2023-09-24 08:25:29
L’homme politique, diplomate et historien Shlomo Ben Ami Il était optimiste quant aux perspectives de paix au Moyen-Orient lorsqu’il était, il y a 23 ans, ministre des Affaires étrangères d’Israël et négociait secrètement, d’abord en Suède puis à Camp David (États-Unis), avec les dirigeants palestiniens. Maintenant, Les propos de cet intellectuel juif semblent sombres. Il estime que son pays pratique l’apartheid dans les territoires occupés et qu’il est sur le point d’être divisé en deux par les La réforme judiciaire de Benjamín Netanyahu. Il estime que la solution de deux Etats, l’un palestinien et l’autre israélien vivant ensemble en paix, est devenue obsolète. Et il estime qu’après les accords d’Abraham entre Israël et les pays arabes, la cause palestinienne est plus perdue que jamais. Ben Ami (Tanger, 1943) reçoit LE JOURNAL D’ESPAGNE à l’Université pontificale de Comillas à Madrid.
Où va Israël ? Vous êtes à la croisée des chemins. Le pays est divisé en deux par la réforme judiciaire de Netanyahu, qui conduit Israël aux modèles de la Turquie, de la Pologne ou de la Hongrie. Et c’est quelque chose que les Israéliens ne sont pas prêts à accepter. Cela explique les manifestations massives qui durent depuis près d’un an. C’est aussi une période prometteuse, car Soudain, l’Israël de centre-gauche et l’Israël libéral se sont levés. Et ils l’ont fait d’une manière admirable et sans précédent, quelque chose que je n’ai vu nulle part ailleurs. Une année de manifestations pacifiques sans un seul blessé. Jusqu’à présent, notre idée était que tout était juste et l’extrême droite, les fondamentalistes et la théocratie, ce qui existe, mais…
Ils sont en effet majoritaires et ils sont au Gouvernement… Ils forment le gouvernement, mais ils ne constituent pas la majorité dans la nation. Presque tous les sondages indiquent que la majorité est contre le comportement de ce gouvernement sur la question de cette réforme judiciaire. Netanyahu perd le soutien de ce que j’appellerais la droite civilisée, qui ne veut pas nécessairement un État palestinien mais ne veut pas non plus une économie socialiste ; celui qui veut une démocratie décente. Auparavant, le pays était divisé en deux sur la question palestinienne. Mais aujourd’hui, cette question est coincée, écartée et presque oubliée. Un jour, cela explosera, car l’occupation ne pourra pas durer éternellement…
Êtes-vous sûr qu’Israël ne pourra pas continuer à occuper le territoire palestinien ? sinus leavec toute sa puissance militaire ? Oui, mais cela deviendra inévitablement une guerre civile, entre Palestiniens et entre Israéliens. C’est une situation comme celle de l’Afrique du Sud, mais sans solution sud-africaine, car il ne sera pas possible de donner le gouvernement à la majorité dans le cas de la Palestine.
Considérez-vous, parmi ceux qui critiquent Israël, qu’Israël est un État d’apartheid contre les Palestiniens ? Israël, à l’intérieur de ses frontières de 1967, n’est pas un État d’apartheid. Un exemple : c’est un juge arabe qui a envoyé en prison le chef de l’Etat, Moshe Katsav. On ne peut donc pas simplement dire qu’Israël est un État d’apartheid. Mais si tu supprimes les frontières entre Israël et les territoires palestinienset si nous considérons l’espace politique depuis la Méditerranée jusqu’à la vallée du Jourdain, nous trouvons déjà la situation sud-africaine : et il y a le danger latent auquel les Israéliens ne prêtent pas attention pour le moment, car ils sont concentrés sur la question de la démocratie israélienne, sans parler de l’impact que l’occupation aura sur cette démocratie.
Dans ce contexte, pensez-vous que l’Espagne devrait, comme l’a promis Pedro Sánchez, reconnaître la Palestine en tant qu’État ? Je me souviens de ce que m’a dit le président colombien Juan Manuel Santos après avoir reçu le prix Nobel de la paix à Oslo. Il avait déclaré à l’ancien secrétaire d’État américain Henry Kissinger, également présent sur place, que la Colombie allait reconnaître la Palestine en tant qu’État. Et Kissinger a répondu : pour quoi faire ? (pour quoi ?) Je pense que ce serait une déclaration positive, car elle donnerait un élan moral à la cause palestinienne. De par ma position politique, je n’y vois rien de mal. La question est, comme l’a dit Kissinger : quels changements dans la réalité ?
Il y a des questions qui, selon les militants pro-palestiniens, pourraient changer la situation, comme le boycott des produits israéliens (comme le boycott, le désinvestissement et les sanctions, le mouvement BDS)… Le BDS a été une défaite totale. Israël ne cesse de croître économiquement, il n’y a pas de chômage, c’est une puissance technologique. De temps en temps, il y a un acte qui a de la visibilité : un chanteur qui ne va pas chanter en Israël, ou un fonds norvégien qui ne veut pas investir. Mais au-delà, ils n’ont aucun impact. Aussi, franchement, l’objectif politique du BDS, ne pas s’arrêter lorsqu’il y aura un État palestinien et que tous les réfugiés reviendront… Ce sont des conditions déraisonnables et elles ne font que susciter l’animosité chez les Israéliens, même chez ceux qui sont intéressés par une solution politique. Si l’on en juge par la situation internationale actuelle d’Israël, aucun type de boycott n’a été très efficace. Aujourd’hui, Israël dispose d’une plus grande marge de manœuvre sur la politique internationale que jamais dans son histoire. Quand j’étais au gouvernement, chaque fois qu’on allait rencontrer un Premier ministre des Affaires étrangères dans une capitale, la première question était toujours la Palestine. Aujourd’hui, on s’interroge sur la coopération économique, technologique, cybernétique, etc. Israël est devenu une référence. Et je ne pense pas que le BDS ait eu un grand impact.
Il existe une grande entreprise espagnole appelée CAF, qui fabrique des trains, et qui fait l’objet d’une polémique ouverte car elle participe à la construction, pour environ 500 millions d’euros, du tramway israélien qui atteint les zones occupées. Pensez-vous que le gouvernement espagnol devrait le pénaliser ? Je ne veux pas, depuis l’étranger, prêcher le boycott de mon pays. Mais j’espère que les décisions prises répondront aux impératifs moraux et politiques. Je pense aussi à l’Arabie Saoudite, à qui l’Espagne a vendu l’AVE alors qu’il était ce qu’il était…
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