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Les limites du système éducatif inégalitaire et colonial : le cas du baccalauréat

Les limites du système éducatif inégalitaire et colonial : le cas du baccalauréat

Le baccalauréat, une relique coloniale dont il est difficile de se défaire, illustre les limites d’un système éducatif inégalitaire. On distingue d’un côté les écoles publiques et les institutions privées, ainsi que certaines écoles publiques favorisées par l’État, au détriment de la grande majorité des établissements scolaires. Il existe donc un système scolaire à plusieurs vitesses qui ne garantit pas les mêmes chances de réussite pour tous les élèves, reflétant ainsi les profondes inégalités de la société.

Les réussites sont mises en avant, tandis que les échecs sont souvent attribués uniquement à l’élève, qui est souvent accusé de ne pas avoir suffisamment travaillé. Mais a-t-il eu les mêmes conditions de réussite qu’un autre élève qui n’a pas connu de grèves ou de manque d’enseignants pendant toute l’année scolaire ? A-t-il assisté à tous les cours et étudié dans un environnement propice à l’apprentissage ? Dispose-t-il de l’aide nécessaire en cas de difficultés scolaires? Les parents ont-ils été suffisamment formés pour soutenir l’enfant sur le plan éducatif ? Il est injuste de donner un jugement final sur les performances scolaires en seulement trois jours, lorsque l’élève a été confronté pendant des années à des lacunes du système éducatif sans aucun soutien.

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En 2022, le directeur de l’Office du baccalauréat s’est félicité d’un taux de réussite légèrement supérieur à 50%. Comme d’habitude, on célèbre les plus méritants en oubliant l’autre moitié, contrainte de redoubler une année scolaire entière. En comparaison, en 2023, la France a enregistré un taux de réussite de 90,9% au baccalauréat, selon le ministère de l’Éducation.

Il est anormal de considérer l’échec comme une normalité dans notre société. Prenons par exemple l’université, où redoubler une année ou une session reste encore une expérience très répandue. Le culte de l’excellence doit s’accompagner de l’égalité des chances pour permettre à chaque enfant de développer ses talents, quel que soit son milieu social. La médiatisation excessive des élèves doués ou des mentions honorables au baccalauréat ne cache pas les nombreuses lacunes et injustices d’un système scolaire qui exclut plus qu’il n’inclut les plus vulnérables. Il incombe à un État qui se soucie réellement de l’égalité des chances et qui est conscient de la mission éducative de mettre en place toutes les conditions de réussite, sinon il sera entièrement responsable de tous les échecs.

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Il est donc cruel d’endosser toute la responsabilité d’un échec sur de jeunes élèves à peine sortis de l’adolescence, en pensant que de simples encouragements suffiront. C’est un véritable coup dur pour leur estime de soi de commencer leur vie adulte par un échec cuisant. Nous ne mesurons pas suffisamment l’impact psychologique de recevoir un premier échec au début d’une vie et d’être la risée secrète de la société. La confiance en soi d’une nation qui sera appelée à rivaliser avec le reste du monde se construit et se forge d’abord sur les bancs de l’école.

En plus des conséquences psychologiques d’une série d’échecs, il est incompréhensible que l’État accepte de dépenser chaque année des milliards pour obtenir des résultats médiocres…

Lorsque des pratiques institutionnalisées donnent systématiquement de mauvais résultats, il est nécessaire de faire une pause et de remettre en question la pertinence de ces pratiques. L’héritage colonial français nous enferme dans une immobilité atavique.

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Dans d’autres pays, le baccalauréat tel qu’il existe en France et dans ses anciennes colonies n’existe pas. Les évaluations de fin de parcours, en plus d’être plus humaines, prennent en compte les performances réelles de l’élève tout au long de sa scolarité.

Lamine Niang
Gestionnaire scolaire, Montréal
[email protected]

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