Il s’agissait d’une simple capture d’écran d’un message texte, posté sur un groupe Facebook populaire.
« Legault était à Beauceville aujourd’hui. Il est allé au restaurant et tout le monde l’a hué et crié dessus ! dit le texte, en français.
“Il a dû partir avant de manger.”
Partagé plus d’un millier de fois, avec presque autant de commentaires, le post a fait applaudir les gens du restaurant en répétant la phrase “Dehors la CAQ”.
Sauf que ça ne s’est pas fait.
Le chef de la Coalition Avenir Québec, François Legault, était en effet à Beauceville dans un restaurant le 29 août mais il n’y a pas eu de huées et il n’est pas parti précipitamment.
Le message est l’un des nombreux messages sur les réseaux sociaux qui sont trompeurs ou carrément faux, avec des conséquences réelles à la fois pour ceux qui le lisent et pour ceux qui sont impliqués dans l’événement.
Publication largement partagée sur Facebook
La capture d’écran a été publiée sur le groupe Facebook LibreChoix, le lendemain de la venue de Legault à Beauceville pour un événement de campagne.
Le groupe, dirigé par Carl Giroux, compte jusqu’à présent plus de 55 000 abonnés.
Giroux n’a pas répondu aux nombreuses demandes d’entrevue.
C’est une affiche prolifique, souvent en direct sur sa page via son téléphone portable, pour dénoncer les restrictions liées à la pandémie comme le code QR et les masques obligatoires.
Dernièrement cependant, il a jeté son poids derrière Éric Duhaime et le Parti conservateur du Québec. Le parti s’est désolidarisé de Giroux, affirmant qu’il ne fait pas partie de son équipe.
Sur le post concernant Legault à Beauceville, certains se sont demandés si le post était factuel, d’autres ont trouvé et affiché le nom du restaurant.
“Toute la semaine après l’arrivée de M. Legault, des clients de mon commerce m’ont demandé ‘Hey, j’ai une question pour vous : est-ce vrai?'”, raconte Sanika Paquette, propriétaire du Restaurant Le Normandie Sabreur.
“Non ! À chaque fois, je leur dis : ‘dis aux autres que ce n’est pas vrai !'”
Legault était en ville aux côtés du candidat de la CAQ dans la circonscription de Beauce-Nord, Luc Provençal, et a été accueilli sous les acclamations des fidèles du parti.
“C’est complètement faux et je trouve ça regrettable parce qu’il y a toujours quelque chose de négatif à dire, et ce n’est pas comme ça qu’on avance dans la société”, a déclaré Provençal.
“Une fois que [a false post] commence, il est difficile de l’arrêter.”
Récit plus large des faux messages
Chaque jour, des photos, des vidéos et des mèmes faux ou trompeurs sont mis en ligne. Lors d’une élection, le phénomène est amplifié, mais il n’a pas nécessairement d’impact, explique Mathieu Lavigne, directeur du Projet de mésinformation électorale du Québec du Centre des médias, de la technologie et de la démocratie de l’Université McGill.
“Si vous cherchez de la désinformation en ligne, vous la trouverez, mais cela n’a pas tendance à avoir un impact important sur les élections en général ou sur les résultats des élections”, a-t-il déclaré.
La désinformation semble rester au sein de petites communautés en ligne, n’atteignant pas nécessairement le grand public, a déclaré Lavigne. Pourtant, dit-il, les messages faux ou trompeurs sont plus susceptibles d’être crus s’ils correspondent à vos croyances existantes.
“Certaines personnes dans les chambres d’écho consomment constamment ce type d’informations”, dit-il.
“Les individus doivent porter une grande attention aux informations qu’ils consomment et essayer d’éviter leurs préjugés psychologiques.”
Mais ce n’est pas seulement la responsabilité des individus, dit Lavigne. Les plateformes de médias sociaux et les politiciens jouent également un rôle.
La société mère de Facebook, Meta, note qu’elle prend la désinformation au sérieux et qu’elle supprime les publications qui violent ses normes communautaires et ses politiques publicitaires.
Il a également lancé un programme de vérification des faits par un tiers en 2016. Au Canada, le programme est géré par l’Agence France-Presse.
Mais cela ne supprime pas les faux messages.
“Nous voulons trouver un équilibre entre permettre aux gens d’avoir une voix et promouvoir un environnement authentique. Lorsque la désinformation est considérée comme fausse par nos partenaires de vérification des faits, nous réduisons sa diffusion au sein de Feed et d’autres surfaces”, écrit Meta.