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Renault 1984, le début de l’aventure Espace

Renault 1984, le début de l’aventure Espace

2023-06-02 22:00:05

Au début des années soixante, Matra, firme créée par Jean Luc Lagardère et qui développe ses activités dans le domaine de l’aéronautique et de l’armement, rachète la firme automobile française René Bonet. Cela vous amène dans un double camp. D’un côté, la production d’une voiture de sport, la Matra Djet, et de l’autre, sa présence dans les courses, aussi bien de Formule 1 que de Formule 2, ainsi que des prototypes sportifs, et avec succès : le Championnat des pilotes 1969 avec Stewart ( en fait une voiture semi-officielle de l’équipe Ken Tyrrell et moteur Cosworth) ou trois victoires au Mans (1972, 73 et 74).

Dans les années 1970, Philippe Guédon, patron de Matra Automobile, cherche à se diversifier pour rompre sa dépendance aux modèles sportifs. En s’associant à SIMCA, il voit une opportunité d’aller au-delà de la fabrication de modèles sportifs et ainsi augmenter la rentabilité et assurer la survie de sa marque. Ainsi, en plus de fabriquer la Bagheera, un coupé à mécanique Simca (remplacé par la Murena en 1980), il crée le Rancho, un faux « 4×4 » de loisir (en fait une traction avant) précurseur des « crossovers » ou autres ” SUV ” actuel, basé sur un fourgon Simca 1 100 VF.

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Lancé en mars 1977, ce modèle conçu par Antoine Volanis, designer d’origine grecque, est un succès : les prévisions initiales de 20 000 unités deviendront 56 457 unités vendues jusqu’en 1983 lorsque le dernier Rancho sortira de la chaîne.

Pendant ce temps, Matra était devenue une partie de Peugeot, à la suite du rachat par la marque au lion de Simca-Chrysler, devenue Talbot. Matra Automobile était une filiale de Matra (55%) et Peugeot /45%)

La Lancia Megagamma de Giugiaro

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L’idée du monocorps

Et à partir de l’année 1979, les recherches s’orientent vers un type de véhicule monocuerpo, dans le style du van qui connaît un grand succès aux États-Unis. La Lancia Megagamma de Giugiaro, présentée au salon de Turin 1978, a exploré cette voie. Les Japonais travaillent dans la même lignée, mais à partir de modèles à usage commercial équipés en voitures de tourisme pour les adapter à un usage familial : c’est ainsi que Nissan lance la Prairie.

Mais Matra veut aller plus loin. Il ne s’agit pas de transformer un véhicule utilitaire mais de créer un nouveau type de voiture. Volanis réalise un premier dessin, très conceptuel, qui montre une grande carrosserie à trois portes avec un poste de conduite situé au-dessus des roues avant et le moteur à l’arrière. Il n’arrête pas de se souvenir de la Renault Projet 900, fabriquée en 1959.

Le premier croquis de Volanis

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Mais l’idée est vite rationalisée. Guédon veut proposer son projet à Peugeot. La première rencontre entre les équipes Matra et PSA laisse entrevoir des pistes de collaboration. Pour Jean Boillot, le patron de Peugeot, « cette voiture représente une évolution aussi importante dans le domaine de la carrosserie que le diesel dans celui des moteurs. Et il y a ceux qui l’adopteront et ceux qui ne l’adopteront pas.

La marque demande à Matra de poursuivre ses études sous deux formes : un modèle compact et une version plus longue. Le petit P17 est rapidement abandonné en raison de son espace intérieur limité. La P18, basée sur une plateforme Talbot Solara, avec un moteur transversal 1600, une suspension arrière à roues indépendantes, plus spacieuse et habitable, est intéressante. Cependant, ils laissent passer le temps et finissent par décider qu’ils ne sont pas intéressés.

À Matra, ils n’abandonnent pas. Ils pensent que leur idée peut séduire Citroën, une marque avec une longue histoire de modèles innovants. Le projet est passé en revue. En quelques mois est développé le P20, basé sur le futur Citroën BX, mais la firme au double chevron rejette également le projet.

Le projet P17 de Matra sera rejeté par Peugeot

FP-

Certaines portes se ferment, d’autres s’ouvrent…

Il est clair que la solution “PSA” n’a pas de voie, et si une autre marque était intéressée ?

Jean-Luc Lagardère, président de Matra, réussit enfin une rencontre avec Bernard Hanon, PDG de la Régie Renault, et Christian Martin, chef de produit de la marque au losange. Lagardère les enthousiasme avec son modèle révolutionnaire. Et une voie s’ouvre qui permet aux contacts de se poursuivre tout au long de 1981 et 1982.

Antoine Volanis n’est plus chez Matra. Mais un nouveau projet, l’oeuvre d’Aimé Saugues, successeur de Volanis, inspiré du P18, prend forme. Matra et Renault mettent leurs idées sur la planche à dessin. Pierre Tiberghien, directeur technique de la firme au diamant et Christian Martin, se tournent vers le futur modèle. La nouvelle Matra P 23 utilise la Renault 18 comme point de départ. Le moteur, désormais implanté en position avant longitudinale (avec l’idée d’en faire un futur 4×4), et la face avant, sont issus de la Renault Fuego. Le design de la carrosserie est accepté mais Renault Service Design apporte des changements : ils ne veulent pas du tout qu’elle ressemble à un “van”. Les travaux se poursuivent autour de l’idée de Matra : le sol sera plat et les sièges seront amovibles.

