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Contradictions dans l’industrie du jeu vidéo : succès financier et vague de licenciements

Contradictions dans l’industrie du jeu vidéo : succès financier et vague de licenciements

Du 1er au 5 novembre, la capitale française accueille la Paris Games Week, le plus grand salon français du jeu vidéo. À la fin du mois, c’est à Abidjan, en Côte d’Ivoire, que se tiendra le festival de l’électronique et du jeu vidéo d’Afrique. L’occasion de prendre le pouls d’un secteur qui en apparence affiche une santé financière insolente mais qui, en même temps, multiplie les licenciements.

Publié le : 01/11/2023 – 06:23
Temps de lecture: 5 minutes

Sous certains aspects, cette année est l’une des meilleures – certains osent même dire « la » meilleure – de l’histoire du jeu vidéo. Le millésime 2023 est en effet exceptionnel : cette année sont sortis Zelda Les Larmes du Royaume, La porte de Baldur 3, Diablo 4, Champ d’étoiles, Homme araignée 2 (qui comme son nom ne l’indique pas est le troisième épisode de la série), Super Mario Merveille, Assassin’s Creed Mirage… Beaucoup ont été encensés par la critique mais tous, sans exception, se sont vendus à plus d’un million d’exemplaires, parfois en quelques jours (ou quelques heures) à peine. Il faut y ajouter les franchises à succès dont un nouvel épisode sort tous les ans : EA Sports FC 24 (qui succède à la série des FIFA) et le dernier Call of Duty, Guerre moderne 3 attendu le 10 novembre. Une licence aux 450 millions d’exemplaires vendus passée depuis le 13 octobre dans le giron de Xbox après que la plus grosse acquisition de l’histoire du secteur a été définitivement validée : Microsoft a avalé Activision Blizzard pour 69 milliards de dollars. Un dernier chiffre : au total, l’industrie du jeu vidéo pèse plus de 215 milliards de dollars, deux fois plus que le cinéma et même huit fois plus que l’industrie musicale.

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Vague de licenciements

Et pourtant, il n’y a pas eu une seule semaine en 2023 sans annonce de licenciements ou de fermeture de studios. À tel point qu’un développeur a créé un site internet recensant toutes les annonces du genre. Fin octobre, il en dénombrait 120, avec à chaque fois entre une poignée et jusqu’à plusieurs centaines de personnes licenciées. Personne n’est épargné : même Epic Games, qui possède pourtant Fortnite – soit ce qui se rapproche le plus d’une poule aux œufs d’or numérique (le jeu a rapporté 6 milliards de dollars l’an dernier) – a annoncé plus de 800 suppressions de postes en septembre. Dernier en date, on a appris cette semaine que le studio Bungie, racheté par Sony pour plus de 3 milliards de dollars l’an dernier pour répondre au rachat d’Activision par Microsoft, allait aussi licencier une partie de ses équipes. Le phénomène a pris une telle ampleur que le site spécialisé TheGamer a proposé une version type (et grinçante) des communiqués publiés par les studios pour annoncer ces dégraissages. « Il est difficile de perdre des amis au travail, mais nous savons dans nos cœurs que nos employés dévoués auront trop peur pour ne pas reprendre à leur compte le travail de cinq personnes », parodient-ils.

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Le Covid a joué un double rôle dans la situation actuelle

Comment expliquer cette apparente contradiction ? Le premier facteur explicatif est à chercher du côté de la pandémie de Covid-19. Quand les gouvernements paniqués face à la propagation du virus mettaient en place des confinements, les jeux vidéo se sont soudainement trouvés parés de toutes les qualités : une activité culturelle à pratiquer chez soi permettant de maintenir un lien social malgré la distance mais aussi pouvant occuper les enfants quand les écoles restaient fermées. Résultat, la pratique a bondi et le phénomène est venu gonfler les ventes. Ainsi, les éditeurs ont commis l’erreur de penser qu’il durerait éternellement et ont multiplié les recrutements. En ce sens, la vague de licenciements en cours dans le jeu vidéo est similaire à celle qu’a connue le secteur de la tech dans son ensemble en 2022.

Le Covid a aussi perturbé le processus de développement de nombreux jeux très attendus dont la sortie a été repoussée à 2023. C’est le cas de Starfield, première nouvelle licence du studio Bethesda depuis 25 ans, dont la sortie initiale en novembre 2022 a été repoussée de 10 mois. Les exemples ne manquent pas et c’est en partie ce qui explique l’embouteillage de sorties auquel on assiste cette année. D’autant que le jeu vidéo est très loin de se limiter aux grosses productions : sur Steam, la principale plateforme de vente sur ordinateur, 13 500 jeux sont sortis cette année (contre 12 500 en 2022). 80% ont généré moins de 5 000 dollars de revenus. Et comme au cinéma, le succès des gros blockbusters se fait parfois aux dépens de plus petites productions. C’est même pire : les blockbusters du jeu vidéo offrent des dizaines, voire des centaines, d’heures de jeu et le temps des joueurs n’est pas extensible à l’infini.

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« 81 millions de dollars par développeur licencié »

Et puis il y a le climat économique général : l’inflation pèse sur le budget des joueurs. Leur porte-monnaie non plus n’est pas extensible à l’infini. L’inflation a surtout entraîné une hausse des taux d’intérêts qui a rendu les investisseurs plus frileux. Le développement d’un jeu prend des années, coûte souvent très cher et dans le climat actuel, certains studios ont préféré annuler des projets en cours dont la rentabilité était plus difficile à garantir. Et ce sont les développeurs qui en payent le prix. Le consultant néerlandais d’origine égyptienne Rami Ismail, l’une des voix les plus respectées de l’industrie, s’est amusé à un calcul un peu absurde mais très parlant : « En 2023, l’industrie du jeu vidéo devrait générer plus de 490 milliards de dollars de revenus. Soit 81 millions de dollars par développeur licencié ».

À écouter aussi : Vous m’en direz des nouvelles – «Création Africa», l’Afrique le nouveau continent du jeu vidéo
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