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Le mot paix. Pour les femmes – Corriere.it

Le mot paix.  Pour les femmes – Corriere.it

2024-01-05 20:17:24

De SILVIA VEGETTI FINZI

«Quand une femme entre en contact avec ses ressources intérieures, elle trouve, déjà préparée, un modèle de Paix»: une réflexion sur la maternité, l’identité et les jours dans lesquels nous vivons

Le terme Paix est parmi les plus inclusifs car il n’y a personne qui se considère humain qui ne la désire, qui ne l’invoque, même ceux qui la considèrent impossible. Mais je crois que chacun apporte sa propre identité, sa propre être au monde. LEsurtout les femmes qui, ayant atteint de nombreux objectifs d’égalité avec les hommes, mais pas tous, se sont engagés à définir leur différence, leur spécificité.

L’identité féminine est, comme tout, multiple et multiforme car nous vivons dans des contextes différents et dans chacun nous nous présentons de différentes manières. Mais je crois que le plus petit dénominateur commun du fait d’être une femme réside dans la maternité. Je ne parle pas seulement de la maternité réalisée mais de la maternité potentielle, représenté par le corps et l’imaginaire féminin, par la possibilité de contenir, de nourrir et de donner la vie. Une prédisposition qui existe en chacun d’eux et qui peut se réaliser dans la filiation ou être sublimée dans des réalisations symboliques telles que les soins, l’éducation, l’art, la communication, les œuvres sociales qui, bien qu’indépendantes de la procréation corporelle, préservent les valeurs de créativité et de générosité.

Évoquer et partager le potentiel maternel nous permet d’affirmer que la Paix est possible, pensable et réalisable. Lorsqu’une femme entre en contact avec ses ressources intérieures, elle découvre un modèle de Paix déjà en place. Un modèle latent dans le corps et l’esprit mais qui, une fois exprimé, devient une proposition valable pour tout le monde, surtout en ce moment historique. Voyons de quoi il s’agit.

La relation sexuelle, complémentaire et réciproque, vise génétiquement à générer un enfant, mais pour les femmes cela implique un engagement supplémentaire car elles devront le contenir, le nourrir et enfin le laisser partir pour qu’il vive sa propre existence et la prolonge dans les espèces. Rien ne pourrait être plus éloigné de la guerre et de ses fantômes de destruction et de mort. Tant que les femmes n’ont jamais fait la guerre, même si elles en ont été victimes, et jusqu’à présent ils ne se sont pas attribués, comme les hommes, le droit de tuer (pendant des siècles l’armée a été exclusivement masculine), je crois que leur parole concernant la Paix mérite d’être écoutée.

Avec une voix de femme

Analysant la terrible période historique que nous vivons, Edgard Morin nous invite tout d’abord à pense, réfléchir sans se précipiter pour faire, agir. Ce que nous vivons, affirme-t-il, n’est pas seulement une crise économique, sociale et écologique. Il s’agit avant tout d’une crise de la pensée. “Réveillez-vous !” » est le titre de son dernier livre (mimesis), qui nous laisse incertains si nous devons nous réveiller d’un rêve ou d’un cauchemar. La contradiction est particulièrement évidente aujourd’hui, alors que tout change. La nature se rebelle contre l’abus de ses ressources ; la science montre l’irrationalité des fins cachée par l’apparente neutralité des moyens et la société est confrontée à l’incapacité de gouverner un monde globalisé.

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La menace atomique, qui se profile comme la « solution finale » d’un conflit insoluble, fait référence à la « fin de l’histoire », prophétisée il y a trente ans par le politologue Francis Fukuiyama. Freud dénonçait depuis longtemps trois impossibilités fondamentales : gouverner, éduquer et prendre soin. Pourtant, leurs objectifs, impossibles à atteindre, sont les seuls, a-t-il conclu, qui méritent d’être poursuivis. Tous les trois (gouvernement, éducation et soins) sont impliqués dans le mot rythmeparmi les plus anciennes au monde, devenue désormais nécessaire et urgente. Comme le pape François le prévient, nous ne sommes pas confrontés à une ère de crise mais à la crise d’une époque, à un effondrement soudain, qui implique tout le monde. D’où l’invitation à rester humain.

