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À Angoulême, un arrêté anti-marginaux devant la justice

À Angoulême, un arrêté anti-marginaux devant la justice

Une municipalité a-t-elle le droit d’interdire à certaines personnes d’occuper l’espace public ? C’est la question à laquelle va devoir répondre le tribunal administratif, qui examine mardi 1er août la légalité d’un arrêté pris par la mairie d’Angoulême et attaqué par plusieurs associations, dont la Ligue des droits de l’homme (LDH).

En vigueur depuis le 12 juillet, cet arrêté prohibe « toute occupation abusive et prolongée » de 22 rues et places aux abords du Champ-de-Mars, accompagnée ou non de mendicité, « lorsqu’elle est de nature à porter atteinte à la tranquillité publique et au bon ordre public ». L’interdiction est prévue chaque jour pendant un an entre 10 heures et 2 heures du matin l’été et entre 10 heures et 21 heures l’hiver. Est considérée comme abusive « l’occupation des voies et espaces publics par des individus regroupés de manière immobile ou peu mobiles »générant des « nuisances (sonores, souillures, dégradations menaces ». La “ station assise ou allongée » voire « la station debout »lorsqu’elle gêne le passage, est aussi interdite, précise l’arrêté. Une amende de 35 € est prévue pour tout contrevenant.

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Déjà des précédents à Angoulême

L’arrêté, qui évoque de « nombreuses plaintes de riverains et commerçants »cible spécifiquement « des groupes d’individus (…) accompagnés ou non d’animaux, qui présentent un comportement perturbateur, provoquant ou d’obstruction », selon l’arrêté, qui précise que « ces groupes s’approprient (…) les trottoirs et les bancs », émettent « des bruits et des vociférations », et laissent sur la voie publique déchets et urine.

En clair, a expliqué, sur France Bleu La RochelleJean-Philippe Pousset, l’adjoint à la sécurité du maire Horizons d’Angoulême Xavier Bonnefont, cette interdiction « vise les marginaux dans quatre secteurs de la ville, ils sont 200 à Angoulême et provoquent de nombreuses infractions : ils boivent alors qu’il y a un arrêté anti-alcool, ils sont souvent avec des chiens, et violents ».

La municipalité n’en est pas à son coup d’essai. En décembre 2014, Xavier Bonnefont avait grillagé des bancs publics, avant de les retirer face au tollé soulevé. Et, en 2020, le maire avait publié un arrêté « antiregroupement », retoqué par la préfecture.

Ce nouvel acte de police municipale, critiqué par l’opposition de gauche, sera-t-il plus durable ? La Ligue des droits de l’homme, qui en demande l’annulation, ne le croit pas. « Il y a plusieurs difficultés dans ce texte, estime Marion Ogier, l’avocate de la LDH. D’abord, la notion de nuisance ouvre la voie à l’arbitraire, on ne sait pas ce qui est autorisé ou pas. Par exemple, est-ce que toute présence prolongée est considérée comme une nuisance ? » De plus, « une mesure de police municipale ne peut être prise que s’il y a déjà eu des troubles en amont ». Surtout, argumente-t-elle, « il faut qu’elle soit proportionnée dans l’espace et dans le temps. Or là, non seulement plus de 20 rues et places sont concernées, mais surtout l’interdiction dure un an, ce qui est extrêmement large. »

Ce que dit le droit

De nombreuses municipalités publient des textes restreignant la présence sur la voie publique. Toutefois, depuis 1994, la mendicité ou le vagabondage ne sont plus des délits, sauf si de l’argent est demandé de manière agressive. Et un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme daté de 2021, concernant la Suisse, est venu confirmer l’impossibilité d’interdire la mendicité. Du coup, les maires qui veulent restreindre la présence de marginaux sur leur territoire édictent plutôt désormais des arrêtés réglementant « l’occupation abusive et prolongée » de rues ou la consommation d’alcool.

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Mais, là encore, la justice en annule un grand nombre. En droit, un maire ne peut en effet réglementer ce type d’occupation de la voie publique que s’il provoque des troubles à l’ordre public, en gênant la circulation par exemple, ou des troubles à la sécurité, ou encore à la salubrité, du fait des détritus jetés. Même dans ce cas, la légalité de l’arrêté n’est pas assurée. « En 2003, concernant la commune de Prades, le Conseil d’État a précisé qu’on pouvait admettre ce type d’arrêté, reprend Marion Ogier, mais uniquement s’il est proportionné à la réalité du risque du trouble, et limité dans le temps et l’espace. Ce qui ne me semble pas être le cas à Angoulême. »

2023-08-01 07:19:03
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