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Le vampire Pinochet et le droit de la mer arrivent à Venise – Francesco Boille

Le vampire Pinochet et le droit de la mer arrivent à Venise – Francesco Boille

2023-09-01 17:20:02

La Compétition de cette quatre-vingtième édition de la Mostra de Venise démarre bien, même si tout ne nous a pas convaincu de la même manière. C’est particulièrement vrai pour les deux derniers titres intéressants mais inégaux présentés : Ferrari chez Michael Mann e Homme-chien par Luc Besson.

Le premier est un film qui isole un moment particulier de la vie d’Enzo Ferrari où, en 1957, son entreprise était au bord de la ruine et il la fait revivre avec un vrai génie. Des aperçus sensibles, même s’ils sont un peu maniérés, entrent dans l’Italie des années cinquante, pauvre mais explosive en énergie et en espoirs. Cependant, un excès d’hagiographie et de didactisme nuit en partie à l’ouvrage ; le second est plutôt un thriller inspiré d’un fait réel dans lequel le tueur en série véhicule un discours féministe et de genre ; l’idée et le scénario sont vraiment originaux et on pourrait s’attendre à une puissance visuelle digne d’un grand film, voire d’un chef-d’œuvre, mais malheureusement cela n’arrive pas.

Compter il s’agit plutôt d’un film inattendu et intense qui demande peut-être un peu de digestion de la part du spectateur, notamment pour certaines séquences initiales macabres, mais qui gagne beaucoup à un second visionnage, même rapproché. Il marque le retour du Chilien Pablo Larraín pour raconter le passé douloureux de son pays et de ses figures masculines après la trilogie féminine, renouant ainsi avec le chef-d’œuvre Autopsie (2010), malheureusement jamais sorti en Italie. Le 11 septembre prochain sera en effet le cinquantième anniversaire du coup d’État du général Pinochet contre le gouvernement du président socialiste Salvador Allende, décédé lors du coup d’État.

Satire hallucinée et visionnaire qui imagine Augusto Pinochet comme un vampire en pleine crise existentielle, fatigué de vivre deux cent cinquante ans et déterminé à arrêter de boire du sang parce qu’il ne supporte pas d’entrer dans l’histoire comme un voleur, tourné en élégant noir et blanc, voire scintillant : la photographie révèle une grande qualité de composition de l’image qui fait presque office de contrepoint à certaines situations et représentations volontairement grossières, au grotesque exposé.

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Mais est-ce seulement la représentation qui les rend grotesques ou Pinochet et familier sont-ils intrinsèquement familiers ? Une des nombreuses qualités de ce film culotté et impertinent, c’est qu’il parvient, entre les lignes mais pas trop, à poser cette question. La farce surréaliste du réalisateur chilien utilise la figure d’un jeune et séduisant comptable – en réalité un croyant possédé venu enquêter sur la prétendue essence satanique de l’ancien dictateur – pour divaguer et rappeler au grand public, profitant de Netflix, des innombrables atrocités commises par Pinochet et sa famille. Larraín semble nous dire qu’ils veulent maintenir le pays (où la droite nostalgique se déchaîne contre la nouvelle constitution) dans une suspension éternelle de l’injustice, d’un renouveau incomplet, peut-être dans un vide comme celui raréfié dans lequel vivent les membres de la famille : un univers parallèle fait de vestiges aussi risibles que ses occupants – les enfants ne sont certes pas gentils mais pas franchement désagréables non plus, plutôt des incompétents, comme le dit Pinochet lui-même, insipides et niais – dans Compter on ne fait que compter (c’est la traduction littérale du titre) l’argent et les propriétés cachées, qui semblent franchement infinies.

On parle certes de massacres impitoyables et de suspension brutale de tous les droits de l’homme, mais on fait avant tout les « comptes » dans la poche du général. Et l’apparition de Thatcher en mère-vampire, référence évidente au Chili comme territoire-laboratoire (en échec) d’expérimentation du libre marché, couronne le tout. Générant des visions notables, surtout aériennes mais pas seulement, et des travellings lents mais élégants d’avant en arrière dans le labyrinthe suspendu dans les brumes, il est bien triste que cette précieuse œuvre arrive directement sur Netflix à partir du 15 septembre sans aucun passage en salles. .

