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Ils avaient envisagé l’assassinat du frère de Cyborg, un seigneur de la drogue à Saint-Ouen.

Ils avaient envisagé l’assassinat du frère de Cyborg, un seigneur de la drogue à Saint-Ouen.

Après l’assassinat en août 2019 de Mohamed Gacem, alias Cyborg, chef de l’un des « fours » les plus rentables de la région parisienne, la cité Charles-Schmidt, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), un autre contrat a-t-il été posé sur la tête de son frère cadet et lieutenant présumé, Yacine Gacem ? C’est la question sur laquelle se penche, depuis lundi 14 novembre, le tribunal correctionnel de Bobigny.

En tout, neuf hommes âgés de 25 à 40 ans comparaissent devant la 13e chambre, soupçonnés d’avoir participé, à des degrés divers, à ce projet d’assassinat. Dans le box vitré, ils sont au nombre de cinq. Trois autres prévenus sont libres, sous contrôle judiciaire. Ne manque à l’appel que le commanditaire présumé, El Mehdi Z., dit « Malsain ». Cet homme de 32 ans, qui règne sur ce qui était l’autre méga four audonien de la cité des Boute-en-Train, est le principal rival du clan Gacem. Déjà accusé d’avoir commandité l’assassinat de Cyborg, il a pris la fuite au Maroc après le crime.

En petit baron francilien de la drogue, Cyborg gérait avant sa mort un clan ayant la mainmise sur le trafic de drogues dans plusieurs quartiers de Saint-Ouen, dont la cité Charles-Schmidt, qui génère à elle seule un chiffre d’affaires stratosphérique, estimé à 30 000 euros par jour. C’est en mettant la main sur le trafic de la cité Soubise, convoitée par le clan des Boute-en-Train, que Cyborg aurait signé son arrêt de mort.

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Malsain, dont les affaires étaient déjà menacées par le projet de destruction de deux tours aux Boute-en-Train, n’aurait pas supporté de perdre encore du terrain. Le 24 août 2019, Cyborg est abattu au fusil Kalachnikov sur un parking d’Aubervilliers. Une balise est retrouvée sous son véhicule.

« Il fallait l’écarter du stup, pas le tuer »

Après ce règlement de comptes sanglant, des renseignements font état de la volonté de Malsain de « finir le travail » en éliminant le frère cadet et bras droit de Cyborg, Yacine Gacem, surnommé « Kipch », et son numéro 2, Sirou B., ou « B6 ». Trois balises sont retrouvées sous leurs véhicules ou ceux de leurs proches. Ces trackers mènent les enquêteurs de la brigade criminelle droit sur un petit trafiquant des Boute-en-Train, Ali B., alias « Gros Minet ».

Il reviendra par la suite sur ses déclarations, mais en garde à vue, Gros Minet implique le clan des Boute-en-Train. Il soutient que Malsain donnait notamment ses ordres à ses hommes de main par téléphone. Parmi les exécutants, Faisal B., alias « RTP », lieutenant présumé de Malsain, décrit comme un « petit gérant » dans le trafic par un prévenu. « B., c’est un menteur », proteste dans le box RTP, crâne glabre et traits fins, ses mains tatouées posées bien à plat pendant son interrogatoire. « Il savait que j’étais en prison. C’était facile [de me charger] », ajoute le prévenu.

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Les investigations ont montré que les prévenus, tous liés au clan des Boute-en-Train, avaient pour habitude de se rassembler dans un squat de la cité. C’est là, selon l’accusation, que Malsain aurait donné ses consignes, dans le cadre du projet d’assassinat. Des balises y seront retrouvées. Dans une conversation interceptée par les enquêteurs, en septembre 2020, le bras droit présumé de Malsain, Mohamed M., dit « Mojito », lâche à son interlocuteur qu’il « faut éliminer Kipch ».

« Je voulais dire qu’il fallait l’écarter du stup, mais pas le tuer », se justifie dans son box cet homme de 32 ans, en sweat rouge bordeaux à bandes blanches, et barbe de trois jours. « Il me dérangeait pour le trafic. Je ne me sentais pas en sécurité en allant à Saint-Ouen », ajoute-t-il, après avoir reconnu jouer le rôle de « gérant du point de deal » des Boute-en-Train. « Je ne vois pas l’intérêt de participer à une guerre de territoires. Je ne suis pas propriétaire d’un point de deal », insiste-t-il.

Le bras droit de Malsain séquestré après la mort de Cyborg

Après l’assassinat de Cyborg, au printemps 2020, Mojito a été enlevé en bas de chez lui et séquestré pendant plusieurs heures par des hommes armés. Ils l’ont roué de coups et lui ont demandé qui avait tué le trafiquant. Un renseignement anonyme parvenu aux enquêteurs soutient que Malsain aurait décidé de tuer Kipch juste après cette agression. « C’est faux », évacue Mojito à l’audience.

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Un utilitaire a été identifié par les enquêteurs comme ayant servi à faire des repérages. L’ADN de plusieurs suspects est découvert dans ce véhicule, spécialement aménagé pour y faire de discrètes surveillances. Deux autres véhicules munis de fausses plaques d’immatriculation ont été stationnés à Épinay-sur-Seine, dans l’attente du passage à l’acte de l’équipe chargée du double assassinat, selon un renseignement anonyme. À l’intérieur, des bidons d’essence ont été trouvés. « La destination de ces véhicules était très certainement d’être brûlés après les faits », soutient le procureur.

Les investigations n’ont pas permis de retrouver des armes. « Pas d’arme, pas d’argent, pas de stups, dans un projet d’assassinat de baron de la drogue, ça commence à devenir compliqué », grince à l’audience Me Matthieu Juglar, l’avocat d’Amrane S., soupçonné d’avoir participé à des surveillances. « Ce dossier est vide », tonne à son tour Me Fabien Arakelian, l’avocat de Moha, un proche supposé de Malsain. Le délibéré est attendu ce vendredi soir.

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