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Le débat sur le nucléaire en Suisse: réponses prudentes, inquiétudes et controverses

Le débat sur le nucléaire en Suisse: réponses prudentes, inquiétudes et controverses

Une réponse prudente du Conseil fédéral

Dans sa réponse relevée par les journaux de Tamedia, le Conseil fédéral se montre prudent. Il souligne qu’une acceptation du postulat du président du PLR «ne préjuge pas de la levée de l’interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires. La prise en compte du scénario permet toutefois de prendre des décisions en toute connaissance de cause.»

Le débat sur le retour du nucléaire est donc bien lancé. Et il se tiendra lors de la session parlementaire qui commence lundi, le texte de Thierry Burkart étant au programme du Conseil des Etats le jeudi 7 décembre. Cet été, le ministre UDC de l’Energie, Albert Rösti, s’est d’ailleurs dit «prêt à tout» concernant le nucléaire, ajoutant au Temps en septembre: «Dans cette phase de transition, nous avons besoin de notre parc nucléaire.»

Notre interview: Albert Rösti: «La situation est clairement meilleure que l’année dernière sur le plan de l’électricité»

La situation actuelle

En Suisse, l’électricité produite provient pour 58% de l’hydraulique, 32% du nucléaire, 8% de nouvelles énergies renouvelables et 2% d’énergies fossiles. Quatre centrales nucléaires sont en activité, Gösgen, Beznau I & II et Leibstadt, dont deux réacteurs parmi les plus anciens du monde. Le nucléaire à l’avantage de fournir de l’électricité en continu et sur demande selon les besoins, surtout en hiver, contrairement à l’éolien et au photovoltaïque qui ont une production d’électricité intermittente en fonction de l’ensoleillement et des conditions de vent. Des technologies sont en cours de développement pour stocker l’énergie produite par les énergies renouvelables.

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En temps réel: la consommation et la production d’électricité en Suisse

La crainte d’une pénurie d’électricité d’ici à 2050 est soutenue par une récente étude de l’Association des entreprises électriques suisses menée avec le Laboratoire fédéral d’essai des matériaux et de recherche (Empa). Celle-ci indique que l’électrification des voitures et la rénovation énergétique des moyens de chauffage entraîneront une forte augmentation des besoins d’électricité, qui passeront de 62 TWh actuellement à entre 80 et 90 TWh en 2050, soit une hausse de 25 à 40% selon les scénarios. Selon les auteurs de cette projection, l’augmentation des besoins en électricité et la désaffectation successive des centrales nucléaires suisses d’ici à 2044 créeront un déficit de production de 37 à 47 TWh, «qui devra être comblé par la construction de nouvelles installations».

Le lien du “Mantelerlass”

Face à ces inquiétudes, les parlementaires ne restent pas les bras croisés. Une adaptation importante de la stratégie énergétique a été adoptée par les Chambres fédérales en septembre dernier. Après deux années de délibérations, elles ont mis en forme le Porte-manteaul’«acte modificateur unique» qui change plusieurs lois, notamment celles sur l’énergie et l’approvisionnement en électricité. Un des objectifs est de permettre la production de deux fois plus d’électricité d’origine renouvelable d’ici à 2050 qu’initialement prévu par la Stratégie énergétique 2050.

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La commission de l’énergie du National, présidée par le PLR Jacques Bourgeois (FR), a également mis en place une loi pour accélérer les procédures pour les installations d’énergies renouvelables. «On s’aperçoit que leur développement est trop lent. Ce nouveau texte permettra aux cantons de concentrer les échelons dans les procédures», explique le Fribourgeois, qui salue la décision du Conseil fédéral pour sa réponse sur le nucléaire: «On ne doit pas opposer les énergies renouvelables et le nucléaire, je pense que les deux sont complémentaires. Et il ne faut pas fermer la porte à l’évolution technologique qui permettra de réduire au maximum les risques liés au nucléaire, même le risque zéro n’existe pas.»

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Le nucléaire prôné par une vingtaine de pays à la COP28

L’idée de redévelopper le nucléaire fait son chemin aussi chez les dirigeants présents à la COP28, face à la nécessité de réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre. Et de ce point de vue là, le nucléaire coche les bonnes cases. A l’occasion de la conférence des Nations unies sur le climat, une vingtaine de pays – dont la France, les Etats-Unis et les Emirats arabes qui ont construit leur première centrale – ont lancé un appel pour tripler les capacités nucléaires d’ici à 2050. Les auteurs du rapport du GIEC ont d’ailleurs tenu compte de la part des combustibles nucléaires dans la modélisation de la trajectoire permettant de rester en dessous des 1,5 °C.

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La gauche bouillonne

Mais ce retour en grâce du nucléaire est contesté par la gauche. Interrogé par Le Matin Dimanchele conseiller national Bastien Girod (Les Vert·e·s/ZH) précise: «Il faudrait vingt ans au moins pour construire une nouvelle centrale; en matière de transition, elle arriverait nettement trop tard.» Et selon lui, ajouter des réacteurs à de vieilles centrales revient à «prolonger la durée d’exploitation d’une génération de centrales des années 1970, moins sûres que les plus récentes.»

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Roger Nordmann, conseiller national (PS/VD) et rapporteur de la commission qui a chapeauté la réforme du Porte-manteauvoit dans la démarche de Thierry Burkart un «fantasme idéologique». «Je pense que la volonté du président du PLR est de ralentir le développement des énergies renouvelables. Mais quoi qu’il arrive, il faudra bien faire un jour sans le nucléaire, car ce n’est pas réaliste de penser qu’il pourrait y avoir un nouveau réacteur avant la fin des centrales vieillissantes», affirme le conseiller national au Temps. Non seulement un retour du nucléaire prendrait des décennies avant qu’un projet de nouvelle construction puisse voir le jour, mais encore «on ne saurait pas où le mettre sur le territoire, s’il doit être à plus de 50 kilomètres d’une agglomération». Et la question des déchets radioactifs n’est toujours pas réglée, «alors que cela fait depuis 1969 qu’on en produit».

video Nucléaire: pourquoi le retour en grâce?

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