Harcèlement scolaire : des collégiens brétiliens récompensés !

Ils s’appellent Leo, Jonathan, Enora, Lowen, Albane, Léna, Noé, Lilian… Ils sont élèves au collège Evariste Gallois de Montauban-de-Bretagne, en Ille-et-Vilaine, et leur vidéo contre le harcèlement scolaire vient de recevoir le Prix coup de cœur de l’académie de Rennes. Particularité : ces collégiens ont pour la plupart eux-mêmes subi du harcèlement scolaire, et tenaient à s’investir dans ce projet : “pour nous, cette vidéo était importante pour essayer de sensibiliser, d’émouvoir sur le harcèlement. Il faut montrer que c’est quelque chose qui est dangereux. Il faut en faire un sujet important et pour ça, il faut sensibiliser et c’est ce qu’on a essayé de faire…

“Il y a quand même des cas où les personnes le disent et il n’y a rien qui suit derrière”

Il faut oser parler : si tu n’oses pas parler, ett au bout d’un moment tu en as marre… et soit tu vas demander à tes parents de te déscolariser, ou soit même aller en haut d’un pont et se suicider…. Cela prend une place dans notre vie qui est quand même très grande. On vit que dans ce monde-là où on est harcelés à cause d’une personne ou d’un groupe, cela détruit une vie, une personne qui n’a rien demandé. C’est quand même assez fou qu’on puisse laisser passer ça. Il y a quand même des cas où les personnes le disent et il n’y a rien qui suit derrière, il n’y a pas de suivi.”

Plein phare sur le dispositif “PHARE”

Les vidéos et les affiches produites dans le cadre de ce prix servent de support au “Programme de lutte contre le harcèlement à l’école“, le programme “PHARE“, dont le déploiement se poursuit, dans les écoles et les collèges. Un déploiement qui demandait plusieurs années, pour obtenir un dispositif efficace, comme le souligne Emmanuel Ethis, recteur de l’Académie de Rennes : “c‘est un dispositif qui implique qu’on soit avec des personnes formées, aptes à repérer les situations de harcèlement, à réagir dans de bonnes conditions face à une situation de harcèlement … ce qui sous-entend toute une chaîne de coopération au sein même de nos établissements. Cela sous-entend qu’on puisse impliquer tout le monde, c’est à dire une formation qui se fait au fur et à mesure de façon assez massive, y compris en visio dans notre académie. Aujourd’hui, on est plutôt dans une situation où pratiquement tous les établissements ont reçu cette formation et mettent en place le dispositif “Phare”.“

Une heure de sensibilisation au harcèlement scolaire, dans tous les collèges, dès cette semaine : c’est ce qu’a demandé le ministre de l’Education nationale, après plusieurs cas dramatiques, et notamment le suicide de la jeune Lindsay, il y a un mois.

Le harcèlement est un phénomène de groupe

Un travail de fond est déjà entamé, avec d’ailleurs un peu d’avance dans l’Académie de Rennes, académie test pour le programme de lutte contre le harcèlement, le programme “PHARE“. Il s’agit de constituer des équipes de 5 personnels par établissement, des personnels formés spécialement, à raison de 8 journées réparties sur deux ans. Une formation indispensable, comme l’explique Cécile Humbert Mohammedi et Olivier Le Magoarou, référents harcèlement de l’Académie de Rennes : “on parle de harcèlement scolaire et de harcèlement scolaire, c’est avant tout un phénomène de groupe. Il y a donc tout un travail de connaissances à développer autour de la psychologie de l’enfant, de l’adolescent, du fonctionnement du groupe et de la place que prend le groupe, notamment chez les adolescents…

C’est une véritable formation pour pouvoir adapter les gestes et les mots, qui sont en accord avec les entretiens qu’ils doivent mener à la fois avec l’élève cible et puis avec les harceleurs. Pour la partie prévention, on intègre les parents avec des ateliers de parents, on intègre des sensibilisations à tous les personnels de l’établissement… c’est un travail de longue haleine. “

Ne pas minimiser la souffrance !

L’objectif du programme PHARE est de former des enseignants à repérer et à gérer des situations de harcèlement, mais aussi de sensibiliser les élèves, et les parents. Pour Cécile Humbert Mohammedi, coréférente académique harcèlement, la prise de conscience est à l’œuvre, chez les adultes, même si certains préjugés ont la peau dure : “pour nous, cela semble être des chamailleries et c’est souvent ce qu’on leur dit. Ça va passer, ils vont grandir, ils ne sont pas matures, mais pourquoi tu ne te défends pas ? Ça, c’est une parole très malheureuse parce que déjà la victime est en souffrance et en plus, ça la culpabilise parce que finalement, c’est de sa faute si elle est harcelée parce qu’elle ne se défend pas…

On a tellement l’habitude de prononcer et de minimiser cette souffrance : certains jeunes ne savent pas ou n’ont pas l’habitude d’exprimer leurs émotions et il faut qu’on travaille sur cette expression des émotions. C’est quelque chose qui est assez nouveau, mais qui se répand de plus en plus à l’école.”

Le programme de lutte contre le harcèlement devrait être déployé dans toutes les écoles et collèges de l’Académie de Rennes d’ici juin 2024. Les lycées entreront à leur tour dans le dispositif à partir de la rentrée de septembre.

Les deux numéros verts à l’usage des élèves, des parents et des professionnels : le 3020 pour le harcèlement, et le 3018 pour les cas spécifiques de cyberviolence.