La moitié de la population mondiale craint la torture en cas d’arrestation. Ce chiffre, révélé par Amnesty International, nous rappelle que personne, nulle part, n’est à l’abri. Partout dans le monde, l’État peut se transformer en agresseur.
Que faire lorsque le système se retourne contre l’individu? Que faire lorsque la police frappe les détenus avec des matraques en Biélorussie, que l’armée tire sur les manifestants au Tchad, que la justice emprisonne sans raison, viole ou assassine? Les tortionnaires ne sont pas seuls, l’institution les soutient. La peur des représailles réduit au silence les survivants.
Le lundi 26 juin est la Journée mondiale pour les victimes de la torture. C’est l’occasion de donner un nom à cette violence extrême. Si la torture existe encore en 2023, c’est à cause du tabou qui l’entoure. Lorsque les victimes surmontent leur peur de leurs tortionnaires, elles font face à la crainte de ne pas être écoutées, crues ou simplement de choquer. En se taisant, elles s’excluent et protègent malgré elles les coupables. En nous taisant, nous contribuons à rendre les coupables invisibles.
“La moitié de la population mondiale craint la torture en cas d’arrestation.”
Les régimes autoritaires discréditent les rares voix qui s’élèvent malgré la peur. Grâce à une propagande bien huilée, les manifestants pacifiques deviennent des terroristes, les victimes d’enlèvement mentent et les coupables deviennent des ennemis du pouvoir.
Les défenseurs des droits humains dénoncent cette manipulation des faits. À travers notre réseau de 200 organisations dans le monde, nous faisons tout notre possible pour les soutenir. Mais nous constatons que leur quotidien se détériore chaque jour. La police les arrête, les harcèle, fouille leurs bureaux et détruit leurs habitations.
Nous vivons une période de recrudescence de la violence, avec le plus grand nombre de conflits armés dans le monde depuis la Seconde Guerre mondiale. Ces contextes d’insécurité contribuent à banaliser la torture, qui peut survenir dans des pays auxquels on ne s’attend pas. La violence policière en France et aux États-Unis en est un exemple. La torture rompt le contrat de confiance entre l’individu et l’État. Elle crée une fracture invisible au début, mais qui mène inévitablement à l’absence de justice et à l’instabilité.
En 2023, il est crucial que la torture disparaisse et nous savons que c’est possible. Avec nos partenaires, nous protégeons les victimes et les soutenons dans leur réintégration. Nous établissons des systèmes de protection et de prévention de la torture dans le monde entier. Unis contre la torture est l’initiative de six organisations leaders dans le domaine des droits humains, présentes dans plus de 100 pays. Ensemble, nos voix sont puissantes, mais avec vous, elles le sont encore plus. Ce 26 juin, nous vous appelons à nous rejoindre sur les réseaux sociaux avec le hashtag #UnisContreLaTorture. Parler de la torture est le premier pas vers la normalisation du témoignage des survivants et pour les aider à se reconstruire. Ensemble, faisons ce premier pas, brisons le silence et unissons-nous pour la sécurité, la liberté d’expression et la paix.
– La torture, ce crime aux victimes invisibles
Gerald Staberock – Secrétaire général de l’OMCT