Mohamed Abou Al Kacem Zouiyyi, ancien président du « Congrès général du peuple libyen » (Parlement) et ministre libyen résident au royaume, a fourni des détails sur la création de l’Union arabo-africaine entre le Maroc et la Libye le 13 août 1984, dans ses mémoires diffusées sur la chaîne saoudienne Al Arabiya. Zouiyyi était d’ailleurs l’émissaire entre Hassan II et Kadhafi.
Selon Zouiyyi, tout a commencé avec la mission que Kadhafi lui avait confiée, consistant à remettre des lettres aux chefs d’État de la Tunisie, de l’Algérie, du Maroc et de la Mauritanie. Lors de sa visite au Maroc le 13 avril 1984, il a été reçu par le roi feu Hassan II, qui a attentivement lu le message portant sur l’importance de l’unité arabe et de la libération de la Palestine.
Hassan II a attribué l’échec des précédentes expériences d’unité à Kadhafi, en expliquant que les dirigeants arabes appréhendaient ses initiatives. Il a alors proposé de conclure une unité entre les deux pays, ce qui a surpris Zouiyyi.
Il est à rappeler qu’en 1971, Kadhafi était à l’origine de la création de l’Union des Républiques arabes (URA), réunissant la Libye, l’Égypte et la Syrie. En 1973, il s’était tourné vers la Tunisie avec la naissance de la République arabe islamique. En juillet 1973, il avait également tenté une réconciliation avec Le Caire en organisant une grande marche d’unité, mais elle avait été bloquée par l’armée égyptienne.
L’offre de Hassan II a suscité des interrogations chez Kadhafi à Tripoli. Il se demandait si les Américains, les Israéliens ou les Français étaient derrière cette proposition. Malgré ses appréhensions, Kadhafi a ordonné à Zouiyyi de se rendre au Maroc pour clarifier certaines questions. Hassan II a précisé ses intentions à l’émissaire libyen en soulignant que sa proposition portait sur une « union » entre les deux pays et non une « unité ». Cette clarification a soulagé Kadhafi. Le roi a également proposé d’ouvrir l’union aux États africains, d’où son appellation Union arabo-africaine.
Des réunions bilatérales ont ensuite eu lieu jusqu’à la proclamation officielle de la naissance de l’union le 13 août 1984 à Oujda, marquant la fin de l’aide financière et militaire de la Libye au Polisario. Cependant, l’union a été suspendue unilatéralement par le monarque dans le sillage des réactions au tumulte soulevé dans le monde arabe suite aux entretiens entre le roi Hassan II et le Premier ministre israélien, Shimon Pérès, en juillet 1986 à Ifrane.
Zouiyyi a également cherché à disculper Kadhafi d’être l’auteur du communiqué syro-libyen condamnant la réunion entre Hassan II et Pérès, publié à l’issue de la visite du président syrien Hafez Al Assad. Il a accusé nommément le colonel Abdessalam Jelloud, ancien numéro deux en Libye, affirmant qu’il n’aimait pas le Maroc et était très proche de l’Algérie. Cependant, malgré leurs divergences sur le dossier marocain, les deux proches de Kadhafi s’accordent à dire que la création du Polisario en 1972 et de la « RASD » en 1976 était exclusivement l’œuvre de Kadhafi et non de l’Algérie. Kadhafi voulait ainsi riposter au soutien de Hassan à l’opposition libyenne, a précisé Mohamed Abou Al Kacem Zouiyyi.
