Au BPS 22, l’Américain Banks Violette taille l’espace aux accents du métal et radiographie la violence de l’Amérique.
Le Heavy métal et ses rejetons, et surtout le drone metal du groupe Terre (Terre) et de son fondateur Dylan Carlson alimentent le romantisme noir tendance XXIe siècle de Banks Violette. Le titre même de l’exposition “LeBIls ont fait du miel dans le Crâne de Lion” est emprunté à un album d’Earth.
L’œuvre de l’Américain est un retour sur soi et une radiographie de la société américaine. Pierre-Olivier Rolin, directeur du BPS22 y est attentif de longue date: “Banks a vécu le rêve et le cauchemar américain, la technologie, l’argent, l’addiction à l’héroïne et à la cocaïne, la chute, son abandon par le marché, son retrait dans sa ville natale d’Itaca en déclin post-industriel, et sa renaissance d’artiste”.
En 2014, Banks Violette a donc quitté New York pour retourner à Ithaca s’extraire des cycles dépendance-désintoxication. Après quelques années de dessins au graphite sur papier, il revient à la sculpture monumentale et présente avec la maison Celine (New York, Paris, Londres, Milan, etc.) 14 œuvres, tels des lustres suspendus ou “déchus”, comme il les qualifie. Ce sont pour lui des autoportraits — “ce qui s’effondre dans un coin et s’évanouit”, ironise-t-il.
Cette renaissance est ponctuée de défunts. Le 8 avril 1994, Kurt Cobain est retrouvé mort près du fusil de chasse que lui avait acheté Dylan Carlson. À côté du corps, une lettre citant Neil Young: “Mieux vaut brûler franchement que s’éteindre à petit feu”. “Kurt Cobain n’a pu réaliser une guitare, mais a laissé des croquis que j’ai utilisés pour la construire selon ses spécifications”, confie Violette. La guitare brisée et l’installation-cénotaphe (Pas encore titré (guitare Cobain) c’est la quintessence du rock en métaphore de la mort, souligne Pierre-Olivier Rolin.
Récit de la matière
Et Terre (le groupe) l’inspire, la terre d’origine de Violette est aussi présente dans ses matériaux. Sa vingtaine de dessins au graphite sur papier couche du charbon sur la feuille, un graphite dérivé du charbon, ancienne richesse de sa région industrielle d’origine. Et la Fender dessinée par Kurt Cobain allie 50% de sel et 50% de résine polyuréthane transparente. Ce couplage (le sel, friable, poudreux, fuyant, soluble, évocateur d’autres poudres et la résine dure, réflexive, compacte) constitue une métaphore de la vie, fragile et durcie.
Ce récit génère “un jeu d’oppositions binaires (vie/mort, visible/invisible, ordre/désordre, raison/passion, son/silence, etc.)”, rappelle Pierre-Olivier Rolin. Pas encore titré/(mur miroir) œuvre récurrente formée d’un mur de 16 miroirs brisés, en est l’emblème. Des vérins hydrauliques enserrent chaque miroir.
Le jour du vernissage, les vérins les ont fait éclater. Deux idées maîtresses sont à l’œuvre ici: une action passée conduit au chaos ou à l’entropie; et la “Sympathy for the Devil” (titre du morceau célébrissime des Rolling Stones), propre à toute la culture rock/métal, rend séduisant un état de destruction jugé d’instinct négatif. “La vitre brisée m’intéresse plus que la vitre intacte. Je m’intéresse plus au monstre qu’à son créateur”, conclut Banks Violette.
“Les Abeilles fabriquaient du miel dans le Crâne de Lion (2005-2023)”
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