Parallèlement au développement de l’Espace, Matra récupère les parts de Peugeot et Talbot dans Matra Automobile, afin d’avoir carte blanche pour signer un accord de coopération avec la marque au losange qui prévoit « l’étude et la fabrication par Matra, en utilisant Renault mécanique composants, issus de véhicules commercialisés par le réseau européen Renault ».

En mars 1984, le premier Espace sort de l’usine Matra de Romorantin. Les lignes de production Murena et Rancho sont libres de produire le monospace révolutionnaire, avec une capacité maximale de 80 à 100 véhicules par jour. La production en série débute le 16 avril 1984, et la commercialisation en juillet, juste après les Chrysler Town & Country, Dodge Caravan et Plymouth Voyager, qui deviendront le premier concurrent d’Espace en Europe sous le nom de Chrysler Voyager.

Pourtant, Bernard Hanon ne sera plus là. Après d’énormes pertes, le PDG à qui Renault devra sa fabuleuse aventure “spatiale” est limogé cette même année et remplacé par Georges Besse.

démarrage difficile

Mais revenons à notre véhicule. Matra a développé en peu de temps un modèle révolutionnaire dans la forme et le fond, une autre manière d’appréhender la voiture. Son procédé de fabrication avec une carrosserie à base de produits composites, domaine que le petit constructeur maîtrise parfaitement, est une réussite.

Sous son esthétique TGV, cette voiture monocoque propose une formule différente à ceux qui recherchent un modèle familial. Les premiers utilisateurs qui découvrent l’Espace sont séduits par son anticonformisme, son volume, sa lumière, sa présentation et les multiples combinaisons pratiques qu’il propose. Avec son grand pare-brise fortement incliné (58 degrés) qui sert de prolongement au petit capot moteur et sa grande surface vitrée, l’Espace est spectaculaire. Ses dimensions aujourd’hui peuvent nous sembler petites: la longueur ne dépassait pas 4,25 mètres et la hauteur de 1,69, mais en 1984, elles ont attiré l’attention.

L’intérieur de l’Espace offrait une série de possibilités insoupçonnées pour tout modèle familial en vente jusqu’alors.

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Mais la grande innovation était à l’intérieur. Ce fut une véritable réinvention. Avec un plancher complètement plat, sa modularité offrait des possibilités d’adaptation aux besoins jusqu’alors impensables. Les trois sièges arrière indépendants étaient non seulement situés sur des rails qui leur permettaient de se déplacer individuellement et longitudinalement, mais pouvaient également être retirés indépendamment. De plus, deux autres pourraient être ajoutés dans la troisième rangée: ainsi, il est devenu environ sept sièges. Les sièges avant pouvaient être tournés, et celui du centre transformé en table, avec laquelle une réunion pouvait être organisée à l’intérieur. Il Renault Espace c’était l’image parfaite du slogan de la marque : « cars for living ».

De plus, la position de conduite surélevée, quelque chose d’inhabituel à l’époque dans les véhicules à usage privé et familial, est devenue une autre attraction. Sous le capot avant battait le moteur 2 litres de la R25 GTS, avec 110 CV de puissance et atteint 180 km/h, un chiffre qui n’est pas ridicule.

Mais ensuite, il y a le marché. Tout le monde sait qu’il y a une clientèle potentielle… mais personne ne sait où elle se trouve. Au début, malgré les attentes, le démarrage des ventes a été lent. Le premier mois seulement neuf unités sont vendues…. Il coûte le même prix que le haut de gamme de Renault, le R25, et cela se remarque. Les responsables de Renault sont inquiets. Au total, 2 703 voitures sont vendues la première année.

Mais en mars 1985, dix mille unités étaient atteintes, en juin 1987, il y en avait plus de 50 000 exemplaires. À partir de 1988, la première génération de l’Espace reçoit une mise à jour qui lui permet d’augmenter la distance devant les véhicules utilitaires, et une version à quatre roues motrices apparaît, la Quadra.

Début 1990, le dernier Espace de la première génération sort d’usine. La deuxième génération se caractérise par un corps aux formes plus douces et plus arrondies. La longueur passe à 4,42 mètres, l’offre motorisation s’étoffe avec la présence de mécaniques essence et diesel, et d’un V6 essence en haut de gamme. De plus, l’équipement et la qualité des finitions font un bond énorme. L’Espace n’a rien à voir avec un van. Pour faire face à une concurrence qui commence à réagir, l’Espace s’est modernisé. Nous sommes en pleine fièvre des monospaces, toutes les marques veulent un modèle de ce type dans leur gamme, y compris le groupe PSA.

Mais ça, vous savez, c’est une autre histoire.



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