Mais sommes-nous capables de penser en termes d’« humanité » ? La pensée des femmes a démontré (je fais référence notamment au livre Malgré Platon de la philosophe Adriana Cavarero, Castelvecchi) qui le concept universel de l’Homme (avec un U majuscule) apparemment neutre, dans l’histoire de la pensée, elle ne concernait que les hommes libres et adultes, excluant l’autre moitié du ciel : le genre féminin. Un genre pensé et modélisé du point de vue des hommes, introjectant leurs évaluations, partageant leurs objectifs.

Il y a eu, historiquement, des exceptions notables mais, de manière générale, la communauté des femmes a récemment commencé à penser à partir d’elle-même, à partir de sa propre spécificité : un demi-siècle contre des millénaires de pensée masculine. LEle féminin maternel n’a pas de pouvoir mais de puissance, il ne demande pas d’autorité (qui peut être imposée par la force) mais l’autorité (que seuls d’autres peuvent attribuer). La présence des femmes (qui le sont non pas par registre mais par cohérence avec leur identité féminine et maternelle) intervient à un moment particulièrement difficile, où la pensée humaine se révèle inadéquate à elle-même.

On a l’impression que les conséquences des progrès techniques et scientifiques, comme les algorithmes, le multivers, l’intelligence artificielle ou la robotique la plus avancée, dépassent nos possibilités de contrôle. De plus, même lorsque nous parvenons à comprendre rationnellement, nous sommes incapables de comprendre, de nous sentir émotionnellement impliqués dans la réalité, qui n’est pas seulement environnante, mais extérieure et intérieure à nous. Au contraste entre intérieur et extérieur, micro et macrocosme, en particulier, le corps féminin est enlevé, régi par des cycles cosmiques, liés aux phases de la lune, au diapason des marées, sensible à l’alternance des saisons, proche de ce que les anciens appelaient Anima Monde. Et en même temps acteur de la société, impliqué dans ses contradictions.

Tout ce que nous pensions séparé s’est avéré interconnecté, tout ce que nous pensions rassurant s’est avéré inquiétant. Même le concept de « nature » a perdu sa fonction de validation et la législation mise en œuvre à partir d’Aristote. Puisque la Terre Mère a été profanée par une conception mécaniste du monde, nous nous sentons autorisés à l’exploiter de manière irresponsable. Même si les scientifiques s’efforcent d’expliquer que le désastre écologique est la conséquence de nos comportements, l’implication collective ne s’enclenche pas et la responsabilité n’est pas mobilisée.

Or la fécondité humaine, entrée dans une crise que l’on craint irréversible, nous met face non seulement au risque de perdre le lien le plus enraciné et le plus puissant, le rapport entre les sexes dans la filiation, mais aussi à la disparition possible des notre espèce. Cependant, cette prédiction nous laisse souvent indifférents car elle est reçue par des hommes et des femmes de plus en plus âgés, égoïstes et solitaires. Le désir de générer concerne les deux sexes mais l’image du fils, que j’appelle “l’enfant de la nuit”, il émerge d’abord dans l’imaginaire féminin. Le désir du père entre en jeu plus tard, partageant l’imaginaire du partenaire.

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Mais pour les jeunes femmes, la perspective de la maternité, reportée à plus tard, dépassée par d’autres enjeux – carrière, réussite, popularité – risque de devenir un impensé de notre époque. L’anesthésie du désir de maternité constitue le symptôme le plus représentatif de la crise globale de la modernité tardive. La catastrophe annoncée rappelle la compétition éternelle entre Eros et Thanatos, Amour et Haine, Principe de vie et Principe de mort, une conception antagoniste du monde qui commence avec Empédocle et continue, en passant par Platon et Aristote, jusqu’à et au-delà de Freud. Il ne fait aucun doute que la guerre d’agression est du côté de la haine, du mal, du principe de mort, surtout quand le but devient la guerre elle-même, quand la fin n’est pas prévue, ni les limites et les mesures envisagées pour son déroulement inexorable. Dans cet éternel conflit l’intervention de la réflexion féminine se place du côté du Principe de vie, d’Eros, non pas de manière abstraite et impersonnelle mais en donnant voix à une « pensée incarnée », selon une conception centrale du verbe chrétien. , même s’il est compris ici dans un sens purement terrestre.

