2023-10-19 13:36:03
“J’ai dû enjamber les morts et entrer dans le sang, le cerveau et les intestins”
Afin de sauver son empire, Napoléon Ier s’installe définitivement près de Leipzig en octobre 1813. Là, il voulait battre ses adversaires individuellement. Mais les erreurs et les coïncidences ont fait de la bataille des nations qui a suivi une catastrophe pour les Français.
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EEn fait, Napoléon Ier avait de bonnes chances de briser la coalition de ses adversaires avec sa nouvelle Grande Armée, un an après son retrait désastreux de Moscou. Tout au long de 1813, il avait réussi à tenir à distance leurs différentes armées. En août, il remporta même une grande victoire sur les Autrichiens et les Russes près de Dresde. Son projet de déployer des troupes autour de Leipzig le 16 octobre démontre une fois de plus sa classe militaire.
L’armée française, forte de 191 000 soldats, était dépassée en nombre par les 206 000 alliés russes, prussiens, autrichiens et suédois. Mais Napoléon avait l’avantage de la ligne intérieure et était capable de déplacer des renforts et d’établir des points focaux plus rapidement que ses adversaires. Il était donc important de vaincre les troupes ennemies les unes après les autres avant qu’elles puissent s’unir.
Cependant, l’empereur ne pouvait plus empêcher leur marche. Il manquait de réserves pour cela, alors que d’autres renforts arrivaient derrière les unités ennemies. Le refus de Napoléon de reprendre les garnisons françaises des forteresses de l’Elbe et de l’arrière-pays fut plus tard noté comme la première entrée sur sa liste d’erreurs.
La principale armée alliée sous le commandement du maréchal autrichien Schwarzenberg avança péniblement du sud, de la Bohême, vers Leipzig. L’armée du Nord dirigée par le prince héritier suédois Karl Johann fit des progrès encore plus hésitants. Leur commandant, qui fut maréchal de France sous le nom de Jean-Baptiste Bernadotte jusqu’en 1810, se montra peu intéressé à lutter contre ses anciens camarades. L’armée silésienne du général prussien Blücher, en revanche, a agi de manière complètement différente. Il réussit à échapper d’un seul tour à un coup rapide de Napoléon et marcha maintenant d’urgence du nord-ouest jusqu’à Leipzig.
Napoléon laisse la couverture contre Karl Johann et Blücher à ses maréchaux Ney, Bertrand et Marmont et à leurs corps, tandis qu’il se concentre entièrement sur la frappe contre Schwarzenberg. Cette action semble avoir été couronnée de succès le 16 octobre. Les unités alliées ne prirent pas position en bloc, mais progressivement. La présence des trois monarques – le tsar russe Alexandre, l’empereur autrichien François Ier et le roi Friedrich Wilhelm III. de Prusse – au quartier général de Schwarzenberg n’a pas non plus contribué à une prise de décision rapide.
Napoléon aurait probablement remporté la victoire dans le sud ce jour-là s’il avait pu utiliser ses réserves pour avancer dans les brèches béantes du front ennemi. Il l’avait également demandé à Marmont. Mais Blücher empêche leur départ. Les Prussiens entraînèrent les Français dans une bataille acharnée autour de la ville de Möckern, de sorte que Marmont dut même demander de l’aide à Ney. Les Prussiens restent victorieux et gagnent une position près de Leipzig, tandis que Napoléon manque de troupes pour exploiter ses succès dans le sud.
Les lourdes pertes incitent les deux camps à consolider et à réapprovisionner leurs lignes le 17 octobre. Dans le même temps, les commandants russes et prussiens, dont les troupes étaient subordonnées à l’armée du Nord, poussèrent à avancer. Des renforts supplémentaires ont permis aux alliés de rassembler 295 000 soldats le 18 octobre, alors que Napoléon n’a pu en rassembler que 160 000.
Ce 18 octobre, l’Empereur des Français se rend vite compte que la victoire n’est guère possible. Bien que ses soldats dans le sud aient conservé dans une certaine mesure leurs positions réduites, ses hommes au nord et à l’est ont subi une pression croissante. Blücher en particulier fait honneur à son surnom de « maréchal en avant » et dirige ses troupes vers la porte de Halle à Leipzig. Dans l’après-midi, les troupes saxonnes de la Grande Armée font défection vers les alliés.
On ne pouvait plus parler d’une bataille qui servirait d’exemple aux académies militaires. C’est leur masse qui a permis aux Alliés de submerger la Grande Armée. Les pertes étaient correspondantes. « J’ai dû enjamber et écraser les morts et j’ai pénétré dans le sang, la cervelle et les intestins des Français qui gisaient abattus, déchirés et abattus », a écrit un témoin oculaire. Le nombre de tués et de blessés des deux côtés est estimé entre 80 000 et 100 000.
Dans la nuit du 19 octobre, Napoléon organise la marche vers l’ouest, où ses adversaires lui ont délibérément laissé une échappatoire. La fuite ordonnée s’est transformée en chaos lorsque les sapeurs ont fait sauter le pont sur l’Elster, même si des dizaines de milliers de soldats sont restés sur la rive est. Peu de temps après, les monarques alliés entrèrent à Leipzig. Mais Napoléon a pu sauver les restes de sa Grande Armée de l’autre côté du Rhin après avoir balayé l’armée bavaroise qui tentait de lui barrer la route près de Hanau.
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Cet article a été initialement publié en octobre 2021.
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