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“Il ne lui restait que 4 jours à vivre” : à Chartres, le souvenir des rafles juives de 1942

“Il ne lui restait que 4 jours à vivre” : à Chartres, le souvenir des rafles juives de 1942
Juliette Clément a animé ce 24 juin 2022 une conférence en mémoire des rafles juives de juin et juillet 1942 en Eure-et-Loir (©MR / Actu Chartres)

Animée par la directrice des publications de la Société archéologique d’Eure-et-Loir, Juliette Clément, cette conférence, organisée à la demande du préfet d’Eure-et-Loir, avait un rôle commémoratif mais aussi instructif. Ce vendredi 24 juillet au lycée Marceau de Chartres (Eure-et-Loir) a devoilé des archives encore inédites au grand public de ces rafles datées de juin et juillet 1942.

Souvenir

Le « travail de mémoire », voilà l’objectif numéro un du travail de Juliette Clément à travers ses recherches actuelles et anciennes conférences, afin de faire vivre l’histoire et faire la lumière sur le passé.

Un passé pas toujours glorieux justement, comme lors des rafles juives perpétuées à l’été 1942, notamment en Eure-et-Loir. Une implication de la France souvent masquée depuis l’après-guerre, et qui remonte petit à petit au sein des travaux historiques.

Clamer la grandeur de la France n’est pas incompatible avec la reconnaissance des horreurs commises en son nom

Yanis BouzarSous préfet d’Eure-et-Loir

Si l’Eure-et-Loir est bien la terre de Jean Moulin, il a aussi été complice des atrocités commises par les nazis durant la Shoah.

Des archives inédites

Les travaux de Juliette Clément et de ses collaborateurs sont uniquement basés sur des archives, les témoignages seuls sont eux exclus. La plupart d’entre elles sont policières, à partir de 1940, à l’échelle nationale, régionale ou bien départementale. Le Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) et des rencontres avec les descendants de déportés, ont, eux aussi, fait figure de sources.

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Ces documents permettent de retracer les derniers mois de la quasi-entièreté des euréliens déportés dans des centres d’exterminations à l’est de l’Europe, puisque seul l’un d’entre eux a pu revenir vivant une fois la guerre terminée.

Il faut aussi noter que ces travaux reposent sur des personnes juives recensées dès 1940. Les chiffres annoncés sont alors potentiellement sous-estimés car certains avaient pris la décision de ne pas dévoiler leur religion au moment de l’arrivée de la Wehrmacht en France.

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Des rafles surprenantes

Alors, pourquoi l’Eure-et-Loir a-t-il subi plusieurs rafles à l’été 1942, quelques mois avant le Veld’hiv ? De manière très cynique, uniquement parce qu’il faire de la place.

Les camps de concentration de Phitiviers et Beaune-la-Rolande sont tout simplement trop pleins avant les rafles prévues à Paris. Il faut les vider, ce que la police française va gérer seule. À ce moment-là, le centre d’Auschwitz n’a pas encore de chambres à gaz au rythme industriel, et est à peine terminé, mais il est paré au fonctionnement.

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Pour faire partie les trains depuis Phitiviers et Beaune-la-Rolande, il faut un certain quota de personnes présentes à bord. Bémol, ces quotas ne sont pas atteints avec les déportés déjà présents sur place, il faut donc apporter un surplus. Ce surplus va être cherché au plus proche…en région Centre-Val de Loire, avec le feu vert de la préfecture tricolore. Les 25, 26 juin et 10 juillet, des rafles sont perpétuées en Eure-et-Loir pour compléter ces convois.

Le système de déportation franco-allemand des juifs en 1942
Le système de déportation franco-allemand des juifs en 1942 (©MR / Actu Chartres)

Un antisémitisme à outrance

Cela arrive dans un contexte évidemment très antisémite, et ce bien avant le début de la guerre. Dès 1938, des lois anti-juives font leur apparition, ce qui va avoir un impact sur la déportation de milliers de personnes durant les années qui vont suivre.

Par exemple, la révocation d’une loi de 1927 qui a offert la nationalité française à beaucoup de juifs et à leurs enfants. La perte de cette naturalisation va en condamner beaucoup du fait de manque de protection.

Des juifs bénéficiaires du droit d’asile et déjà placés dans des camps à la frontière pyrénéenne seront aussi offerts au régime allemand en 1940. C’est la destruction point par point de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

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Plus de 4 jours à vivre

La plupart des euréliens déportés au moment de ces rafles sont des commerçants, sur la centaine de familles répertoriées. Parmi elle, la famille Ullman-Weil, résidente à Chartres en 1942, propriétaire d’un commerce au 30 rue des Change. Tous ses membres se sont déclarés juifs en 1940 par peur des représailles s’ils le cachaient.

Le 23 juin 1942, le père fait une demande écrite à la préfecture afin de passer en zone sud y voir une partie ses enfants, sans savoir que le lendemain, il sera arrêté et déporté à Auschwitz dans la foulée. Il mourra le 27 juin 1942 dans ce camp, comme presque l’intégralité de la famille Ullman-Weil.

Entre septembre 1941 et janvier 1945, ce sont 119 euréliens juifs déclarés qui seront morts à Auschwitz, soit par sous-alimentation (durée de résistance maxime égale à un mois), soit par les chambres à gaz. Certains, déportés avant 1942, ont participé à la construction d’Auschwitz II, qui comprend ces chambres d’extermination.

Au total, 75 721 personnes seront déportées depuis la France entre 1942 et 1945.

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