Comme je l’ai mentionné, lorsque je parle de « pensée maternelle », je ne fais pas référence exclusivement aux femmes qui ont des enfants mais je considère qu’il s’agit d’un potentiel de toutes les femmes en tant que telles. Dans la conviction que la pensée est corporelle et que le corps pense, comme en témoignent les expériences mystiques, je vous invite à considérer le corps et l’esprit féminins caractérisés, non par la nécessité, mais par une disposition autonome et libre à penser et à agir maternellement. La maternité trouve son modèle dans la véritable procréation, dans le sens créatif de mettre au monde un individu unique, irremplaçable, incomparable, égal à lui-même, un « chef-d’œuvre », au sens artistique du terme. Comme l’écrit Adrienne Rich : « Toute vie humaine sur notre planète provient des femmes. La seule expérience fédératrice et incontournable partagée par tous, hommes et femmes, est la période passée à nous former dans le ventre d’une femme… Tout au long de la vie et même dans la mort, nous gardons l’empreinte de cette expérience.

Avec ce constat, jusqu’ici incontournable, nous sommes arrivés, de la singularité de chaque né, à une dimension universelle, celle de l’humanité née entièrement de corps féminins et maternels. Soi la condition d’un enfant constitue une dimension universelle, il en va de même pour la condition de mère, étendue à toutes les femmes en tant que porteuses d’un programme de vie qui représente, dans son idéalisation, un paradigme éthique : charnière entre corps et esprit, intérieur et extérieur, conscient et inconscient, nature et culture, identité et altérité, immanence et transcendance, la maternité est un laboratoire ouvert de pensées et d’images.

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«Comme tout archétype – écrit Jung – l’archétype maternel a aussi une quantité presque infinie d’aspects». Aspects ambigus et contradictoires révélés paret les figures de la sorcière et de la belle-mère qui se cachent derrière la Fée et la Mère. Néanmoins, le processus de « mise au monde », de « donner naissance », comporte des éléments positifs qui s’opposent à Thanatos, au caractère destructeur de la guerre, au nihilisme du non-sens, à la prédominance du négatif qui génère et perpétue les conflits. La dialectique de la reconnaissance mutuelle, qui constitue la condition préalable à la Paix, se réalise facilement entre les femmes au nom de l’identité maternelle qui les unit au-delà des langues, des frontières, des différences sociales, des idéologies, des coutumes. La mère, comme principe de Vie, ne rentre pas dans la logique meurtrière de la guerre. Rappelez-vous le film Sauver le soldat Ryan?

Pourtant, la guerre, en envoyant des jeunes à la mort, affecte avant tout les mères qui, dans le deuil, s’unissent et combattent ensemble, comme dans le cas des Femmes en noir et des Mères de la Plaza de Majo. Mais pourquoi ne pas le faire plus tôt, alors que les enfants sont en vie ? Pourquoi pas maintenant? Penser, ressentir, parler et agir conformément à son identité de genre est performatif et transformateur. Les femmes s’allient plus facilement lorsque, échappant à la logique masculine qui divise et oppose, elles se reconnaissent semblables, proches, fluides comme l’eau dans l’eau. Les pensées et les émotions se développent même sans penseur, quel que soit celui qui les a produites, jusqu’à ce qu’un esprit les accueille, suspendant les défenses immunitaires constituées d’habitudes, de stéréotypes et de préjugés. Cela vaut pour tout le monde mais en particulier pour la généalogie féminine. Tandis que les hommes traversent les corps du sexe opposé, les femmes se contiennent, comme les poupées matriochkas russes.

Penser la Paix, Prier pour la Paix, témoigner de la Paix au nom d’une identité féminine et maternelle produit un écho qui traverse les frontières des nations pour atteindre les femmes qui vivent isolées dans les immenses plaines de la steppe russe, dans les montagnes du Caucase ou en Sibérie, ainsi que dans les villes et villages ukrainiens touchés, parfois détruits, par les bombes. Leurs gestes sont les nôtres, leurs passions nous appartiennent. Nous ne les connaîtrons sans doute jamais mais si nous les évoquons en nous, si nous éprouvons des sentiments de sororité à leur égard, nous pourrons prononcer ensemble le mot Paix ( mire en russe et en ukrainien), une aspiration à la Vie qui, si elle est partagée, peut changer le cours de l’histoire. Comme l’écrit Gabriella Galzio, dans La prière sombre: “le matériau mère mesure la forme/formule madre magra di dio/dita lacera lamina fera/avida Vivida rudida giara/femina trepida rapide piena/tear light : luce legera”.

5 janvier 2024 (modifié le 5 janvier 2024 | 18h16)



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