santé Nuffield Trust. Une récente augmentation spectaculaire du nombre de médicaments non disponibles a créé de graves problèmes pour les médecins, les pharmaciens, le NHS et les patients, selon le rapport.
Le nombre d’avertissements émis par les sociétés pharmaceutiques concernant des problèmes d’approvisionnement imminents pour certains produits a plus que doublé, passant de 648 en 2020 à 1 634 l’année dernière.
Mark Dayan, l’auteur principal du rapport et responsable du programme Brexit du Nuffield Trust, a déclaré : « L’augmentation des pénuries de médicaments vitaux, passant de rares à banales, a été une évolution choquante à laquelle peu de gens auraient pu s’attendre il y a dix ans. »
Le Royaume-Uni est aux prises depuis l’année dernière avec d’importantes pénuries de médicaments pour traiter le TDAH, le diabète de type 2 et l’épilepsie. Trois médicaments contre le TDAH qui étaient en pénurie étaient censés être de nouveau en circulation normale d’ici la fin de 2023, mais restent difficiles à obtenir.
Certaines pénuries de médicaments sont si graves qu’elles mettent en danger la santé, voire la vie de patients atteints de maladies graves, ont prévenu les patrons des pharmacies.
Les associations caritatives de santé ont constaté une forte augmentation des appels de patients incapables d’obtenir leurs médicaments habituels. Nicola Swanborough, responsable des affaires extérieures de l’Epilepsy Society, a déclaré : « Notre ligne d’assistance a été inondée d’appels de personnes désespérées qui doivent parcourir des kilomètres, se rendant souvent dans plusieurs pharmacies pour essayer d’accéder à leurs médicaments.
Paul Rees, directeur général de la National Pharmacy Association, qui représente la plupart des 7 000 pharmacies indépendantes du Royaume-Uni, a déclaré : « Les pénuries d’approvisionnement constituent un danger réel et actuel pour les patients qui dépendent de médicaments vitaux pour leur bien-être. Les équipes pharmaceutiques ont vu les problèmes s’aggraver dans ce pays ces dernières années, mettant davantage de patients en danger.
« Les pharmaciens… passent des heures par jour à rechercher des stocks, mais doivent trop souvent refuser des patients. Il est désolant de constater que les équipes pharmaceutiques se retrouvent incapables de fournir rapidement des médicaments, sans que ce soit de leur faute.»
Les problèmes de fabrication mondiaux liés au Covid, à l’inflation, à la guerre en Ukraine et à l’instabilité mondiale ont contribué à l’incapacité sans précédent du Royaume-Uni à garantir l’accès aux médicaments aux patients.
Mais le départ de la Grande-Bretagne de l’UE en 2020 a considérablement aggravé le problème, mis à nu la « fragilité » des réseaux d’approvisionnement en médicaments du pays et pourrait conduire à une aggravation de la situation, selon le rapport.
“Une image claire s’est dégagée des fragilités sous-jacentes aux niveaux mondial et britannique, qui ne sont pas fondamentalement enracinées dans le Brexit mais exacerbées par celui-ci de certaines manières spécifiques, notamment par le fait que certaines entreprises ont retiré le Royaume-Uni de leurs chaînes d’approvisionnement”, peut-on lire.
La sortie du Royaume-Uni du marché unique a perturbé l’approvisionnement en médicaments auparavant fluide, par exemple en créant une exigence de contrôles douaniers à la frontière, tout comme la décision du Royaume-Uni de quitter l’Agence européenne des médicaments de l’UE et de commencer à approuver elle-même les médicaments. Le Royaume-Uni est désormais beaucoup plus lent que l’UE à mettre de nouveaux médicaments à disposition, selon le rapport.
Les formalités administratives post-Brexit ont incité certaines entreprises à cesser complètement de fournir au Royaume-Uni.
Le fait que la chute de la valeur de la livre sterling après le vote sur le Brexit en 2016 a coïncidé avec une offre beaucoup plus réduite de médicaments à l’échelle mondiale en raison des pénuries d’ingrédients des sociétés pharmaceutiques, ce qui a fait grimper les prix, a également joué un rôle clé dans la création de ces pénuries.
Cela a contraint le ministère de la Santé et des Affaires sociales (DHSC) à accepter de payer plus que le prix habituel pour des médicaments rares, afin d’essayer d’assurer la continuité de l’approvisionnement beaucoup plus souvent qu’auparavant. Les « concessions de prix » ont décuplé, passant d’environ 20 par mois avant 2016 à 199 par mois fin 2022, et ont coûté au NHS d’Angleterre 220 millions de livres sterling en 2022-2023, a découvert le groupe de réflexion.
Le rapport est basé sur des demandes d’accès à l’information adressées aux organismes de santé ainsi que sur des entretiens et une table ronde avec des personnalités clés de l’industrie pharmaceutique, de hauts fonctionnaires du DHSC et des organismes de santé européens.
Il a averti que le Brexit avait créé « des risques supplémentaires… pour le Royaume-Uni ». Le Nuffield Trust a déclaré que les pénuries de médicaments pourraient s’aggraver parce que les 27 pays de l’UE ont récemment décidé d’agir comme un bloc unifié pour tenter de minimiser l’impact de la pénurie mondiale, ce qui pourrait rendre l’approvisionnement de la Grande-Bretagne encore moins une priorité pour les sociétés pharmaceutiques.
Le Dr Andrew Hill, expert de l’industrie pharmaceutique à l’Université de Liverpool, a déclaré : « Avec ce contexte de tension sur les approvisionnements mondiaux, le Royaume-Uni est désormais plus vulnérable aux pénuries de médicaments. Le Royaume-Uni est désormais coincé derrière les États-Unis et l’Europe dans la file d’attente pour les médicaments essentiels. D’autres pays proposent des prix élevés et un accès plus facile, avec des réglementations d’approvisionnement plus simples.
Les ministres devraient accepter de payer davantage pour les médicaments génériques, qui sont généralement beaucoup moins chers que les médicaments de marque, afin de contribuer à lutter contre les pénuries, a ajouté Hill.
La Royal Pharmaceutical Society, qui représente les pharmaciens, a exhorté les ministres à modifier la loi pour permettre aux pharmaciens d’officine de contourner les pénuries en donnant aux patients des prescriptions légèrement différentes, comme le font déjà leurs homologues des hôpitaux.
“À l’heure actuelle, si une version liquide d’un médicament est disponible mais que des comprimés ont été prescrits et sont en rupture de stock, le pharmacien ne peut pas fournir la version liquide”, a déclaré James Davies, directeur de la société pour l’Angleterre. « Le patient n’a pas d’autre choix que de retourner chez le prescripteur pour une nouvelle prescription, ce qui entraîne une charge de travail inutile pour les généralistes et des retards pour le patient. »
Le DHSC a déclaré que la plupart des médicaments restaient disponibles. “Des prix réduits peuvent survenir pour diverses raisons et ne peuvent pas être liés à des pénuries”, a déclaré un porte-parole du DHSC.
« Notre priorité est de garantir que les patients continuent de recevoir les traitements dont ils ont besoin. Il existe environ 14 000 médicaments agréés et la grande majorité est en bon approvisionnement.
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