Si, jeudi soir, Luc Besson a tiré son épingle du jeu avec Homme-chien présenté en Compétition alors que son auteur a été lavé de toute accusation de viol par la justice française, il n’en va pas de même pour Roman Polanski. Toujours menacé d’extradition vers les États-Unis, le cinéaste franco-polonais n’a évidemment pas fait le déplacement sur le Lido. S’il vit aujourd’hui à Paris, c’est à Gstaad, en Suisse, où il possède un chalet dans lequel il fut assigné à résidence, que le cinéaste a tourné son dernier film Le palais dévoilé hors compétition sur le Lido samedi soir.
Le film de trop
Au-delà de la polémique que constitue la sélection du dernier film de Polanski dans un festival qui avait déjà accueilli son dernier film J’accuse en Compétition en 2019, il est affligeant de voir le grand cinéaste qu’il fut, l’auteur de quartier chinois ou du Pianiste tomber si bas, avec une comédie burlesque d’une incroyable lourdeur. À tel point qu’on ne sait si, vendredi soir, les sifflets qui ont accueilli le film étaient destinés à l’homme Polanski, accusé de viols, ou au réalisateur…
Produit par la Rai et l’Institut polonais du cinéma, Le palais met en scène la bonne société internationale rassemblée dans un palace des Alpes suisses, le soir du réveillon de l’an 2000. On y croise des mafieux russes et leurs bimbos blondes, une marquise française (Fanny Ardant) et son chien incontinent, une bande de vieilles ultra-liftées et leur chirurgien esthétique, un escroc américain ultra-riche aux faux airs de Donald Trump (Mickey Rourke), un milliardaire nonagénaire (John Cleese) et sa jeune nouvelle épouse obèse de 22 ans… Autant de clients multipliant les caprices, sur lesquels veille un brave directeur d’hôtel (Oliver Masucci) courant à gauche et à droite pour tenter de satisfaire leurs moindres désirs.
Vulgarité affligeante
Coécrit avec le Polonais Jerzy Skolimowski, Le palais accumule les situations grotesques, les personnages caricaturaux et se vautre dans une vulgarité permanente, entre scatologie, grossophobie et grossièreté gratuite. À côté, Benny Hill c’est la grande classe… Sans compter des acteurs de seconde zone ou sur le retour…
Roman Polanski rêvait sans doute d’une satire des ultra-riches façon Sans filtre du Suédois Ruben Östlund (la Palme d’or 2022), le vieux cinéaste, qui vient de fêter son 80e anniversaire, accouche d’un film de vieux, qui paraît aussi sénile que ses personnages. Et qui se clôt sur une image – peut-être la dernière de son cinéma – comme un pied de nez infantile à ses détracteurs.
Face à un tel naufrage artistique, cette sélection de Le palais paraît incompréhensible. Sinon comme un soutien affiché de la Mostra à Roman Polanski. Un film à découvrir néanmoins prochainement sur les écrans belges, puisqu’il a été acheté.