La pop star Peso Pluma, qui fait l’éloge de “El Chapo”, menacée par un cartel rival

Le chanteur mexicain Peso Pluma est devenu l’un des groupes musicaux les plus populaires de la planète, en partie grâce à sa glorification du monde du trafic de drogue.

Il chante sur les pistolets incrustés de diamants, les expéditions de cocaïne en contrebande et l’envoi de ceux qui le croisent « au cimetière ».

Dans le clip de la chanson à succès de l’année dernière « Siempre Pendientes » ou « Always Ready », l’artiste à la voix grave brandit une mitrailleuse et raconte l’histoire d’un fantassin pour Joaquín « El Chapo » Guzmán. C’est l’une des nombreuses chansons du musicien qui font l’éloge du fondateur du cartel de la drogue de Sinaloa.

Aujourd’hui, le chanteur de 24 ans semble s’être heurté à un gang de drogue rival.

Mardi, quatre grandes banderoles sont apparues simultanément dans différents quartiers de Tijuana, avertissant Peso Pluma d’annuler son concert prévu dans la ville le 14 octobre.

Les banderoles manuscrites critiquaient l’artiste, de son vrai nom Hassan Emilio Kabande Laija, pour son « langage irrespectueux et lâche » et prévenaient que s’il ne se retirait pas du spectacle, ce serait son dernier.

Les menaces étaient signées des lettres CJNG, les initiales espagnoles du cartel Jalisco New Generation, qui est le principal adversaire de Sinaloa à Tijuana et dans une grande partie du pays.

Les banderoles, sur lesquelles la police enquête, rappellent les risques liés à la réalisation des narcocorridos, ou ballades sur la drogue, que chantent Peso Pluma et bien d’autres.

Et la controverse alimente une guerre culturelle de longue date sur la pertinence d’une musique qui exalte les gangs de drogue dans un pays si profondément ravagé par le crime organisé.

Les corridos, qui remontent au Mexique rural du XIXe siècle, sont l’une des plus anciennes traditions musicales du pays. Initialement connus pour raconter des histoires héroïques de bandits et de hors-la-loi, ils ont finalement commencé à mythifier les trafiquants de drogue qui gagnaient rapidement en influence à travers le pays. Parfois, les gangsters payaient des chanteurs pour qu’ils leur rendent hommage avec une chanson.

Les musiciens qui se consacrent à ce genre font depuis longtemps face aux réactions négatives du gouvernement qui, depuis les années 1980, tente, de diverses manières, d’interdire cette musique.

Mais les menaces les plus graves proviennent du crime organisé lui-même.

Des dizaines de stars du Narcocorrido ont été tuées ici, parfois par des rivaux des tueurs à gages et des trafiquants de drogue qu’ils ont glorifiés dans leurs chansons.

Les nouvelles menaces contre Peso Pluma font la une des journaux car il est l’une des jeunes stars les plus appréciées du Mexique.

Boosté par ses légions de fans sur TikTok, Peso Pluma a accédé à une renommée mondiale, devenant cette année l’un des artistes les plus écoutés sur Spotify, où il compte plus de 50 millions d’auditeurs par mois. Le chanteur a joué à Coachella et dans l’émission « The Tonight Show Starring Jimmy Fallon » et est devenu cette semaine le premier musicien régional mexicain à se produire aux MTV Video Music Awards.

Peso Pluma se produit au YouTube Theatre de Los Angeles le 23 juillet.

(Dania Maxwell/Los Angeles Times)

Alors que la culture narcocorrido était autrefois largement confinée au nord du Mexique et aux communautés d’immigrés des États-Unis, le chanteur dégingandé de Guadalajara – dont le nom de scène se traduit par « Poids plume » – est à l’avant-garde d’une nouvelle génération de musiciens qui réinventent le genre et le poussent vers le haut. de nouvelles hauteurs.

Dimanche soir, le chanteur a clôturé un important festival de musique à Mexico dédié aux « corridos tumbados », comme on appelle la nouvelle génération de narcocorridos.

Portant d’épaisses chaînes en or, avec son mulet emblématique caché derrière une casquette de baseball noire, le chanteur a parcouru ses tubes. Certaines d’entre elles sont des chansons d’amour, d’autres des odes à la pègre du narco.

Alors qu’il chantait les paroles de « El Gavilán » ou « The Hawk », une autre chanson sur un trafiquant fidèle à Guzmán, des dizaines de milliers de spectateurs l’ont chanté.

Beaucoup pensent que c’est cette performance qui pourrait avoir déclenché les menaces de Tijuana.

Peso Pluma n’a pas abordé l’incident.

Carlos Acevedo, porte-parole du bureau du procureur de Basse-Californie, a déclaré que la police avait arrêté une personne en lien avec les menaces, un homme que la police avait observé en train de manipuler l’une des banderoles.

Le maire de Tijuana, Montserrat Caballero Ramírez, a déclaré que la ville déterminerait dans les prochains jours si le concert devait être annulé, ce qui, selon elle, pourrait mettre les participants en danger.

“Nous savons que des chanteurs comme (…) Peso Pluma prônent le crime”, a-t-elle déclaré à un groupe de journalistes. “Malheureusement, ceux qui en subissent les conséquences sont les citoyens.”

Plus tôt cette année, un groupe de narcocorrido de l’État de Sinaloa appelé Grupo Arriesgado se trouvait dans un centre commercial de Tijuana pour signer des autographes avant un concert prévu lorsque des hommes armés ont tiré près de la foule. Une banderole signée par le cartel de Jalisco et déposée sur les lieux avertissait le groupe de quitter la ville sous peine d’en subir les conséquences. Le groupe a annulé son spectacle.

Caballero a déclaré qu’elle ne soutenait pas une interdiction pure et simple des spectacles de narcocorridos, que d’autres villes, dont Cancun, ont récemment promulguée.

« Les parents sont responsables de ce que nos enfants écoutent », a-t-elle déclaré.

Mais elle a exhorté les fans du genre à s’interroger sur leurs goûts. « Pourquoi se voient-ils projetés dans ces chansons ?

Peso Pluma a souvent éludé les questions sur le contenu violent de sa musique. Plus tôt cette année, il a raccroché au nez d’un journaliste du Times qui lui avait posé des questions à ce sujet lors d’une interview.

Mais il semble se considérer comme faisant partie d’une longue lignée de musiciens – du rap au reggaeton – qui ont reflété la réalité vécue, aussi complexe ou controversée soit-elle.

“Les corridos ont toujours été très attaqués et très diabolisés”, a-t-il déclaré à l’Associated Press après s’être produit à Coachella en avril. “En fin de compte, c’est la musique.”

Cecilia Sánchez Vidal du bureau du Times à Mexico a contribué à ce rapport.