Contre la rhétorique militariste
Un autre film enveloppé de brumes, un autre film qui représente un vide, c’est le titre italien non moins inattendu qui a ouvert le festival, Le commandant d’Edoardo De Angelis, une très belle surprise. Si évidemment sa production a été rédigée bien avant le gouvernement de Giorgia Meloni (elle a d’ailleurs été conçue sous le premier gouvernement Conte), il se trouve que le film arrive en salles un peu moins d’un an après le président du conseil. La présence du vice-Premier ministre Matteo Salvini à la cérémonie d’ouverture semble imprévoyante, résultat d’une lecture superficielle du film ou d’une tentative un peu maladroite de mettre son chapeau dessus pour tenter d’en détourner le sens inconfortable.

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En effet, le film de De Angelis est un cheval de Troie qui en contient d’autres et renverse la rhétorique militariste, mettant en scène un événement grave de la Seconde Guerre mondiale qui a au centre un homme noble, même si l’histoire établira plus tard qu’il était du mauvais côté. .

Dans un long métrage qui dépasse les deux heures et demie, mais dense et serré, qui imprègne continuellement le spectateur de ses ambiances, le réalisateur raconte la véritable histoire de Salvatore Todaro, à la tête de l’équipage du sous-marin Commandant Cappellini de la Royal Navy qui, en octobre 1940, risqua à plusieurs reprises sa vie et celle de l’équipage pour respecter les lois éthiques de la mer. En fait, il a désobéi aux ordres de récupérer puis de mettre en sécurité les survivants du navire marchand belge coulé par le sous-marin lui-même, car il était soupçonné à juste titre de transporter des armes destinées aux Britanniques, malgré la neutralité de la Belgique. Todaro accomplira cette mission en défiant même la marine britannique en la confrontant à sa propre éthique.

Et si les déclarations du réalisateur et de Pierfrancesco Favino – qui incarne le commandant le faisant évoluer entre tristesse et rayonnement humain, entre optimisme et prédestination, stéréotype de l’Italien et archétype du héros antique – attestent de l’intention de mettre en scène à partir d’un original Sous l’angle du concept selon lequel « les lois de la mer ne doivent pas être enfreintes », avec une référence évidente à la politique des débarquements de Salvini et de la droite, le film tout entier se révèle être un miroir inversé de la logique que l’on a tenté de inculquer dans l’esprit des Italiens : la langue (ou la couleur de la peau) comme question fondamentale d’identité.

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Au lieu de cela, le sous-marin se transforme en une sorte de creuset claustrophobe où l’italien est l’une des nombreuses langues avec le flamand, le vénitien et le napolitain. Non seulement cela, mais le film souligne clairement que rien n’est plus beau et régénérateur pour l’esprit des êtres humains qu’un groupe de personnes de différents pays qui sympathisent et fraternisent librement, ce qui frise l’impossible en temps de guerre, comme ici.

Une trêve comme une oasis où les êtres humains reviennent et où la guerre perd son sens : mais l’oasis est fragile et se dissout rapidement. Bien sûr, les militaires italiens n’ont pas toujours été de bonnes personnes, il suffit de penser aux crimes commis lors des guerres coloniales, mais chaque situation est différente et cela ne devrait pas les empêcher de respecter ceux qui servent leur pays tout en préservant leur honneur. Mais surtout cet ouvrage s’immerge dans la guerre fasciste pour subvertir de l’intérieur une grande partie de l’idéologie réactionnaire véhiculée par la droite.

Mais en vérité Le commandant c’est aussi un grand film d’ambiances, de visions figées d’une qualité presque picturale où se dessine malgré tout une vision pro-humaine et anti-guerre, un film qu’il nous semble agréable de revoir dans les prochaines années.

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