Les adolescents et l’écran : une nouvelle forme de solitude
30 mai 2025
Autrefois, l’adolescence rimait avec transgression : une cigarette fumée en cachette, un premier verre partagé, des limites défiées. Aujourd’hui, le “frisson” a muté. Il ne sent plus le tabac, n’a plus le goût de l’alcool, mais irradie de la lumière froide d’un écran omniprésent.
Le constat alarmant du rapport ESPAD 2024
Le rapport ESPAD 2024 est sans équivoque : les jeunes Européens consomment moins d’alcool et de tabac, mais leur utilisation des réseaux sociaux a explosé, souvent de manière problématique. En Italie, 46,5% des adolescents en font un usage excessif. Chez les filles, ce chiffre atteint 55,5%, les piégeant dans la toile de TikTok, Instagram et snapchat. Non pas pour communiquer, mais pour survivre, pour rester connectés, pour se sentir moins seuls dans une société qui semble avoir oublié comment les regarder dans les yeux.
Le saviez-vous ?
L’usage problématique des réseaux sociaux est souvent une forme de “survie psychique”, un moyen d’anesthésier la douleur, l’attente, le conflit et la fatigue, ces émotions que l’on n’apprend plus à gérer.
Un problème déplacé : du corps à l’esprit
Si les chiffres concernant la consommation d’alcool, de tabac et de cannabis sont encourageants, ils masquent une réalité plus sombre : le problème s’est déplacé de l’extérieur vers l’intérieur, du corps à l’esprit, de la substance à l’identité.
L’abus des réseaux sociaux est une déviance invisible. Il ne laisse ni verre sur la table, ni haleine chargée, ni cigarette dans le cendrier. Mais il fragilise l’estime de soi, exacerbe l’anxiété, déstabilise l’humeur, perturbe le sommeil et rend difficile le simple fait d’être en silence.
Cet usage problématique s’insinue sournoisement, ne crie pas, mais creuse, ne provoque pas d’explosion, mais consume.
Le besoin d’être vu et validé
Derrière chaque adolescent rivé à son écran se cache un besoin fondamental : être vu, reconnu, validé. Chaque “like” est une caresse manquée,chaque filtre une tentative d’être accepté,chaque vidéo virale une demande d’amour déguisée en contenu. Le problème n’est pas l’écran, mais ce qu’il anesthésie.
Conseil pratique
Encouragez les activités hors ligne, les interactions sociales réelles et les moments de silence pour aider les adolescents à développer des compétences d’adaptation saines.
La paralysie des adultes
De nombreux parents sont conscients du problème, mais se sentent impuissants, dépassés. Certains tentent de fixer des limites, mais culpabilisent. D’autres laissent faire,pour avoir la paix. Mais la tranquillité n’est pas la paix, c’est seulement l’absence de bruit. Et dans ce calme apparent, les jeunes crient, sans voix, sans mots.
L’oubli de l’ennui et de l’attente
Nous avons oublié la valeur de l’attente, confondu liberté et abandon, accès illimité et amour inconditionnel. Pendant ce temps, l’algorithme grandit avec eux, les connaît, les étudie, les façonne. Il sait ce qu’ils désirent,ce qu’ils craignent,ce qui les tient éveillés jusqu’à trois heures du matin. L’algorithme n’est pas malveillant, mais implacablement efficace.Et si personne ne lui fait contrepoids, il finit par se substituer à la réalité.
Question aux lecteurs
Qui élève réellement nos enfants : nous ou TikTok ?
Une réponse adulte et responsable
Il faut une réponse adulte, non moralisatrice, mais responsable. Une réponse qui n’accuse pas, mais ouvre les bras. Une école qui forme à l’empathie et pas seulement aux équations, qui enseigne à penser et pas seulement à produire.
Le courage de dire “non”
Il faut une famille qui ait le courage de dire “non” quand il est plus facile de dire “oui”,une communauté qui ne juge pas l’adolescent pour ses erreurs,mais l’accueille dans ses tentatives de devenir quelqu’un. Un adolescent qui passe des heures sur les réseaux sociaux n’est pas simplement “dépendant”, il cherche quelque chose. Notre rôle, en tant que psychologues, éducateurs, parents, est de nous demander : que cherche-t-il ? Attention ? Affection ? Une identité ? Une place dans le monde ?
Les réseaux sociaux ne sont pas le mal, ils sont le symptôme.
Le véritable ennemi n’est pas Instagram, mais l’absence d’alternatives, le vide relationnel, le temps non partagé, le dialog interrompu, l’adulte qui ne sait plus parler la langue du temps, du corps, du jeu, du silence. Derrière ces chiffres se cache peut-être une opportunité.
Regarder les jeunes et leurs besoins
Une occasion de les regarder vraiment, ces jeunes. Non comme des problèmes à résoudre,mais comme des êtres humains à accompagner. Non comme des chiffres dans un rapport, mais comme des vies en quête de sens. Si nous ne voulons pas que les smartphones les élèvent,c’est à nous d’être plus présents que leur fil d’actualité. Cette présence ne se mesure pas en heures, mais en authenticité, en regards qui ne jugent pas, en paroles qui ne banalisent pas, en limites qui protègent, en silences qui écoutent.
Un jour,ils pourraient nous demander :
Tu étais là,quand je scrollais pour ne pas sentir ma solitude ?
À cette question,nous devrons être prêts à répondre avec la vérité,non avec la culpabilité,mais avec la responsabilité de ceux qui choisissent d’être là,vraiment.
FAQ
- Q : Les réseaux sociaux sont-ils toujours mauvais pour les adolescents ?
A : Non, ils peuvent être utiles pour la communication et l’apprentissage, mais un usage excessif peut être problématique. - Q : Que peuvent faire les parents pour aider leurs enfants ?
A : Fixer des limites, encourager les activités hors ligne et maintenir un dialogue ouvert. - Q : Quel est le rôle de l’école ?
A : Former à l’empathie, à la pensée critique et à la gestion des émotions.