Récit
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Par leur hésitation, la peur d’une montée de l’extrême droite ou leur enfermement dans des préjugés sur les classes populaires, de nombreux responsables de gauche ont raté la mobilisation, dont ils revendiquent pourtant l’héritage.
Les mots d’Édouard Louis ont laissé une marque. “Je me sentais personnellement visé par le mépris et la violence de la bourgeoisie qui se sont immédiatement abattus sur ce mouvement. Parce que, en moi, pour moi, chaque personne qui insultait un gilet jauneinsultait mon père,” écrivait l’auteur sur Facebook en 2018. Damien Maquet, alors étudiant, a 22 ans lorsque le mouvement de protestation éclate en France. Pour la première fois de sa vie, il voit sa mère se préparer à participer à une manifestation, chez eux, en Corrèze. “Je me suis dit qu’il se passait quelque chose, raconte-t-il. Les gilets jaunes ont réussi à faire sortir des gens qui n’étaient jamais sortis.”
À 600 kilomètres de là, Philippe Brun sort de l’ENA. Le futur député socialiste attend son classement et l’affectation qui en découle, chez lui, à Louviers, dans l’Eure, quand il voit ses réseaux sociaux s’animer. “J’ai été sur les ronds-points et ça a changé ma vie, raconte-t-il. Beaucoup de socialistes locaux disaient qu’il ne fallait pas y aller, que c’était un truc de facho. Je suis arrivé au péage à côté de